Revers et découvertes sur le GR70

Premier jour de marche (19 kms) sur le chemin de Stevenson entre Le Puy-en-Velay et Le Monastier-sur-Gazeille, en Haute-Loire, le vendredi 13 juin. Temps splendide pour débuter le GR70. Mais, avec un genou fragile, combien de temps cette nouvelle aventure va-t-elle durer?
Après une journée de repos, devant un troupeau de moutons broutant tranquillement à proximité du chemin…
… deuxième étape (18 kms), le dimanche 15 juin, jusqu’à la petite commune de Bargettes…
… via le village de Goudet, baigné par la Loire. Population permanente: 75 habitants (plus l’été).
Délicieuse salade aux lardons, à Goudet, le dimanche 15 juin. Superbe halte pour déjeuner sur le GR70, les pieds pratiquement dans les eaux de la Loire. Bistrot de campagne « La Dentelle », Goudet.
Tôt le lendemain matin, le 16 juin, après avoir quitté Bargettes. Sous un ciel lourd, menaçant, une fermière vient nourrir et soigner ses vaches « atteintes de tiques », me dit-elle. « Faites attention dans les hautes herbes et les broussailles! », me lance-t-elle, amicalement. Me voilà averti. Je poursuis prudemment ma route.
Un peu plus tard le même jour, deux heures environ avant l’arrivée au bourg d’Arquejols (200 habitants) où je m’arrêterai pour la nuit. Une autre étape de 18 kms. Voir la carte plus bas.
Le balisage impeccable du chemin de Stevenson. Ici, au milieu de la quatrième étape, entre Pradelles (Haute-Loire) et Langogne (Lozère), le mardi 17 juin.

Tout avait pourtant été si bien planifié!

Mais il faut savoir, même si c’est dur parfois, quand s’arrêter.

Après avoir parcouru quatre étapes, j’ai malheureusement dû abandonner le GR70 à Langogne, le mardi 17 juin. Mon genou gauche était trop mal en point.

J’aurais pu continuer, forcer, mais j’ai préféré être prudent – Je ferai dès mon retour une seconde radio.

Ce n’est que partie remise.

Je reviendrai sur le chemin – magnifique! – peut-être l’an prochain. Une bonne excuse pour retrouver le Sud-Ouest de la France!

Sur le chemin d’Arquejols, le lundi 16 juin. L’impression, dans ce secteur de la Haute-Loire, de marcher dans un tableau de Van Gogh.

Une fois arrivé à Langogne cependant, clopin-clopant, avec un genou légèrement abîmé, que faire?

Quelles étaient, entre la Lozère, l’Ardèche et la Haute-Loire, mes options?

Ayant environ trois semaines devant moi, et après avoir soigneusement examiné les cartes de la région, j’ai pris contact avec la Malle Postale.

Et ai décidé, via leurs navettes régulières, ponctuelles, pratiques, de faire un peu de tourisme dans le Sud-Ouest. En longeant le GR70. En prenant tout mon temps. Avant mon retour à Vancouver, le 6 juillet.

Le tracé du GR70 en rouge. Souligné en noir, Langogne, où je me suis arrêté, le 17 juin. En violet, les lieux et villages où j’ai fait halte 2-3 jours avant de rentrer à Paris: l’abbaye Notre-Dame-des-Neiges (croix en violet, en Ardèche), Florac (Lozère), Saint-Jean-du-Gard (Gard), puis Arles (au sud d’Alès), dans les Bouches-du-Rhône.

Vu les circonstances, et avec le recul, ce changement de programme a été une très bonne idée!

J’ai beaucoup vu, entendu, appris, au cours ces étapes imprévues!

 1 – Florac, 22-25 juin

Coup de foudre en découvrant le petit village de Florac, en Lozère. Population: environ 2300 habitants (beaucoup plus en juillet-août). C’est à Florac que siège l’administration du parc national des Cévennes.

Deux vues partielles de Florac, à partir du pont de la Draille, le mardi 24 juin.  Le village est baigné…
…par trois cours d’eau:  le Tarnon, la Mimente et le Tarn! D’où le surnom de Florac: « la fleur des eaux ».

Après trois nuits passées à Langogne et deux nuits à l’Abbaye Notre-Dame-des-Neiges avec, dans les deux cas, mouches, moustiques, punaises de lit et salle de bain partagée, quel soulagement de loger à Florac dans un hébergement confortable (et abordable)!

Vue de la fenêtre de ma chambre à Florac. À l’horizon, les falaises de calcaire et de granit typiques de la région des Cévennes.

J’en avais bien besoin! Après la déception et les moments de découragement qui ont suivi mon retrait du GR70, les trois jours passés à me reposer, à me baigner, à me promener à Florac m’ont fait beaucoup de bien! J’ai quitté le village complètement revigoré. Calme. Serein. En paix. Convaincu d’avoir pris la bonne décision.

Comme il serait bon de vivre ici pendant plusieurs semaines!

Aperçu d’un sentier qui traverse le parc Paul Arnal, au coeur du village. Florac est sans doute l’une des plus belles communes visitées jusqu’à présent lors de mes randonnées dans le sud-ouest. Un véritable coup de coeur.
Après trois trop courtes journées, il faut déjà repartir. Au revoir, Florac! Ci-dessous…
… un groupe de cyclistes à l’entraînement à l’extérieur du village, le mardi 24  juin.

2 – Saint-Jean-du-Gard et Anduze (Gard), 25-28 juin

Une autre étape captivante!

Le « Pont Vieux » qui permet de traverser la rivière, le Gardon, à Saint-Jean-du-Gard, le mercredi 25 juin. Achevé en 1731, le pont a été détruit par les crues et reconstruit en 1961. C’est l’un des emblèmes du village, symbole de l’histoire mouvementée des Cévennes.

Nous sommes, à Saint-Jean-du-Gard, dans la partie sud des Cévennes. Un territoire rude, austère, peu fertile. Une terre d’émigration. Une terre de résistance aussi. (Voir les guerres de religion, puis la révolte des Camisards entre 1702 et 1704). Les habitants des Cévennes ont longtemps été, majoritairement, protestants.

En visitant le musée du village, on apprend qu’on a vécu ici autrefois de la culture de la châtaigne. Puis, à partir du 19è siècle, de la sériciculture, l’industrie de la soie. Un âge d’or pour la région. Jusqu’à la fin des années 30, on recrutait des jeunes femmes, parfois venues de très loin, d’Espagne ou d’Italie, pour faire tourner les nombreuses filatures établies à Saint-Jean-du-Gard.

Les conditions de travail de ces « fileuses » étaient sévères, cruelles. Ci-dessous, quelques-unes des règles qu’elles devaient suivre, méticuleusement – sous peine de renvoi. Voir en particulier l’article VI.

Ce document est l’une des nombreuses pièces exposées à « La Maison Rouge » – l’excellent musée des vallées cévenoles situé à Saint-Jean-du-Gard. Une visite incontournable pour mieux comprendre la société rurale et traditionnelle des Cévennes. J’y ai passé près de trois heures.

Tôt le jeudi matin 26 juin…

… après une promenade sur « le chemin de Robiac » au-dessus de Saint-Jean-du-Gard…

j’ai sauté…

… dans le petit train à vapeur des Cévennes qui, en 40 minutes…
… relie l’été, Sain-Jean-du-Gard au village d’Anduze, un trajet de 13 kms. Anduze où, comme tous les jeudis….
… c’est jour de marché…
Dans les allées du village, producteurs et artisans proposent leurs produits…
… aux habitants et aux visiteurs dans une atmosphère amicale et conviviale

J’ai profité de ma visite à Anduze pour aller goûter la cuisine du pays…

Faux filet d’agneau, carottes confites en purée et tomates

… dans un restaurant dirigé par…

… Jean-Michel, cuisinier remarquable, né à Saint-Paul, à La Réunion, et maintenant installé à Anduze. Excellente adresse, restaurant Cave Bourbon, Anduze (Gard).

Une journée bien remplie!

Au retour d’Anduze, grenadine et café sur une terrasse à Saint-Jean-du Gard, le jeudi 26 juin

Après une dernière journée passée à explorer Saint-Jean-du-Gard, en particulier son superbe musée, départ en train le samedi 28 juin pour Arles, via…

… la gare d’Avignon Centre, ci-dessus, vers midi 30. La plupart des trains dans la région sont ce jour-là bondés. Sur les quais, de nombreux usagers seniors, très actifs – Bravo à la SNCF qui facilite sur l’ensemble de son réseau le transport des vélos. Le service – pratique, gratuit – est de plus en plus populaire.

3 – Arles (Bouches-du-Rhône), 28 juin – 1er juillet

Dernière halte avant de rentrer à Paris. Et autre moment fort en redécouvrant la vieille ville d’Arles, visitée une première fois il y a plus de trente ans.

Depuis mon départ de Langogne, les températures partout au pays sont en forte hausse. 38 degrés à Arles, l’après-midi de mon arrivée.

Samedi 28 juin, la rue du 4 Septembre, dans la vieille ville d’Arles, débouche sur…
… la place Voltaire, animée jour et nuit…
… malgré la canicule qui sévit dans le sud depuis plusieurs jours. Tous les départements près de la Méditerranée sont fin juin en « vigilance rouge ». L’alerte météo maximale.

Malgré la chaleur, rapides promenades dans la vieille ville classée « Ville d’art et d’histoire » par l’Unesco… On entend beaucoup parler anglais, italien, dans les rues… mais je souhaitais visiter à Arles un lieu particulier…

La mythique…

… librairie et maison d’édition « Actes Sud », située au 47 rue du Dr. Danton (Place Nina Berberova)… à trois minutes de marche de mon logement, rue de l’Hôtel de Ville…
Vue partielle de l’intérieur de la librairie, le lundi 30 juin. Depuis 2004, Actes Sud s’est distingué en obtenant 5 prix Goncourt. C’est aussi pour moi l’occasion de faire ici provision d’ouvrages qui serviront dans la planification de nos prochains voyages (La Réunion, Cap Vert…)

Depuis Arles, retour en train à Paris, le mardi 1er juillet, en début d’après-midi. Température dans la capitale: 38 degrés.

Rue de Belleville, à Paris, le lendemain de mon arrivée, le mercredi 2 juillet. Le thermomètre est encore monté d’un cran.

Après presque deux mois passés en France, en Italie, en Espagne, je rentre à Vancouver demain. Très heureux de rentrer à la maison et de retrouver Diana qui termine (après Calgary) une semaine chez des amis à Terre-Neuve.

Quelles leçons tirer de ce périple ?

La première, c’est que j’essaierai de revenir sur le GR70 dès que cela sera possible.

Mais il faudra sans doute ajuster le calendrier des prochaines excursions.

Vu le réchauffement climatique et les canicules de plus en plus précoces, est-ce vraiment raisonnable de marcher six ou sept heures par jour dans le sud-ouest de la France sous une température de 35, 36 ou 37 degrés?

Ce qui était le cas, fin juin, pour les randonneurs sur le chemin de Stevenson.

Planifier donc marcher plus tôt (ou plus tard) dans la saison, idéalement en mai ou en septembre. En espérant une météo favorable.

Fontaine, Landos (Haute-Loire), le lundi 16 juin.

J’aimerais, pour conclure, remercier sincèrement:

Notre amie Christiane dont les suggestions m’ont permis de faire de si belles découvertes cet été, de part et d’autre des Pyrénées et le long du GR70. Merci mille fois, Christiane!

Agnès et Serge qui nous ont si gentiment rejoints à Paris en mai. Un  immense merci! À bientôt pour d’autres aventures!

Tommy et Lucy, mille grazie pour votre formidable et chaleureux accueil, fin mai, chez vous, en Toscane.

Merci enfin à tous mes compagnons de route, début juin, entre Collioure et Cadaqués. Entre la côte vermeille et la Catalogne, nous avons vécu pendant sept jours une très belle aventure!

À tous et chacun, un bon, un merveilleux été!

Pièce de « Fin Gras » (boeuf) du Mézenc (région de la Haute-Loire) grillée, accompagnée de légumes et d’un mille-feuille de pomme de terre. Plat suivi…
… d’un crémeux au chocolat Weiss, de macarons maison et de glace spéculos. Un repas fabuleux! Le Monastier-sur-Gazeille, le vendredi 13 juin.

Hiva Oa & Tahuata, visages des îles Marquises

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L’une de mes premières rencontres sur l’île de Hiva Oa, le lendemain de notre arrivée, le mardi 27 décembre. Madeleine, née à Ua Pou, prépare pour un baptême l’autel de l’église du village de Taaoa (200 habitants), situé à 7 kms à l’ouest d’Atuona. Les routes de l’île étant très escarpées, j’ai rejoint le village en vélo électrique. SVP voir les cartes ci-dessous.
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Un client devant le magasin Naiki, près de la boulangerie de Roger et Viviane, à Atuona, le samedi 31 décembre. Les tatouages aux Marquises étaient autrefois intimement liés au rang et à la fonction d’un individu au sein de la communauté. Les tatouages indiquaient sa profession, ses habiletés spécifiques, ses croyances.
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Autres sourires chaleureux en arrivant en bateau, le mercredi 28 décembre, au quai de Hapatoni, un bourg d’environ 80 habitants sis sur la côte ouest de l’île de Tahuata.
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Les îles Marquises, situées à plus de 1400 kms au nord-est de Tahiti. Soulignée en orange, l’île de Nuku Hiva où nous avons séjourné du 16 au 26 décembre. En vert, dans le groupe sud de l’archipel, les îles de Hiva Oa et Tahuata.
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En vert, quelques-unes de nos haltes sur l’île de Hiva Oa (2 500 habitants) et sur l’île de Tahuata, 750 habitants – la plus petite île habitée de l’archipel. Depuis Atuona (mal orthographié sur la carte), il faut compter une bonne heure de traversée pour rejoindre Tahuata. Notre pension est située au-dessus du village d’Atuona, la commune principale d’Hiva Oa. C’est à Atuona qu’ont vécu autrefois Paul Gauguin et Jacques Brel. Ils reposent tous les deux au cimetière du village. Voir plus bas.
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Du balcon de notre pension, le soleil se lève au-dessus de la baie d’Atuona, le samedi 31 décembre. Le mont Temetiu, haut de 1213 mètres, surplombe la baie. Les bâtiments sur la droite (toits verts) abritent le musée Gauguin et l’espace culturel Brel.
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Diana à la table du petit-déjeuner sur la terrasse de notre pension à Atuona.

Comment conclure cette série d’articles sur notre voyage de deux mois en Polynésie française?

Un périple qui nous a emmenés dans trois des cinq archipels du territoire – les Îles de la Société, les Tuamotu, les Marquises. Et dans neuf îles, chacune au caractère bien différent: Tahiti, Moorea, Huahine, Maupiti, Bora Bora, Tikehau, Nuku Hiva, Hiva Oa et Tahuata.

Nous avons vécu ici, au soleil, dans ces îles lointaines, pépites du Pacifique Sud, une expérience i-n-o-u-b-l-i-a-b-l-e!

Inoubliable en grande partie à cause des gens merveilleux – « nos anges gardiens », affirme Diana – que nous avons croisés et rencontrés sur notre chemin.

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Françoise, l’une des nombreuses artisanes de Hiva Oa, accompagnée de ses enfants, à Atuona, le vendredi 30 décembre. La famille vit à Puamau.

Leurs sourires, leur accueil, leur gentillesse, ont guidé et éclairé notre séjour.

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Diana en compagne de Gilda, Tiae, Tama et V. à leur domicile, au-dessus d’Atuona, le mardi 3 janvier

J’aimerais ici les remercier. Les saluer. Leur rendre hommage.

Tout en partageant quelques-unes de nos aventures et rencontres à Hiva Oa!

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Livraison matinale de thon rouge devant notre pension, à Atuona, le jeudi 29 décembre. Les deux jeunes filles sont cousines et travaillent en famille avec les pêcheurs qui reviennent tôt le matin au petit port d’Hiva Oa – Photo: Diana
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Une famille en excursion au village de Puamau situé à une heure trente de route à l’est d’Atuona.

Vu la taille et la topographie de l’île, j’ai dû me résoudre à rejoindre ici (une fois n’est pas coutume) des groupes d’excursions.

Impossible, comme à Moorea ou Huahine, de sillonner les routes d’Hiva Oa en scooter! Les pistes de l’île sont de véritables montagnes russes, bien trop accidentées pour un petit moteur 50cc – comme en témoigne l’image ci-dessous.

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Aperçu de la piste qui dévale les falaises et sinue entre les localités de Hanaiapa et Nahoe, sur la côte est de Hiva Oa, le lundi 2 janvier.

Il a aussi été beaucoup plus simple de rejoindre et visiter l’île de Tahuata dans le cadre d’un voyage organisé. J’ai dû m’adapter.

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En compagnie de Teiki (à droite) et d’une équipe aguerrie d’hommes de mer, nous quittons le mercredi 28 décembre le petit port de Hiva Oa (à l’arrière-plan). Grand départ…
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pour l’île de Tahuata. Nous sommes une quinzaine, répartis en deux groupes. Ambiance de fête à bord des deux navires!
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Il nous faudra une bonne heure pour rejoindre le quai du petit bourg d’Hapatoni. Population, 80 habitants.
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À notre arrivée au village, accueil au son des tambours…
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et des sourires curieux des résidents comme celui de Mau

La production du coprah à Tahuata ayant au fil des ans considérablement diminué, Hapatoni vit aujourd’hui principalement de l’artisanat. Deux fois par an, un groupe de villageois se rend à Tahiti afin d’exposer et de vendre les oeuvres réalisées dans la commune, comme celles ci-dessous.

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Aux Marquises, la plupart des bijoux (bracelets, boucles d’oreilles, pendentifs, colliers) sont réalisés à partir d’ossements de boeufs ou de « cochons » (comme on les appelle ici) – os qui sont patiemment travaillés, polis puis sculptés…
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Israëlla vend à Hapatoni quelques-unes des pièces créées par les membres de sa famille
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Après la visite du village, leçon d’histoire sur les Marquises offerte par notre guide, Brian O’Connor. La famille de Brian, d’origine irlandaise, réside aux Marquises depuis plusieurs générations.
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Nous reprenons un peu plus tard le bateau afin de déjeuner, au nord de Hapatoni, au village de Vaitahu. SVP voir la carte plus haut. Autour de la table, au son des ukélélés, concert impromptu de chansons traditionnelles marquisiennes. Notre guide Brian, à gauche, est accompagné de son frère, Pifa, au centre. Pifa est aussi, à ses heures … policier, à Atuona.
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Poerani, résidente d’Atuona, accompagne notre groupe, le mercredi 28 décembre

Notre journée à Tahuata se termine par une longue et magnifique baignade à la plage Hanamoenoa, située à une vingtaine de minutes de bateau au nord du village de Vaitahu.

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La plage Hanamoenoa, sauvage, bordée de cocotiers, au coeur des Marquises, le mercredi 28 décembre.
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Retour à bord, en compagnie de Teiki. La pluie et l’hiver canadien sont bien loin! Bonus, il n’y a pas ici (comme à Tikehau) de petits requins à pointes noires pour gêner les baigneurs!
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Plaque commémorative posée à Vaitahu, le bourg principal de l’île de Tahuata

Deuxième excursion bien différente – et fascinante – le lundi 2 janvier.

En compagnie de 3 autres visiteurs – un jeune couple allemand, en lune de miel, et Tehihi, responsable des finances à la mairie de Nuku Hiva – nous partons avec notre guide Brian O’Connor à la découverte de l’histoire des premiers Marquisiens.

Nous souhaitons voir et admirer quelques-uns des vestiges que les premiers Marquisiens ont laissé sur l’île – notamment les « tikis », des statues de pierre chargées d’histoire, disséminées à plusieurs endroits à Hiva Oa.

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En excursion, à la recherche des « tikis » de Hiva Oa, le lundi 2 décembre
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« Le tiki souriant » de Hiva Oa. Comme pour les statues de Rapa Nui-l’île de Pâques (« les moais »), de nombreuses questions subsistent quant à l’origine et à la fonction de ces figures mystérieuses. Les recherches continuent. Pour info, « le tiki souriant » mesure environ 93 centimètres.

L’objectif de l’excursion est de mieux comprendre la chronologie des lointaines et complexes « migrations polynésiennes » – et les traces qu’ont laissé ici ces premiers habitants.

Les historiens nous rappellent que vers 4000 avant J.-C. une migration débute depuis l’Asie du Sud-Est. Les premiers colons traversent l’océan pour explorer les îles du Pacifique Sud. Ces migrants s’installent aux îles Tonga et à Samoa vers 1300 avant J.C.

Les Marquises deviennent plus tard un lieu d’installation puis un centre de dispersion vers l’ensemble d’une zone qu’on appelle aujourd’hui « le triangle polynésien » – une zone qui va de Tahiti, à Hawaï, à l’île de Pâques (Rapa Nui) et à la Nouvelle-Zélande.

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« Le triangle polynésien ». Notez SVP le triangle rouge qui pointe, au-delà d’Hawaï, vers le Pacifique Nord-Ouest et les côtes de la Colombie-Britannique. Je suis persuadé que le peuple Haïda des îles Haïda Gwaïï (anciennement, îles de la Reine-Charlotte) partage avec les Polynésiens une histoire commune!  (Magnifique projet de recherche en perspective.)

Cette période se caractérise, selon les historiens, par l’émergence, dans ce triangle, d’une culture, d’une identité régionale. Suite à ces migrations, les Tahitiens, les Marquisiens, les Hawaïens et les Maoris de la Nouvelle-Zélande partagent tous des ancêtres communs, des pratiques culturelles communes (la danse « haka ») et parlent une langue similaire, connue sous le nom de Ma’ohi.

Exemples: le mot Moana = « océan » en tahitien, marquisien, maori, somoa, hawaïen.

Manu = « oiseau » dans les mêmes langues.

Notre excursion, le long de la côte nord et est de Hiva Oa, se poursuit.

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Arrivée au bourg de Hanaiapa, au nord de Hiva Oa

L’île est splendide! Et très peu visitée. Aucune pension, aucun commerce dans les villages que nous traversons.

« Les gens ne sont pas très intéressés, nous dit Brian. Ils ont ce dont ils ont besoin ici. L’océan pour la pêche. La forêt où ils peuvent récolter papayes, avocats, corossols, noix de coco, mangues, pamplemousses. Ils élèvent leurs cochons, leurs poules, leurs chèvres. Ils sont tranquilles. Pourquoi faire dormir des touristes ici? »   

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Hanaiapa compte environ 200 habitants.
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La petite plage de Hanaiapa, le lundi 2 janvier. Qui n’aimerait pas passer quelques jours ici?

En route pour le site archéologique de Lipona, à Puamau, à la pointe est de l’île, nous traversons, entre de profondes vallées, des paysages majestueux.

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Une des magnifiques baies situées sur la côte est de Hiva Oa
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Arrêt entre Hanaiapa et Hanapaaoa
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au-dessus de panoramas de rêve. Ci-dessus, avant le bourg de Nahoe

Après 90 minutes de route, nous arrivons au village de Puamau (200 habitants) où un déjeuner nous attend « Chez Marie-Antoinette. »

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Menu du restaurant « Chez Marie-Antoinette ». 2500 CFP (Franc Pacifique) = 21 euros ou CAN$30
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Notre groupe, réuni autour de Brian, à la table de l’unique restaurant de Puamau, « Chez Marie-Antoinette », le lundi 2 janvier

Avant de rentrer à Atuona, dernier arrêt, au-dessus de Puamau, au site archéologique de Lipona, l’un des plus importants des Marquises

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Le site de Lipona est un immense « meae » (sanctuaire religieux) qui couvre près de deux hectares. Le site représente l’un des principaux témoignages de la civilisation marquisienne, à son apogée, avant l’arrivée des Européens.

Que se passait-il ici exactement dans cet immense sanctuaire? Des sacrifices? Des offrandes?

Qui était habilité à diriger et à participer à ces cérémonies religieuses?

Dans quel but ces cérémonies avaient-elles lieu?

Autant de questions qui font toujours aujourd’hui débat.

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Selon les historiens, l’aménagement du site de Lipona date du 18è siècle. De nombreux « tikis« , comme ceux ci-dessus, ont été découverts au siècle dernier puis restaurés par des équipes d’archéologues. Les travaux et les recherches continuent.

Comme pour les statues de l’île de Pâques, les « tikis » de Lipona, comme ceux des îles voisines, n’ont toujours pas livré leurs secrets.

À noter: le site de Lipona figure en bonne place dans le dossier de candidature des îles Marquises au patrimoine mondial de l’UNESCO. Une décision doit être rendue en 2024.

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Aperçu de la baie d’Atuona, le lundi 2 janvier.

Retour à Atuona

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Ultime randonnée matinale, le mardi 3 janvier. Nous quittons Hiva Oa le lendemain.
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au-dessus du village d’Atuona. Sur la droite, en blanc, l’église de l’immaculée Conception.
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La journée, comme toutes celles que nous avons passées ici, s’annonce splendide! Au fur et à mesure que nous grimpons, nous observons la vie dans la cour des maisons du village.
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Nous nous dirigeons vers l’un des lieux emblématiques d’Atuona…
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… « le cimetière du Calvaire » où reposent, à quelques pas l’un de l’autre, le peintre Paul Gauguin (1848-1903)
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… et le chanteur Jacques Brel (1929-1978)

Les deux artistes ont laissé à Hiva Oa des souvenirs bien différents. J’ai déjà parlé dans un article précédent de l’héritage très controversé de Gauguin en Polynésie française – et aux Marquises en particulier, où, affaibli, malade, il a passé les dernières années de sa vie. Je laisse à d’autres le soin de juger de sa conduite. Il nous reste ses tableaux. Magnifiques.

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Vahiné no te tiare (Femme tahitienne avec une fleur) de Paul Gauguin, 1891.

La visite du petit musée qui lui est consacré, à côté de l’espace Brel, à Atuona, a été l’un des temps forts de notre séjour. Nous y avons passé, en arrivant, un long moment. Excellente chronologie des années mouvementées de voyage de Gauguin. On peut aussi admirer, au calme, des dizaines de reproductions de son oeuvre. Une visite incontournable.

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« La maison du jouir » de Paul Gaugin, à Atuona, a été restaurée et est située dans le village à son emplacement d’origine.

Jacques Brel, de son côté, séduit rapidement les habitants d’Atuona lorsqu’il débarque sur son voilier, en 1975. Maddy, sa compagne, d’origine guadeloupéenne, est du voyage.

Très vite, Brel s’intègre à la vie du village et multiplie les initiatives. Il fait venir d’Europe des caisses de livres et monte une bibliothèque pour les enfants d’Atuona. Il lance une salle de cinéma. Vend son voilier et prend des cours de pilotage. Il achète un avion. Livre le courrier vers des îles lointaines, aux Marquises. Il rapatrie même vers les hôpitaux des femmes malades ou enceintes.

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Jacques Brel

Malheureusement, Brel est atteint « d’une grippe qui ne soigne pas. » Il s’éteint, en France, en 1978.

Un bel espace, dans un immense hangar, lui est dédié. On peut y voir son avion, restauré, le Jojo. Un haut-parleur diffuse ses plus belles chansons, y compris l’une de mes préférées ici.

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L’une des principales voies d’entrée à Atuona, en venant (par la route) de Taaoa. Aucun risque d’embouteillage ici.

Après deux mois de voyage, il faut se résoudre à rentrer!

Avant de terminer cette série d’articles, je tenais à partager quelques-uns des visages et des lieux qui ont particulièrement marqué notre séjour en Polynésie. Les voici, en ordre chronologique.

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Au marché de Papeete, le dimanche 13 novembre. Il existe en Polynésie française une très importante communauté chinoise. Fortement intégrée, elle rayonne dans le commerce et le milieu des affaires. La communauté descend en majorité des ouvriers venus travailler dès 1860 dans les plantations de coton du territoire.
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« Sam », photographié au-dessus du belvédère Toatea, à Moorea, le jeudi 17 novembre – Photo: Diana
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Giovanni, chauffeur de taxi et musicien, à l’aéroport de Raiatea, le mardi 29 novembre. Photo: Diana
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Herenui, Hinanui et Evens, à notre pension, le jour de notre départ de Maupiti, le mardi 6 décembre. Beaucoup d’émotions ce jour-là. Photo: Diana.
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Réveil à Bora Bora, le mercredi 7 décembre. La photo a été prise vers 6 heures du matin, à deux pas de notre modeste pension, à la pointe Matira.
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En route, quelques heures plus tard, pour l’aéroport de Bora Bora.
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Marguerite et son mari Christian tiennent dans le quartier Paofai à Papeete le restaurant « Le Phénix d’Or ». Leur établissement est vite devenu notre cantine là-bas le midi. Excellente cuisine cantonaise.
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En compagnie de Mario, le père de Christian (photo précédente). Mario est né à Tahiti. Tout comme son père. Mario et moi avons exactement le même âge. Papeete, le jeudi 15 décembre.
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Jessica qui nous a si gentiment invités à partager avec elle et ses amis à Taiohae (Nuku Hiva) le repas de Noël.
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Portrait de famille, le dimanche 25 décembre, à la sortie de la messe de Noël
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à la cathédrale Notre-Dame-des-Îles-Marquises, à Nuku Hiva.
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Patrick, jardinier, menuisier, chauffeur et homme à tout faire à Atuona, le mardi 27 décembre. Éloignés des services disponibles dans les centres urbains (Papeete/Moorea), les « îliens » sont extrêmement polyvalents – et fiers de vivre une existence basée sur leur auto-suffisance. Nous avons été conquis. Photo: Diana

Trois dernières remarques. (Il pourrait y en avoir plusieurs autres tant nous avons écouté et appris ici)

1. – Lorsqu’on demande à un(e) Polynésien(ne) (hors Papeete) où il/elle aimerait partir en voyage, la réponse, surprenante, a été presque partout la même. Ce n’est pas de Rome, Paris ou New York dont ils rêvent. La plupart des Polynésiens souhaitent plutôt visiter, chez eux, l’un des archipels qu’ils ne connaissent pas – les Marquises ou les Tuamotu sont souvent mentionnées.

2. – Pour les familles polynésiennes, le weekend idéal est souvent un séjour dans leur « plantation », un lopin de terre qu’ils possèdent ou louent à l’intérieur des terres. À défaut, ils prennent une tente et vont camper au bord d’une plage lointaine. Ou ils vont à la pêche. Dans les trois cas, l’objectif est le même: se rapprocher de la nature et vivre en famille en communion avec elle.

3. – Tout le monde aux Marquises et sur les îles (hors Papeete/Moorea) se connait! Lorsqu’à Taiohae (Nuku Hiva) je montrais les photos d’une excursion réalisée à l’autre bout de l’île, on me répondait, invariablement, « Oui, je le connais, il s’appelle…« . « Celui-là aussi, c’est mon oncle (ou cousin), il s’appelle… » J’ai rarement vu un peuple aussi soudé. Cohésion qui saute aux yeux lors des  messes dominicales. La ferveur des assemblées – les chorales sont accompagnées de tambours, d’ukélélés, de guitares – est prodigieuse.

Un autre exemple? Les tables où sont entreposés les produits, au marché de Nuku Hiva, ne sont pas surveillées. Elles appartiennent aux familles de la communauté. Chacun va et prend ce dont il a besoin. On se dirige ensuite vers une autre table où quelqu’un note sur un registre les produits achetés et de quelle table ils proviennent. Le revenu de la vente est ensuite acheminé à la famille concernée.

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Forêt de cocotiers à l’extérieur du village de Puamau, le lundi 2 janvier.

Le dernier mot est pour Diana.

Diana qui m’a si vaillamment accompagné pendant ces deux mois! Diana qui a bravé les lézards, les moustiques, la chaleur, l’humidité et nos multiples (16) sauts de puce en avion depuis la mi-novembre!

Ce voyage aurait été bien différent si je ne l’avais pas eue à mes côtés!

30dec avec Mahi
En compagnie de Mahi, à notre pension, à Atuona, le vendredi 30 décembre.
Lilly
et avec Lilly, le jour de notre départ d’Hiva Oa
mairesse
Dernière rencontre à l’aéroport d’Hiva Oa avec Joëlle Frébault, la mairesse d’Atuona, en route elle aussi pour Papeete, le mercredi 4 janvier.

En quittant la Polynésie, je ne peux m’empêcher de penser à mon pays d’origine – Haïti – où l’on pouvait aussi, autrefois, au bord de la mer, en français et en créole, profiter de la même douceur de vivre.

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Devant la plage de Taaoa, le mardi 27 décembre

Nous avons réalisé en Polynésie notre plus beau voyage!

Nous avions souvent entendu dire en planifiant cette aventure que les Polynésiens étaient le peuple le plus chaleureux, le plus accueillant de la terre. Et c’est si vrai!

Où d’autre, hors Polynésie, reçoit-on un collier de fleurs ou de coquillages en arrivant à destination?

Et un second collier au moment du départ!

Où d’autre les gens se tutoient-ils dès la première rencontre, dès le premier regard?

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Tepua, rencontrée le mercredi 28 décembre à Hapatoni, sur l’île de Tahuata

Tout cela va beaucoup, beaucoup nous manquer!

Mais nous savons déjà que nous reviendrons!

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Petite maison à l’extérieur du village de Taaoa

Après plusieurs heures de voyage, une nuit en transit à San Francisco, nous sommes maintenant de retour à la maison.

Un grand changement est en cours dans notre quartier, Mount Pleasant. Notre rue va être en 2023/24 complètement transformée, métamorphosée, en voie verte et piste cyclable. Plus aucune automobile ne circulera devant nos fenêtres.

Le bonheur absolu. Bon début d’année à tous!

À chacun son chemin…

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Mercredi 20 juillet, en route vers les Pyrénées, 13è étape (sur 17), entre les villages de Pomps et Maslacq…
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… au coeur d’une région magnifique, le Béarn! – l’une de mes plus belles découvertes cet été.
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La carte du Béarn que traverse en partie le GR65. D’Arzacq-Arraziguet, où j’ai fait halte une nuit, à Arthez-de-Béarn, avant d’entrer, après Navarrenx, au Pays basque. Les villages de Pomps et Maslacq, où j’ai aussi passé la nuit, sont respectivement situés au nord et au sud d’Arthez-de-Béarn.

Il m’a fallu plusieurs semaines cette fois-ci pour me remettre de l’expérience du Chemin. Me remettre physiquement d’abord. Mais pas seulement.

Plusieurs semaines passées à trier, au calme, à Saint-Jean-Pied-de-Port, à Paris, puis à Vancouver, tout ce que j’avais vu et vécu cet été sur le GR65. 

Plusieurs semaines pour prendre un peu de recul. Et réaliser que j’avais enfin terminé – et réussi! – mon projet un peu fou de randonnée entamé, il y a plus de quatre ans, au Puy-en-Velay!

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Célébration à Saint-Jean-Pied-de-Port, le jeudi 28 juillet, trois jours après la fin de mon périple. Je repars le lendemain, en train, pour Paris. Mission accomplie. Au-revoir, Pays basque – à bientôt! Restaurant Le Chaudron, Place des Remparts.

Avant d’aller plus loin, récapitulons.  

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Dimanche 17 juillet, étape 10 entre Barcelonne-du-Gers et Miramont-Sensacq (Landes)

J’ai parcouru, en trois « saisons » sur le GR65 (2018, 2019, 2022), les 740 kilomètres de « la Via Podiensis », la Voie du Puy qui emmène marcheurs et pèlerins du Puy-en-Velay, en Haute-Loire, jusqu’aux Pyrénées. 

Voir ici et ici les trajets effectués au printemps 2018 et au printemps 2019. (SVP cliquer sur les mots/chiffres en caractères gras pour avoir des détails supplémentaires).

Et voir ici l’esprit dans lequel j’ai entrepris ce projet en 2018.

Fiche-Puy
Le tracé complet de « la Voie du Puy ». Soulignées en bleu, les villes/communes où j’ai soit commencé, soit terminé chacune de mes trois « saisons » sur le chemin de Compostelle en France: Le Puy-en-Velay – Conques (2018), Cahors – Nogaro (2019), Conques – Cahors (2022) et Nogaro – Saint-Jean-Pied-de-Port (2022).

J’ai terminé cette randonnée épique en franchissant comme prévu cet été, entre le 5 et le 25 juillet, 325 kilomètres. Répartis en 17 étapes et deux tronçons.

Tronçon 1. = 8 étapes: De Conques (Aveyron) à Cahors (Lot) =136 kms. Voir ici l’article précédent.

Tronçon 2. = 9 étapes: De Nogaro (Gers) à Saint-Jean-Pied-de-Port (Pays basque) = 189 kms. Nous y sommes. Voir la carte ci-dessus.

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Lundi 18 juillet, étape 11, une randonneuse solitaire entre Miramont-Sensacq (Landes) et Arzacq-Arraziguet (Béarn)

Depuis le printemps 2018, j’ai eu le bonheur de traverser, en partie, huit départements, dans l’ordre suivant. ( ) = le code du département.

La Haute-Loire (43) – la Lozère (48) – l’Aveyron (12) – le Lot (46) – le Tarn-et-Garonne (82) – le Gers (32) – les Landes (40) et les Pyrénées-Atlantiques (64)

Que retenir et quelles leçons tirer de ce périple de 740 kilomètres effectué sur les merveilleuses routes du sud-ouest de la France? 

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Samedi 23 juillet, étape 15, entre Navarrenx (Béarn) et Bellevue (Pays basque)

Cette longue randonnée a d’abord été, pour moi, une expérience hors du commun. Une aventure inoubliable.

Une aventure qui incite aussi à la réflexion, à l’introspection.

Comment en serait-il autrement? – Après avoir parcouru seul, la plupart du temps, 740 kilomètres. (Marcher seul était mon choix, dès le départ).      

Voici donc, sur cette épopée, quelques réflexions et observations personnelles – qui n’engagent que moi.

Puisque, selon ses circonstances, sa situation, son état d’esprit, chacun vit, sur le GR65, une expérience différente.

A chacun son chemin.

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Entre Pomps et Maslacq, le mercredi 20 juillet.
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Randonneurs australiens, suisses, américains, français et canadiens réunis autour de la table de la ferme Gainekoetxea, à Ostabat, au Pays basque, le dimanche 24 juillet. Nous rejoindrons tous le lendemain, Saint-Jean-Pied-de-Port, 25 kms au sud.

Le 1er constat, très personnel, c’est qu’au fil de ces trois saisons, le chemin de Compostelle en France s’est peu à peu, pour moi, profondément transformé, métamorphosé.

À chacun de mes retours sur le GR65, le chemin a pris, inexorablement, une dimension différente.

Il y a d’abord eu, au départ du Puy-en-Velay, une dimension spirituelle. De nombreux marcheurs croisés sur le GR65, en 2018, étaient sur la route, semble-t-il, dans le cadre d’une démarche religieuse, pieuse.

Le terrain s’y prête. Il y a entre Le Puy-en-Velay et Conques des chapelles splendides, des églises magnifiques. Où les pèlerins, souvent, s’arrêtent. Prient. Allument un cierge parfois. Ce premier tronçon du chemin, en Haute-Loire, en Lozère, en Aveyron, est tout simplement somptueux. Il invite à la méditation, à l’intériorisation.

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Les édifices et symboles religieux sont de moins en moins fréquents sur le GR65 à mesure que l’on se rapproche des Pyrénées. Mais ils sont toujours présents. Ci-dessus, le lundi 25 juillet, avant l’arrivée à Saint-Jean-le-Vieux, à 4 kms environ de Saint-Jean-Pied-de-Port.

Changement radical au printemps 2019 lors de ma deuxième saison sur le GR65!

Entre Cahors et Nogaro, la dimension spirituelle du chemin s’est estompée. Remplacée par le bonheur pur et simple de découvrir, dans des régions superbes, dans le Quercy, en Gascogne, dans le Gers, toute la palette et la richesse de la cuisine du Sud-Ouest!

Foie gras, pâtés, rillettes, canard confit, fromages, vins, armagnac. Je ne me suis pas privé! Et je reprenais vite, midi et soir, autour des « plats du jour » et des repas dans les maisons d’hôtes, les quelques kilos perdus lors de mes étapes quotidiennes.

Ce deuxième tronçon du chemin a été, pour moi, en un mot, épicurien. Je ne m’y attendais pas. Je me suis laissé tenter. Et je n’ai aucun regret! 

Quel bonheur de goûter à Cahors, à Montcuq, à Auvillar, à Eauze, à Montréal-du-Gers, à Nogaro, à des plats fabuleux! 

J’ai découvert, au fil de ces étapes, dans le Gers surtout, une façon de vivre bien particulière. Un art de vivre en fait qui célèbre, autour de la table, des produits du terroir, convivialité et plaisir partagé.  

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Poivrons farcis accompagnés de fromage fondu et de piperade, à Pomps (Béarn), le mardi 19 juillet.

Ma troisième saison enfin, celle que je viens de terminer, a eu, comme principale caractéristique, l’effort physique. Effort intense. Quotidien. Ininterrompu. Cela n’a pas été facile. 

Premier défi? Sur cette dernière section du chemin, entre Nogaro et Saint-Jean-Pied-de-Port, les villages, les lieux habités sont beaucoup plus rares. Les hébergements, les commerces et les points d’eau aussi.

Il faut donc faire de plus longues étapes. De 22 à 25 voire 27 kilomètres par jour. Beaucoup plus que la moyenne à laquelle je m’étais confortablement habitué – de 18 à 21 kilomètres environ par étape.

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Étape 16, le dimanche 24 juillet, 25 kms entre Bellevue et Ostabat, dans les Pyrénées-Atlantiques

Second défi, il y a eu à la mi-juillet, dans le sud-ouest de la France, un long épisode de canicule. Alors que je débutais le deuxième tronçon de ma randonnée à Nogaro (Gers), le thermomètre est monté, en quelques jours, à 37, 38 puis 39 degrés.

Pour éviter la grande chaleur, comme la plupart des pèlerins, je quittais mon logement au lever du jour, autour de 6 heures. 

17jul1rue Carnot Aire
6h30 du matin, rue Carnot, au coeur de la petite ville d’Aire-sur-l’Adour, dans les Landes. J’ai quitté mon hébergement 30 minutes plus tôt et j’ai posé mon sac devant l’une des seules boulangeries ouvertes si tôt ce matin-là. A l’intérieur, « les petites mains », essentielles au chemin, préparent mon ravitaillement (sandwiches, salade) pour la journée.

Le samedi 16 juillet, il a fait plus de 40 degrés sur le chemin lors d’une de mes plus longues étapes (25 kms) entre Nogaro et Barcelonne-du-Gers. 

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En pleine canicule entre Nogaro et Barcelonne-du-Gers, le samedi 16 juillet. Cette étape a sans doute été l’une des plus difficiles en trois saisons sur le GR65. Une étape homérique.

Seul sur le GR65 ce jour-là, et cheminant le plus vite possible sous un soleil de plomb, j’ai commencé à regarder de façon beaucoup moins sympathique les immenses champs de maïs, puis les champs de fleurs de tournesol – interminables – par lesquels passe le chemin dans cette partie du Gers. J’avais parfois l’impression de marcher dans un four.

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Un groupe de randonneurs longe en plein soleil, le samedi 16 juillet, un champ de fleurs de tournesol

Tous mes respects aux agriculteurs qui doivent, l’été, assurer la gestion et l’irrigation de ces vastes champs. 

J’ai dû boire en six heures de marche plus de 4 litres d’eau.

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Alleluia! Alleluia! Il me reste quand même vingt bonnes minutes de marche avant le village…

Heureusement, en arrivant à destination, à Barcelonne-du-Gers, la maîtresse de maison, à La Bastide du Cosset, a eu l’immense gentillesse de m’ouvrir la porte de ma chambre d’hôtes. il était midi 30. Merci, Florence! J’étais littéralement trempé de sueur.

Après ma douche, je me suis aperçu que mon tee-shirt (bleu), sur le plancher, avait changé de couleur. Il était devenu presque blanc. La sueur, séchée, y avait laissé de grandes traces blanches. 

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Le petit jardin de la Bastide du Cosset, une ancienne maison de Maître, entièrement restaurée. Une excellente adresse à Barcelonne-du-Gers.

Seconde étape caniculaire le lendemain, dimanche 17 juillet, jusqu’au village de Miramont-Sensacq, dans les Landes – où une bonne surprise m’attendait!

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Après 5 heures de marche, quel plaisir d’arriver à La Maison du Bos, une bâtisse du 18è siècle, rénovée elle aussi, à Miramont-Sensacq. Calme et confort assurés pour les randonneurs.

Autour de la table ce soir-là, un couple hollandais, ex-pèlerins, accompagnés de leur fille. Le couple vient de publier un ouvrage illustré qui retrace leur aventure et leurs rencontres sur le chemin de Compostelle, en France et en Espagne, quinze ans plus tôt. Le livre contient de merveilleuses photos. 

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Salade de tomates du jardin à la Maison du Bos, à Miramont-Sensacq

Pour célébrer la publication de leur ouvrage, ce couple, charmant, a décidé de revisiter, en famille et en voiture cette fois, quelques-uns des lieux marquants de leur pèlerinage. Un projet qui a été, pour eux, déterminant. Ils s’étaient arrêtés, jadis, à La Maison du Bos. 

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Souper à la Maison du Bos. Ce que la photo ne montre pas, c’est mon état avancé d’épuisement. Après une autre étape de 20+ kms et malgré une sieste, je tiens à peine debout. Départ, le lendemain, à 6h, pour Arzacq-Arraziguet.

Heureusement, la canicule, peu à peu, s’est atténuée les jours suivants.

Et j’ai pu poursuivre plus sereinement mon chemin dans le Béarn puis au Pays basque.

J’ai rencontré en route une pléiade d’individus, attachants, étonnants.

Comme ces trois pèlerins croisés le 19 juillet dans le Béarn entre Arzacq-Arraziguet et Pomps.

19jul4 - Theo, Florian et Louis
Théo, Florian et Louis cheminent ensemble, souriants, décontractés, sur le GR65. Ils vont jusqu’à Santiago, en Espagne. Florian (au milieu) me parle du Vietnam, où il est allé en 2014. Il a loué à Saïgon avec un ami, une moto. Et les deux compères ont traversé le pays jusqu’à Hanoï puis Sapa. Très impressionné par la maturité de ces trois jeunes gens. Bonne route, messieurs!

Autre rencontre le lendemain, avec une dame d’un certain âge, très digne, la mère du propriétaire de ma chambre d’hôtes, à Maslacq, dans le Béarn. Nous conversons sur la galerie.

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Chambre d’hôtes La Ferme du Bicatou, à Maslacq, le mercredi 20 juillet.

Madame G. m’explique, dans une langue admirable, qu’elle regrette la disparition du Béarnais, une variante du Gascon, qu’on parlait autrefois à Maslacq. Le Béarnais a presque disparu aujourd’hui. On l’entend encore parfois, parlé par les anciens, sur les marchés et sur les places des villages. On l’enseigne  à l’école, mais la langue meurt peu à peu.

Le Béarnais était pourtant, jusqu’à la Révolution, la langue administrative et juridique de l’état du Béarn.

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En quittant Maslacq le jeudi 21 juillet

Deux jours plus tard, après avoir quitté Navarrenx, en route pour Bellevue, au Pays basque, je rencontre sur le chemin, près du bourg de Lichos, Josiane. Longue et amicale conversation.

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Josiane, près de son domicile, sur le GR65, dans la commune de Lichos, au Pays basque, le samedi 23 juillet.

Josiane en a gros sur le coeur ce jour-là. Et veut le faire savoir. Le problème? Elle est retraitée, sans véhicule et dépend entièrement de ses enfants pour ses déplacements – ses rendez-vous, aller faire des emplettes ou voir des amis. Le village le plus proche, avec des commerces, Mauléon-Licharre, est à 10 kilomètres. Pau, la préfecture, est à plus de 50 kilomètres. Comment faire?

La commune de Lichos, me dit-elle, a récemment mis en place un service de navette, presque gratuit, pour les anciens. Mais les communications avec le chauffeur se font uniquement par SMS… et Josiane a du mal avec les SMS…

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Point d’eau près de Navarrenx

Mes trois dernières étapes entre Navarrenx et Bellevue (18 kms), Bellevue et Ostabat (25 kms) et Ostabat et Saint-Jean-Pied-de-Port (25 kms) sont parmi les plus belles!

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Sur le GR65 entre le Béarn et le Pays basque
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En arrivant à Bellevue, à proximité de la ferme Bohoteguia, le samedi 23 juillet
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La fenêtre de ma chambre d’hôtes à Bellevue, grande ouverte (au milieu) au deuxième étage, donne sur le paysage de rêve, ci-dessous. Il n’y a, ce jour-là, aucun autre client dans la maison. Bonheur absolu.
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Les randonneurs ont choisi ce soir-là de dormir un peu plus bas sur le GR65, à la ferme Bohoteguia, quelques centaines de mètres plus loin. 
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6h30 du matin, au départ de l’avant-dernière étape, la 16è: Bellevue-Ostabat, le dimanche 24 juillet.

Et les pèlerins?

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En route pour Ostabat, le dimanche 24 juillet

La plupart des riverains ou des automobilistes qui croisent les randonneurs sur le GR65 sont loin d’imaginer à quoi ressemble la réalité quotidienne des pèlerins.

En un mot comme en mille, on ne chôme pas sur le chemin.

Il faut le matin planifier soigneusement son itinéraire et son ravitaillement. Se munir de pain, de fromage ou acheter à la boulangerie (s’il y en a) de quoi s’alimenter. Il faut repérer à l’avance, sur les cartes, les points d’eau. Ou être condamné à porter dans son sac 2 ou 3 litres supplémentaires.

(Astuce: en général, les cimetières sont des sources sûres d’approvisionnement en eau potable. Pousser la barrière du cimetière, chercher le robinet qui sert à remplir les vases et à arroser les fleurs sur les tombes. Remplir sa gourde).

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Delphine et Josée, pèlerines, croisées régulièrement sur le GR65 depuis Barcelonne-du-Gers. Delphine (à gauche) vit en Haute-Savoie. Josée, elle, habite Montréal.

Il faut aussi, impérativement, prendre chaque soir bien soin de ses pieds. C’est la grande affaire! Chacun a sa méthode, ses pommades, ses conseils.

Il faut laver et faire sécher son linge. Trouver le temps de communiquer avec la famille, les amis.

Il faut se préparer mentalement et physiquement à affronter le lendemain le soleil, le vent, la pluie, la fatigue, les difficultés du chemin. Le GR65 monte régulièrement à l’approche des Pyrénées, l’effort est constant. Être pèlerin n’est pas de tout repos.

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Montée de la crête vers la chapelle de Soyartz, avant l’arrivée à Ostabat, le dimanche 24 juillet

Pour ceux qui portent leur grand sac, il faut enfin chaque matin, avant de reprendre la route, refaire et vérifier son bagage. Ce n’est pas toujours facile ou évident à 5h30 ou 6h le matin!

Une pèlerine a éclaté en sanglots devant moi cet été, en disant: « Je viens de prendre ma retraite pour ne plus avoir de routine. Et voilà que sur le chemin je dois tous les matins suivre la même routine pour préparer et vérifier mon sac! J’ai failli abandonner. »     

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Après six heures de marche le dimanche 24 juillet, enfin!, à l’horizon, le village d’Ostabat, au Pays basque. C’est juste avant Ostabat que se rejoignent trois des grandes voies jacquaires qui mènent vers Compostelle: la voie du Puy, la voie de Vezelay et la voie de Tours.
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Axoa de veau servi à Ostabat, le dimanche 24 juillet

Mais il y a aussi tant de côtés positifs dans la vie de pèlerin!

La solidarité, le partage et le respect entre les randonneurs.

Le sentiment très fort de parcourir, côte à côte, des chemins splendides.

De franchir, ensemble, avec succès, des étapes difficiles.

Le sentiment aussi, parfois, sur le chemin, surtout vers la fin, à l’approche des Pyrénées, d’être invincible!

Car parcourir plusieurs jours de suite, sans gros pépins, des étapes de 25-27 kilomètres, cela donne beaucoup d’assurance!

D’un autre côté – essentiel pour moi – la marche tonifie et aide aussi à clarifier, à mettre en perspective tellement de choses!

A l’heure de Twitter, de TikTok et des bulletins continus d’informations, quel repos pour l’esprit de pouvoir marcher en silence, en paix, chaque jour, pendant des semaines, en pleine nature.

Et être assuré, à la fin de la journée, d’avoir un toit, un lit, un bon souper, des compagnons de route, souvent. C’est un privilège inouï. 

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Inscription (avec faute d’orthographe) sur le GR65 entre Barcelonne-du-Gers et Miramont-Sensacq (Landes), le dimanche 17 juillet.

Deux rapides observations – et une anecdote – avant de conclure.

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Benat, ci-dessus, propriétaire depuis plus de 20 ans de la ferme Gainekoetxea, à Ostabat, met un point d’honneur tous les matins à entonner, fièrement, devant les pèlerins, au petit-déjeuner, de magnifiques chants basques!…
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… pendant que son épouse, Lucie, supervise la restauration et la logistique des hébergements. Ce n’est pas toujours facile de gérer un gîte ou une maison d’hôtes sur le GR65, surtout en temps de canicule et de pandémie. Le petit-déjeuner, par exemple, doit être préparé et servi à 6h, parfois plus tôt. Merci infiniment pour cette belle halte chez vous, Benat et Lucie!

Observation 1. – Il y a, malheureusement, sur le chemin, très peu de diversité parmi les randonneurs. En trois saisons, je n’ai aperçu que quelques Asiatiques (Vietnamiens, Coréens pour la plupart) et un seul autre Noir sur le GR65. 

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Lors de ma dernière étape entre Ostabat et Saint-Jean-Pied-de-Port, le lundi 25 juillet

Observation 2. – Au fur et à mesure qu’on se rapproche des Pyrénées, la proportion et la fréquence du « goudron » sur le GR65 augmente. Ce n’est plus un chemin mais une véritable route qui emmène les marcheurs vers la montagne. Même si les véhicules sur ces petites routes restent rares, c’est dommage! Pourquoi ne pas convertir certains de ces tronçons en sentiers de marche?

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Entre Maslacq et Navarrenx, le jeudi 21 juillet

Une dernière anecdote.

Au terme de mon avant-dernière étape entre Bellevue et Ostabat, j’arrive vers 13 heures à la ferme Gainekoetxea, mentionnée plus haut. Il est encore tôt. Les propriétaires sont absents et ma chambre n’est pas encore disponible. Il faut patienter.

Sur l’une des terrasses de la propriété, je rencontre Monica, une redoutable randonneuse suisse qui franchit quotidiennement des étapes de 30 à 35 kms. Monica est arrivée il y a plus d’une heure déjà. Elle est fraîche comme une rose. Pas une goutte de sueur. Je n’en reviens pas. Que mange-t-elle donc le matin? 

Une trentaine de minutes plus tard, arrive un troisième pèlerin, Russell. Il est rouge comme une pivoine, transpire abondamment et souffle comme une cheminée. Je me sens mieux. Enfin, un semblable.

Après avoir repris haleine, Russell nous apprend qu’il habite, avec son épouse, en Oregon. Nous parlons tous les trois, calmement, de voyages. Russell mentionne qu’il a habité, enfant, en Afrique, à Lagos, au Nigéria. Moi aussi!! Je dresse l’oreille et je l’écoute.

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Russell, sur la terrasse de la ferme Gainekoetxea, à Ostabat, au Pays basque, le 24 juillet.

J’apprends avec stupéfaction que le père de Russell travaillait pour la CIA, à l’ambassade américaine de Lagos, entre 1958 et 1961. Avant et après l’indépendance du pays. Neuf ans avant l’arrivée de notre famille à Lagos. Mais nous voilà lancés dans une conversation animée où Russell mentionne des lieux qui font partie du folklore et de l’histoire intime de notre famille. Le club Ikoyi, les quartiers Apapa, Ikeja, Victoria island. L’hôtel Federal Palace à partir duquel le « Banana Boat » emmenait les baigneurs le dimanche sur la plage de Tarkwa Bay, au large de Lagos. Incroyable!

Russell a connu et vécu tout cela, lui aussi, neuf ou dix ans avant nous. Nous habitions à Ikoyi. Son père, lui, pour des raisons de logistique, habitait Ikeja, près de l’aéroport. Et il y avait déjà, me dit Russell, dans ce quartier, des embouteillages monstres…   

Qui aurait pu prévoir que nous nous rencontrerions un jour, à Ostabat, au pied des Pyrénées? Ce type de rencontre résume assez bien l’esprit d’un chemin où il se passe, quotidiennement, bien des choses. « Radio Compostelle » émet 24 heures sur 24.

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Dernière étape, Ostabat-Saint-Jean-Pied-de-Port, le lundi 25 juillet…
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Près du village de Gamarthe, quelques kilomètres avant Saint-Jean-le-Vieux.
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Le clocher de l’église de Saint-Jean-le-Vieux pointe à l’horizon, le lundi 25 juillet. On aperçoit au loin les Pyrénées. Plus que sept ou huit kilomètres avant de rejoindre Donibane Garazi, Saint-Jean-Pied-de-Port. Mon périple, commencé il y a plus de quatre ans au Puy-en-Velay, est presque terminé!
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Mon carnet de pèlerin, dûment estampillé au fil de mes trois saisons passées à randonner sur le GR65
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Chaque sceau, daté, représente une étape et certifie ma halte pour la nuit dans un des hébergements situés sur le chemin de Compostelle en France, entre Le-Puy-en-Velay et Saint-Jean-Pied-de-Port.

Quel été fantastique!

Avec Diana: Montréal – Paris – le Pays basque – Cahors – Toulouse – puis le GR65, pour moi.

Malgré tous ces déplacements, Diana et moi, avons, pour l’instant, échappé à ce satané virus. Nous sommes tous les deux en excellente santé.

Et nous tenons à remercier ici tous ceux et celles croisés sur la route depuis notre départ de Vancouver, le 20 avril. En particulier:

Mon frère Alix venu nous rejoindre au Pays basque.

Aline, Paulo, Monsieur et Madame L., Monsieur A., à Saint-Jean-Pied-de-Port. Merci infiniment!

Christiane pour son amitié et les bons moments passés à Cahors.

Merci aux randonneurs rencontrés sur le GR65 cet été – Sylvie (Lyon), Sylviane (Loire), Sandrine (Gers & Cuba), Isabelle (Toulouse), Delphine et Josée, Gilles, Didier et Véronique, de la région de Nice! Bonne rentrée à tous les trois!

Et merci, surtout, à Diana

20 août 2022 Memorial Park vancouver 3
Après trois mois et demi de voyage, cela fait du bien d’être de retour à la maison! Ci-dessus, au milieu d’un pique-nique, au Memorial Park (41st Avenue & Fraser) dans l’est de Vancouver, le samedi 20 août, et…
29 août 2022
… avec mon ami Brian lors d’une randonnée en vélo le long de la rivière Fraser, en territoire Musqueam, au sud de Vancouver, le lundi 29 août.

Bonne fin d’été à tous!

En marche (325 kms) vers les Pyrénées

Que de chemin parcouru depuis notre départ du Pays basque le 20 juin!

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La carte des nouvelles appellations des provinces françaises, actées en 2016. En Occitanie, encerclé en bleu, le département du Lot dont Cahors est le chef-lieu. Après notre séjour au Pays basque, nous nous sommes installés à Cahors pendant dix jours.
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Tous les mercredis et samedis se tient à Cahors, devant la cathédrale Saint-Etienne, un grand marché
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marché qui, parfois, réserve bien des surprises
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comme la rencontre étonnante, conviviale, complètement inattendue, le mercredi 22 juin, avec…
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Robinson, maraîcher lotois, né à Aquin, dans le sud d’Haïti! Après avoir longtemps vécu en Guyane française, Robinson est, depuis quinze ans, installé dans le Lot où il gère son entreprise agricole. Il est présent le mercredi et le samedi sur le marché de Cahors! Quelle bonne surprise! Bravo, Robinson!

Malgré quelques soucis liés à notre logement dans la ville médiévale, nous avons eu le grand bonheur de revoir, lors de notre séjour à Cahors, notre amie Christiane!

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En compagnie de Christiane, le vendredi 24 juin, au bord du Lot, devant le pont fortifié Valentré qui enjambe la rivière. Bienvenue à Cahors, Christiane!

Entre deux randonnées, la découverte des jardins, des trésors de la ville et nos longues conversations, retrouvailles chaleureuses avec Christiane, que j’ai eu la chance de rencontrer pour la première fois à Kigali, en 2012, lors de notre mission commune de coopération au Rwanda. 

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Christiane et Diana en grande conversation pendant l’escalade, le samedi 25 juin
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du magnifique Mont Saint-Cyr situé au-dessus de Cahors
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Une partie de la ville médiévale de Cahors nichée dans une des boucles du Lot. Au premier plan, le pont Louis-Philippe. Un peu plus loin, le pont ferroviaire de la SNCF.

Merci d’être venue nous rendre visite, Christiane! A bientôt!

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8 heures du matin, moment de calme pour Diana, place St-James, dans la vieille ville de Cahors, avant une nouvelle journée d’aventures … et de découvertes culinaires en Occitanie.
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Salade de chevrier (fromage au lait de chèvre, chaud) suivie d’une
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… aiguillette de poulet accompagnée de légumes du marché, restaurant Le Bergougnoux, Cahors.
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Sur un mur de la vieille ville de Cahors, le 27 juin 2022

Comme je le mentionnais un peu plus haut, notre séjour vers et à Cahors n’a pas été de tout repos.

Le 20 juin, notre train entre Saint-Jean-Pied-de-Port et Bayonne a été annulé sans aucun préavis, à la dernière minute, pour cause de grève à la SNCF.

Nous avons heureusement pu rejoindre Bayonne grâce à la gentillesse du propriétaire de notre logement qui nous a emmené à Bayonne dans sa voiture. Plus de deux heures de route aller-retour. Merci infiniment, Monsieur A! 

A Cahors, moins de deux jours avant notre départ, alors que nous préparions nos valises, Diana reçoit un message de sa compagnie aérienne (Lufthansa/Air Canada) lui annonçant l’annulation pure et simple de son vol de retour Toulouse-Vancouver, prévu le 1er juillet.  

Nous essayons en ligne de trouver un nouveau vol. En vain. Nous sommes probablement des milliers dans le même cas. Les médias français et canadiens annoncent une pagaille générale dans les aéroports dès le lendemain, le 30 juin. 

Nous avions par chance, depuis longtemps, planifié passer notre dernière nuit dans le sud-ouest dans l’unique hôtel de l’aéroport de Toulouse – vu le vol matinal de Diana pour Vancouver.

Dès notre arrivée à l’aéoport, le 30 juin, dans l’après-midi, nous nous précipitons au comptoir de Lufthansa. Miracle! En vingt minutes, trois agentes se sont relayées devant leurs écrans et téléphones portables et ont offert une nouvelle réservation à Diana, pour le lendemain matin!

Nous avons, pendant tout notre voyage, été entourés d’anges gardiens!

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Nos trois fées à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, le jeudi 30 juin, devant le comptoir de Lufthansa. Merci Lolona, Caroline (chef d’escale de Lufthansa à Toulouse) et Samira! – Photo: Diana.

Après avoir, le 1er juillet, à l’aéroport de Toulouse, dit au revoir à Diana, j’ai pris la navette vers le centre-ville et j’ai sauté dans un train, à la gare de Toulouse-Matabiau. Heureusement, aucune grève ce jour-là.

Destination: Le-Puy-en-Velay, en Haute-Loire, où je suis arrivé, en début de soirée, après sept heures de voyage, via Nîmes et un magnifique trajet en TER dans les Cévennes entre Alès (Gard) et Langogne (Lozère). Je devrai absolument repasser dans cette région.

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Point de départ historique du chemin, Le-Puy-en-Velay est aujourd’hui reconnue comme la capitale européenne du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.
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Un autre samedi, un autre marché. Ci-dessus, la rue Chaussade, près de la place du Martouret, le samedi 2 juillet
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Ci-dessus et dessous, la rue Saint-Pierre, dans la vieille ville du
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du Puy-en-Velay, chef-lieu du département de la Haute-Loire.

C’est ici, au printemps 2018, qu’a débuté mon aventure sur le chemin de Compostelle.   

Je me souviens de ma première étape: Le-Puy-en-Velay – Montbonnet, 15 kms.

J’avais ce printemps-là parcouru 207 kms jusqu’à Conques. 

Le printemps suivant, en 2019, j’avais cheminé 219 kilomètres entre Cahors et Nogaro, une petite ville située dans le département du Gers. 

Mon objectif cette fois-ci est de compléter les deux tronçons du GR65 que je n’ai pas encore parcourus entre Le Puy en Velay et Saint-Jean-Pied-de-Port –  soit 325 kms, selon le schéma suivant

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Mon trajet cet été le long du GR65. Tronçon = De Conques à Cahors. Tronçon = De Nogaro à Saint-Jean-Pied-de-Port.

Tronçon 1 – Entre Conques (Aveyron) et Cahors (Lot) = 136 kms. 8 étapes. Moyenne, 17.1 kms par étape.

Tronçon 2 – Entre Nogaro (Gers) et Saint-Jean-Pied-de-Port (Pyrénées-Atlantiques) =189 kms. 9 étapes. 20.8 kms par étape.

Total: tronçon 1. + tronçon 2. = 325 kilomètres

29 juin 2022
Un couple de randonneurs rencontré sur le GR65 la veille de notre départ de Cahors, le 29 juin. Leur objectif: atteindre Nogaro, dans le Gers. C’est exactement l’itinéraire que j’ai emprunté au printemps 2019. C’est plutôt bon signe d’avoir échangé avec eux ce jour-là.

Je reprends la route mardi, le 5 juillet.

Cela fait plus de trois ans que j’attends ce moment!

Mais, comment aller du Puy-en-Velay jusqu’à Conques? Rien de plus simple. Il faut simplement réserver sa place à bord du bus de Compostelle qui, d’avril à octobre, transporte tous les jours les pèlerins sur le chemin entre Le-Puy-en-Velay et Saint-Jean-Pied-de-Port. Informations supplémentaires ici ou ici.  

Mon sac sera de nouveau acheminé tous les matins via la Malle postale (tronçon Conques-Cahors) et par Transport Claudine (tronçon Nogaro-SJPP) et sera déposé avant 17h à mon hébergement. Excellent service, ponctuel, fiable. (SVP cliquer sur les liens en caractères gras pour obtenir des détails supplémentaires).

Pour les hébergements, tout au long du trajet, j’ai encore privilégié les chambres d’hôtes. Plus confortables et pratiques. Tous les soirs, le randonneur dispose d’une chambre individuelle, dans une maison ou une petite auberge tenue par les gens du pays. La formule comprend aussi le souper, préparé en général avec des produits frais de la région et le petit-déjeuner. Les repas sont pris autour d’une table commune mais restreinte.

Une exception à la règle, je passerai la nuit du 4 juillet à l’abbaye Sainte-Foy de Conques. 

Il faudra être prudent cet été sur le chemin. La pandémie repart en France. Le nombre de cas est partout en hausse. Quelle bonne idée nous avons eue d’accepter à Montréal, fin avril, notre 2è rappel/4è dose de vaccin contre le Covid. Si je suis éligible à une 5è dose en France avant mon départ, prévu le 8 août, je n’hésiterai pas une seconde.   

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Souvenir de mon arrivée à Conques, en mai 2018. Le temps avait été particulièrement maussade sur le GR65 cette journée-là. Heureusement, cette année, la météo prévoit pour les prochains jours, entre Conques et Cahors, du temps chaud et ensoleillé.

Plusieurs d’entre vous m’ont demandé le détail de mes étapes sur ces deux tronçons du GR65 cet été.

Les voici.

Tronçon 1. – Conques – Cahors (136 kms)

1. – Mardi 5 juillet = Conques – Decazeville (19 kms) – (Département de l’Aveyron)

2. – Mercredi 6 juillet = Decazeville – Montredon (11 kms) – (Département du Lot)

3. – Jeudi 7 juillet = Montredon – Figeac  (19 kms)

4. – Vendredi 8 juillet = Figeac – Le Puy-Clavel (19 kms)

5. – Samedi 9 juillet = Le Puy-Clavel – Mas de Games/Limogne-en-Quercy (26 kms)

6. – Dimanche 10 juillet = Mas de Games/Limogne-en-Quercy – Varaire (12 kms)  

7. – Lundi 11 juillet = Varaire – Le Pech/Laburgade (19 kms)                                           

8. – Mardi 12 juillet = Le Pech/Laburgade – Cahors (12 kms)

Mercredi 13 juillet = jour de repos à Cahors

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Devant le Pont Valentré à Cahors, le lendemain de notre arrivée, le mardi 21 juin

Tronçon 2. – Nogaro – Saint-Jean-Pied-de-Port (189 kms)

Jeudi 14 juillet (Fête Nationale) = Cahors – Toulouse – Nogaro (SNCF)

Vendredi 15 juillet = Jour de repos à Nogaro

9.Samedi 16 juillet = Nogaro – Barcelonne-du-Gers (25 kms) – (Département du Gers)

10. – Dimanche 17 juillet = Barcelonne-du-Gers – Miramont-Sensacq (20 kms) – (Dept des Landes)

 11. – Lundi 18 juillet = Miramont-Sensacq – Arzacq-Arraziguet (16 kms) (Dept. Des Pyrénées-Atlantiques)

12. – Mardi 19 juillet = Arzacq-Arraziguet – Pomps (21 kms)

13. – Mercredi 20 juillet = Pomps – Maslacq (19 kms)

14.Jeudi 21 juillet = Maslacq – Navarrenx (22kms)

Vendredi 22 juillet = Jour de repos à Navarrenx

15. – Samedi 23 juillet = Navarrenx – Bellevue (18 kms)

16. – Dimanche 24 juillet = Bellevue – Ostabat (24 kms)

17. – Lundi 25 juillet = Ostabat – Saint-Jean-Pied-de-Port (23 kms)  

Avant de repartir sur le chemin, mardi, une autre belle surprise m’attendait au Puy-en-Velay!

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Choucroute à la truite et au saumon fumé. Sans doute le meilleur plat savouré jusqu’à présent pendant mon séjour en France. Cette cuisine divine est l’oeuvre de…
michel
Michel, le propriétaire et maitre cuisinier, depuis 40 ans, de l’Hôtel Restaurant « Le Bilboquet », au Puy-en-Velay. Bravo et merci mille fois, Monsieur, pour votre merveilleuse cuisine!

C’est un immense privilège de pouvoir réaliser en France cet été cette belle et grande randonnée!

 Merci pour vos messages de soutien!

Je vous laisse avec ce mot de Mark Twain que vous connaissez sans doute déjà.

« Sail away from

the safe harbour.

Catch the trade winds

in your sails. Explore.

Dream. Discover. »

Bon été à tous!

 

Retour sur le Chemin de Compostelle

Je poursuis ce printemps, comme prévu, ma route sur le Chemin de Compostelle.

Après les belles randonnées réalisées en décembre au Népal, dans l’Annapurna, puis dans la vallée de Katmandou, j’ai hâte d’enfiler de nouveau mes chaussures de marche, hâte de reprendre mon chapeau, mon baluchon – mon « barda » comme on disait autrefois…

Envie de retrouver le silence des chemins de campagne, l’odeur de la terre, des buissons. Le parfum des fleurs. De l’herbe mouillée.

Envie aussi de poursuivre la belle aventure vécue l’an dernier entre Le-Puy-en-Velay, en Haute-Loire et Conques, en Aveyron.

Carte postale du chemin parcouru le printemps dernier entre Le Puy-en-Velay et Conques. 207 kilomètres le long du (Chemin de Grande Randonnée) GR 65. Une expérience inoubliable!

Derniers kilomètres avant de quitter le plateau d’Aubrac et de plonger (ci-dessous) vers le village de Saint-Chély d’Aubrac, en Aveyron. Neuvième étape l’an dernier, le dimanche 6 mai.

Le GR 65 avant l’arrivée à Saint-Chély d’Aubrac

Mon objectif cette fois-ci est de relier Cahors (Lot) à Nogaro (Gers) – une distance de 221 kilomètres – en treize jours de marche et deux jours de repos.

Sur le chemin de Compostelle, encerclées en bleu, la ville de Cahors et la commune de Nogaro. Selon le mode du « saucissonnage » bien connu des pèlerins, j’effectuerai dans un an ou deux (avant ou après avoir rejoint les Pyrénées) le tronçon manquant du GR 65 entre Conques et Cahors.

Entre Saint-Chély d’Aubrac et Saint-Côme-d’Olt en Aveyron, le lundi 7 mai 2018

En planifiant ce projet, l’an dernier, j’étais loin de me douter que cette longue randonnée vers les Pyrénées allait tant m’apporter!

Quelques unes des étapes du chemin de Compostelle entre Cahors et Nogaro. Aquarelle de Marie-Noëlle Lapouge – http://www.atelier-de-marienoelle.com

Jour de marché (et musiciens ci-dessous) le samedi 19 mai 2018 dans la vieille ville de Figeac (Lot) où je me suis arrêté presqu’une semaine après avoir rejoint Conques l’an dernier. Immense plaisir d’écouter et de savourer la langue des riverains dans les villages que traverse le GR 65…

Ruelle dans mon quartier, à Figeac, sur les hauteurs de la ville médiévale, mai 2018.

Avec le recul et les mois de réflexion qui ont suivi mon expérience de marche l’an dernier, un sentiment nouveau, puissant, au fil des jours, a peu à peu émergé… une évidence, une conviction qu’on peut sans doute résumer ainsi…

Quelle meilleure façon d’exprimer aujourd’hui sa liberté que partir le matin, sac au dos, sur un sentier de campagne, s’arrêter à sa guise dans un village ou dans un café afin de converser avec les riverains, et repartir ensuite, à son rythme – assuré de trouver le soir, au bout du chemin, un toit, un lit confortable, des compagnons de route venus du monde entier… et des hôtes accueillants, heureux de partager un repas avec marcheurs et pèlerins?

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Souper le 30 avril 2018 dans l’unique café du petit village de Chanaleilles, en Haute-Loire…

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… et retrouvailles le lendemain soir, après une étape épique de 19 kms parcourue en partie dans la neige, dans une auberge de St-Alban-sur-Limagnole, en Lozère…

En plus de l’exercice quotidien, cette randonnée le long du GR 65 a, pour de nombreux marcheurs, même s’ils s’en défendent parfois, une forte dimension spirituelle, comme en témoignent ces quelques mots, publiés récemment dans une revue consacrée au chemin de Compostelle…

« La marche, telle un défi à la vitesse et au bruit, incite à la modestie, pousse à la curiosité, suscite la méditation. Elle invite au repli, à l’intimité, à se taire pour mieux écouter… »

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Dans une église de l’Aubrac, en mai 2018

À cette dimension spirituelle, vient aussi se greffer sur le chemin un riche volet culturel. Le tracé du GR 65 permet en effet aux randonneurs curieux de découvrir les légendes et l’histoire généralement peu connue de régions reculées du centre et du sud-ouest de la France…

Pays de la Haute-Loire et de la Lozère

J’ai pu ainsi parcourir en partie l’an dernier des régions sauvages, splendides, situées un peu hors du temps – la Margeride, le Gévaudan, l’Aubrac, la vallée du Lot, le Rouergue – territoires isolés où foisonnent encore une multitude de mythes et de récits, récits parfois terrifiants, comme celui de la « Bête du Gévaudan », un loup féroce qui au milieu du 18è siècle terrorisait et dévorait les villageois dans un secteur compris à présent dans le département de la Lozère…

La Bête du Gévaudan (illustration François de Sarre)

Aujourd’hui, hormis marcheurs et pèlerins, les visiteurs sont plutôt rares dans ces régions, ou alors ils ne font que passer, rapidement, au volant de leurs voitures, les yeux rivés sur leurs GPS… C’est dommage!

Quinzième et dernière étape l’an dernier entre Sénergues et Conques, en Aveyron, le dimanche 13 mai 2018.

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Fromages…

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… de l’Aveyron

J’ai bien hâte de découvrir ce printemps, entre Cahors et Nogaro, d’autres « pays » – le Quercy, la Gascogne, l’Armagnac… – « pays » situés dans trois départements – le Lot, le Tarn et Garonne et le Gers – connus pour leur gastronomie… et leurs vins!…

Vins et millésimes notés du sud-ouest

Menu affiché à l’entrée d’un restaurant dans le village d’Aumont-Aubrac, en Lozère

Je me souviens encore du déjeuner dégusté en mai l’an dernier dans le village de Nasbinals, en Lozère. D’un des plats du jour (voir photo ci-dessous) offerts ce midi-là, servi dans un décor simple et chaleureux. Un moment mémorable. Dès la première bouchée, le sentiment de goûter à une cuisine exceptionnelle. Si vous passez par Nasbinals, SVP arrêtez-vous.

Veau de l’Aubrac, accompagné de tomates farcies, d’une salade verte et d’une corbeille de pain frais. Restaurant « La Route d’Argent » à Nasbinals.

Fort de l’expérience acquise l’an dernier, j’ai décidé ce printemps, pour les hébergements, d’éviter au maximum les hôtels… Hôtels souvent vieillots, chers et anonymes selon moi sur le GR 65…  (Après avoir lu le plus récent roman de Michel Houellebecq, « Sérotonine », qui a encore envie d’aller à l’hôtel?)… J’ai choisi plutôt de séjourner chez les riverains, en chambres d’hôtes et en demi-pension (chambre, souper et petit-déjeuner) lorsque c’était possible…

Un seul hôtel réservé, faute d’autre option ce jour-là, dans le Tarn-et-Garonne, entre Cahors et Nogaro.

La carte de mon parcours ce printemps. À titre de comparaison, printemps 2018 = 207 kms entre Le Puy-en-Velay et Conques. 15 jours de marche, 2 jours de repos. Moyenne = 13.8 kms par étape –  Printemps 2019 = 219 kms. 13 jours de marche, 2 jours de repos. Moyenne = 16.8 kms par étape. Mon objectif l’an prochain? Rejoindre Saint-Jean-Pied-de-Port et les Pyrénées!

Voici donc, au jour le jour, mon itinéraire pour ce deuxième tronçon du chemin de Compostelle…

24 avril = Départ de Vancouver

25 – 29 avril = Paris

29 avril – 2 mai = Cahors (Lot)

2 mai = Cahors – Granéjouls – 14 kms.

3 mai = Granéjouls – Montcuq – 19 kms.

4 mai = Montcuq – Lauzerte (Tarn-et-Garonne) – 14 kms. 

5 mai = Lauzerte – Aube Nouvelle/Dufort-Lacapelette – 11 kms. 

6 mai = Aube Nouvelle – Moissac – 19 kms. 

7 mai = Moissac – Auvillar – 21 kms. 

8 mai = Jour de repos à Auvillar – (100 kilomètres parcourus)

9 mai = Auvillar – Miradoux (Gers) – 18 kms.

10 mai = Miradoux – Lectoure – 16 kms. 

11 mai = Lectoure – La Romieu – 18 kms.

12 mai = La Romieu – Larressingle – 19 kms.

13 mai = Larressingle – Montréal-du-Gers – 11 kms.

14 mai = Montréal-du-Gers – Éauze – 18 kms. 

15 mai = Jour de repos à Éauze – (200 kilomètres parcourus)

16 mai = Éauze – Nogaro – 21 kms. 

17 mai = Jour de repos à Nogaro – Fin Compostelle (2è saison) – 219 kilomètres parcourus.

18 mai = Nogaro – Pau (bus SNCF)

18 – 20 mai = Pau

20 – 23 mai = Paris

24 mai = Paris – Vancouver

Après deux mois d’hiver particulièrement rudes en Colombie-Britannique (le thermomètre, à Vancouver, n’a jamais atteint en janvier/février le seuil de dix degrés – un record), j’ai bien hâte de reprendre la route!

Bon début de printemps à tous!

Une forteresse royale, construite au 12è siècle, surplombe le village de Najac, en Aveyron… Najac où, après Conques et Figeac, je me suis arrêté plusieurs jours en mai l’an dernier…

… afin de poursuivre mes randonnées en Aveyron… (Ici, panorama sur le sentier qui va de Najac, à l’horizon, au village de Cassagnes)…

… et avant de rejoindre, en train (via Gaillac)…

… la très belle ville d’Albi, située sur les rives du Tarn… Albi, ville natale de l’explorateur Jean-François de La Pérousse (disparu en 1788 dans le Pacifique) et du peintre Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901).

Albi où trône, au-dessus de la vieille ville, l’imposante cathédrale Sainte-Cécile, construite à partir du 13è siècle… À très bientôt, le sud-ouest de la France!

La vallée de Katmandou

Je suis revenu dimanche à Patan, l’ancienne cité royale, magnifique, située à quelques kilomètres du centre-ville de Katmandou, après avoir passé, sans doute, les quatre plus belles journées de mon séjour au Népal!

Les plus surprenantes aussi!

Randonnée à 1800 mètres d’altitude, au-dessus de la vallée de Katmandou, entre le village de Balthali (à l’arrière-plan) et le monastère de Namo Buddha, le samedi 15 décembre. Nous sommes ici à environ 40 kms à l’est de Katmandou. Voir la carte ci-dessous.

Thuli, 89 ans, termine son déjeuner chez elle, dans le village de Phaskot, 400 habitants, situé entre Namo Buddha et Dhulikkhel. Le tilak (ou tika) mauve, le point coloré sur le front, indique que Thuli est veuve.

En planifiant ce voyage, je m’étais promis de faire dans la vallée de Katmandou une deuxième longue excursion après celle réalisée dans l’Annapurna…. (Voir l’article précédent)

Mission accomplie!

Cela a été une excellente idée d’explorer cette région où les touristes – à deux heures de la capitale – sont beaucoup plus rares que dans l’Annapurna!

Voici donc la carte puis le détail avec photos des quatre étapes de mon excursion dans le sud-est de la vallée de Katmandou.

La vallée de Katmandou. On peut aussi prolonger son excursion en explorant les sentiers et les villages situés au nord de la vallée…

Jour 1: taxi (2 heures environ) de Patan/Katmandou jusqu’au bourg de Panauti, puis montée, facile, à pied, en une heure 30 ou deux heures, jusqu’au village de Balthali, situé à 1500 mètres d’altitude

Jour 2: Balthali. On peut facilement prolonger son séjour ici.

Jour 3: 3 heures de randonnée entre Balthali et le village et le monastère de Namo Buddha (1750 mètres). Journée exceptionnelle!

Jour 4: 2h30 environ de marche entre Namo Buddha et la petite ville de Dhulikkhel. De Dhulikkhel, bus et/ou taxi pour le retour à Patan – où il est, selon moi, beaucoup plus agréable de loger qu’à Katmandou…

Près de Dhulikkhel, dans la vallée de Katmandou, le dimanche 16 décembre.

Mon message à ceux et celles qui songent peut-être à visiter le Népal sans faire de « trek » dans l’Everest ou dans l’Annapurna, est assez simple.

Cette boucle: Patan/Katmandou – Panauti – Balthali – Namo Buddha – Dhulikkhel – Patan/Katmandou est très facilement réalisable et une excellente alternative aux randonnées plus classiques et plus longues offertes ailleurs au pays.

Boucle que l’on peut raccourcir, ou prolonger à sa guise, en passant plusieurs jours à chaque endroit, avant de repartir, sans jamais prendre la route goudronnée, mais seulement les sentiers, magnifiques, qui relient depuis des siècles les villages paisibles de la vallée…

Aventure et dépaysement garantis!

Tous les hébergements situés dans la vallée peuvent recommander un guide, sûr et fiable, aux visiteurs. Ci-dessus, Shankar, qui me conduira sans encombres, le samedi 15 décembre, de Balthali à Namo Buddha. Une randonnée exceptionnelle! Né à Balthali, Shankar ne parle que deux ou trois mots d’anglais. Ci-dessous, le sentier, au départ de Balthali…

J’ai voulu partager et résumer ici les principaux points forts de cette randonnée au cœur du pays newari … randonnée fantastique et négligée, à tort, selon moi, par la plupart des visiteurs…

1. – La qualité des hébergements, très bonne en général, avec un personnel habitué, rompu à la clientèle étrangère…

Chemin qui mène à mon bungalow…

… surplombant le village de Balthali. Eau chaude et chaufferette dans la chambre car les nuits en décembre sont fraîches…

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Sur le balcon, vue magnifique sur la vallée de Katmandou

Thapa gère tout en douceur son établissement au-dessus de Balthali

Thali végétarien népalais servi avec des champignons, des épinards et des légumes récoltés dans le jardin de ma « guest house » à Balthali…

2. – Les vues, imprenables, pendant quatre jours, des sommets de l’Himalaya…

Les pics de l’Himalaya vus de Namo Buddha, le dimanche 16 décembre… Trois sommets, parmi d’autres: le Gauri Shankar (7415 mètres), le Phurbi Chyachu (6722 mètres), le Melungtse (7181 mètres). L’Everest, plus à l’est, n’est malheureusement pas visible…

… et sur le chemin qui descend vers Dhulikkhel…

… où plusieurs chantiers sont en cours…

Entre Namo Buddha et Dhulikkhel

3. – Les sentiers, moins hauts, bien sûr, que ceux empruntés dans l’Annapurna, mais tout aussi variés et impressionnants…

Un des ponts suspendus entre Balthali et Namo Buddha…

Une heure environ avant l’arrivée à Namo Buddha… Altitude 1700 mètres

Lourd fardeau porté par une femme près de Namo Buddha

Maison de village entre Namo Buddha et Dhulikkhel

En allant vers Dhulikkhel

4. – La nourriture, apprêtée avec soin à Balthali, et tout simplement exceptionnelle, dans mon hébergement, à Namo Buddha…

Salade d’avocats

Les repas au Namo Buddha Resort sont 100% bio et semblent être droit sortis d’une ferme écologique européenne ou canadienne. Tous les ingrédients, sauf le fromage de yack, proviennent du jardin de l’hôtel… qui fabrique aussi son pain… et même sa crème glacée.

Quiche aux légumes accompagnée de champignons du jardin, de betteraves et d’haricots verts

Il n’y a pas de menu. On sert chaque jour, au déjeuner et au dîner, trois plats composés des produits les plus frais du potager…

Tarte au citron et crème glacée faite maison

L’établissement est géré, avec le sourire, par la propriétaire, Ingrid, originaire d’Allemagne… Un lieu remarquable… qui met aussi en valeur, dans les chalets, l’artisanat traditionnel népalais…

Ingrid, devant un des chalets de Namo Buddha Resort, dimanche matin, le 16 décembre

Les pics de l’Himalaya surplombent les chalets et résidences de Namo Buddha Resort

5. – Les gens rencontrés sur le chemin qui voient ici beaucoup moins de visiteurs que sur les sentiers de l’Annapurna…

À l’extérieur de Balthali, le vendredi 14 décembre

Binod, 37 ans, père de trois enfants, et mon second guide, le dimanche 16 décembre, entre Namobuddha et Dhulikkhel… Binod qui m’a très gentiment offert une visite de son village, Phaskot, où j’ai pu rencontrer ses parents, son épouse, Indira, et sa fille aînée, Anju… Binod est un guide hors du commun. Sa maison, en rénovation dans le village, accueille régulièrement les randonneurs. Contact: binod_39@hotmail.com

Indira, enseignante au primaire

Anju, 19 ans, étudie l’anglais à Dhulikkhel

Drapeaux de prières bouddhistes déployés devant le monastère Thrangu Tashi Yangtse de Namo Buddha. La couleur des drapeaux a une signification précise. Bleu= l’espace. Blanc = l’air et le vent. Rouge = le feu. Vert = l’eau. Jaune = la terre. Les drapeaux sont suspendus, dans les montagnes, au passage des cols, près des monastères ou au croisement des chemins pour demander aide et protection…

J’ai rencontré également sur le chemin, le samedi – le seul jour de congé au Népal – de très nombreux pèlerins en route pour les temples et le monastère de Namo Buddha… pèlerins qui n’hésitent pas, au soleil, à poser pour les amis ou pour la famille…

Poses près du monastère bouddhiste…

… de Namo Buddha…

Le monastère de Namo Buddha accueille des centaines de pèlerins qui viennent des quatre coins du Népal, de l’Inde et du Tibet. Plus de 200 moines résident au monastère. Matthieu Ricard, le célèbre moine français effectue ici de fréquents et longs séjours.

Comme presque partout où je suis passé au Népal, j’ai aussi rencontré, sur le chemin, des groupes d’étudiants, souriants et accueillants…

Étudiants croisés au pont suspendu de Khopasi Bridge, près de Panauti, le jeudi 13 décembre

Cette randonnée dans la vallée de Katmandou a vraiment été une très belle surprise… Je ne m’attendais pas à côtoyer, à tutoyer presque, les pics de l’Himalaya, par temps clair, pendant quatre jours…

Mon guide Binod m’a en fait confirmé ce que plusieurs randonneurs au Népal ont pu vérifier récemment. À cause des changements climatiques, la meilleure saison pour marcher dans l’Annapurna ou dans la vallée de Katmandou est maintenant la période comprise (grosso modo) entre la fin octobre et la mi-décembre…

Pendant la période auparavant privilégiée par les randonneurs (fin septembre, début octobre), la météo est souvent mauvaise, et le ciel bouché… Ces informations relayées par Binod ne sont bien sûr que des tendances. Les caprices de la météo étant, par définition, imprévisibles.

Les rues de Patan, l’ancienne ville royale, située à 6 kms environ de Katmandou. Patan est, à mon avis, un endroit bien plus agréable où vivre que Katmandou…

… Patan où on reconstruit et rénove les temples endommagés par le tremblement de terre de 2015

Autre surprise. Le gérant de mon hôtel à Patan, Devinder, m’a gentiment demandé hier matin si j’acceptais de prendre le repas du soir avec sa femme et son fils dans leur domicile, une annexe de l’hôtel. J’ai été très ému et touché par son invitation. Et j’ai bien sûr accepté.

Nous avons donc dégusté, il y a quelques heures, dans le salon de la famille, de délicieux hors-d’oeuvres, arrosés d’un alcool fort, (« our local brew », a précisé Devinder) avant de passer dans la salle à manger et partager le traditionnel thali.

La photo ci-dessous n’est pas de très bonne qualité, mais je voulais l’inclure ici comme témoignage de l’hospitalité népalaise. La famille m’a aussi remis un cadeau.

Quelle aventure, et quelle belle façon d’achever mon voyage au Népal!

En compagnie de Devinder et son épouse dans leur salon, lundi soir, le 17 décembre. Départ le lendemain matin pour Chennai, dans le sud de l’Inde.

Je poursuis ce matin mon voyage.

Départ dans quelques heures ce mardi pour l’aéroport de Katmandou.

Je suis en route pour New Delhi (escale de 2 heures) et ensuite pour Chennai (l’ancienne Madras), dans l’état du Tamil Nadu, où je devrais arriver en toute fin d’après-midi.

Je ne passerai qu’un bref moment à Chennai (3-4 jours) avant de gagner, en train, Pondichéry où je m’arrêterai une douzaine de jours… Ce sera ma plus longue halte du voyage…

Après le Kerala, il y a deux ans, j’ai bien hâte de retrouver la chaleur et la culture du sud de l’Inde!

Joyeux Noël!

La presse népalaise… Plusieurs quotidiens (The Himalayan, The Kathmandu Post) sont publiés en anglais…

Cinq jours dans l’Annapurna

Le soleil se lève au-dessus de l’Annapurna et du village de Tadapani, au Népal. Sur la droite, deux sommets bien connus des alpinistes: le « Gangapurna » (7455 mètres) et « l’Annapurna 3″ (7555 mètres)

Le sommet du « Gangapurna », vu de Tadapani, le mercredi 5 décembre

Je suis de retour à Pokhara. Et je reviens de ma randonnée – de mon « trek » de cinq jours dans l’Annapurna – avec beaucoup d’humilité. Avec un respect renouvelé aussi pour tous les villageois rencontrés dans la montagne, villageois qui vivent entre 2000 et 3000 mètres d’altitude, dans des conditions souvent précaires, avec tant de grâce et de dignité.

nepal
Sur un sentier entre Tapadani et Ghandruk…

… le 5 décembre. SVP voir cartes ci-dessous

La zone de conservation de l’Annapurna, créée en 1986, est la plus grande aire protégée du Népal. La région n’a miraculeusement pas souffert du tremblement de terre de 2015

Mon projet s’est déroulé exactement comme je l’avais planifié. Mais la randonnée – quatre journées de marche et un long retour en bus vers Pokhara – a été difficile. Plus difficile que prévu.

Avec le recul, je m’aperçois que cela a été une excellente idée de m’entraîner, ce printemps, en France, le long du GR65.

Les deux expériences de marche sont bien sûr très différentes, mais avoir cheminé au mois de mai, chaque jour, 4 ou 5 heures, sur la route de Compostelle, m’a fait le plus grand bien. Cela a été une très bonne préparation, mentale et physique, à ce « trek » réalisé au Népal.

Située à environ 200 kms à l’ouest de Katmandou, Pokhara (encerclée en vert) est la deuxième ville du Népal et le point de départ de multiples randonnées vers le massif de l’Annapurna.

Ci-dessus, le tracé de ma randonnée de cinq jours et quatre nuits dans le massif de l’Annapurna. Depuis Pokhara, 90 minutes en taxi, en compagnie de mon porteur Yubraj, jusqu’à Nayapul, point de départ de la randonnée. Ensuite, jour 1: Nayapul – Ulleri. Jour 2: Ulleri – Ghorepani. Jour 3: Ghorepani – Tadapani. Jour 4: Tadapani – Ghandruk. Jour 5: Ghandruk et retour en bus vers Pokhara. D’autres marcheurs optent pour une randonnée plus longue (7-11 jours) jusqu’au camp de base de l’Annapurna (ABC).

La première et la troisième étape ont été particulièrement rudes. Un élévation d’environ 1000 mètres le premier jour entre Nayapul et le village de Ulleri, perché à 1960 mètres. Et, entre Ghorepani et Tadapani le sentier monte (jusqu’à 3200 mètres) et descend cruellement. Quatre heures 40 de marche ce jour-là, la plus longue étape, et sans doute aussi la plus belle… 

Une des rues principales du village de Nayapul, lieu de départ de mon trek

De Nayapul, le sentier emprunte d’abord un chemin poussiéreux qui monte lentement vers les montagnes…

Début de la randonnée, sous un temps couvert, quelques kilomètres après Nayapul

… le tracé devient ensuite beaucoup plus abrupt… Des centaines de marches sont taillées dans le roc du sentier…

Entre Tikhedhunga et Ulleri, le dimanche 2 décembre

… On grimpe, on grimpe ce premier jour, pendant plus de quatre heures… jusqu’au village de Ulleri… où m’attend une chambre simple et presque nue (voir Conseils pratiques à la fin de l’article)… Heureusement, il y a de l’eau chaude!…

Le pain « Gurung » accompagne, avec un oeuf dur et des pommes de terre, le petit-déjeuner traditionnel népalais.

Après une courte, inconfortable nuit (à cause du froid) et un petit-déjeuner sommaire, préparé dans une cuisine de fortune, je reprends la route, tôt le lendemain, accompagné de mon porteur, Yubraj…

Yubraj, 28 ans, a vaillamment porté mon sac pendant cinq jours. Yubraj vient de se marier à Pokhara. Il a deux grands frères. L’un travaille en Malaisie et l’autre est cuisinier, depuis cinq ans, à Règina, en Saskatchewan. Yubraj va tenter dans les prochains mois d’obtenir, à Pokhara, sa licence officielle de guide de haute montagne

En marchant, j’écoute attentivement les propos de mon jeune porteur. Il me parle, en anglais, de sa famille, de son enfance, de son pays. Et je me rends compte que les expériences de Yubraj résument assez bien les turbulences qu’a vécues le Népal depuis vingt ans….

Né dans le village de Dhital, situé à une heure de route de Pokhara, Yubraj me confie qu’il se souvient encore très bien, dès l’âge de huit ans, des rebelles maoïstes qui faisaient régulièrement, la nuit, irruption dans son village… 

Lourdement armés, farouchement opposés à la monarchie, les rebelles exigeaient d’être nourris, logés. Malheur à ceux qui refusaient de les aider. Ou à ceux dans le village qui contestaient leur idéologie, leur autorité. On retrouvait leurs corps, mutilés ou criblés de balles, plusieurs jours plus tard…

Dans une « tea house » à Ulleri, le lundi 3 décembre

Une fois les rebelles partis, l’armée népalaise arrivait à son tour dans le village, questionnant les résidents, leur demandant pourquoi les maoïstes avaient été accueillis et hébergés… Les responsables de l’armée, les soldats, proféraient des menaces… La situation, pour les habitants, devenait intenable.

Lorsqu’il a eu onze ans, la famille de Yubraj a quitté le village et est partie pour Pokhara. Sa scolarité a brusquement pris fin à ce moment-là.

Cette période noire a duré dix ans. Entre 1996 et 2006, entre 13 000 et 19 000 Népalais ont perdu la vie, tués par les rebelles ou par l’armée… Plus de 150 000 hommes, femmes et enfants ont dû, comme la famille de Yubraj, quitter leurs terres, leurs villages et se mettre à l’abri dans les grandes villes.

« Tea house » à Ghorepani, le mardi 4 décembre

La situation est bien différente aujourd’hui. Les maoïstes (comme les communistes) ont maintenant intégré le gouvernement. La monarchie a été abolie en 2008 et le Népal est désormais une république dirigée par une femme.

Le pays a largement retrouvé son calme, mais personne ici, à Pokhara ou dans l’Annapurna, n’a oublié les cicatrices et les traumatismes de la guerre civile. Cette période d’affrontements et de violence a profondément et durablement marqué le pays. 

Ghorepani, le mardi 4 décembre

Revenons sur le sentier où nous avons eu droit, les jours suivants, à une météo plutôt clémente, et au soleil, bien présent le matin…

Deuxième jour de marche, entre Ulleri et Ghorepani, le lundi 3 décembre

En montant vers Ghorepani

En chemin, nous croisons des marcheurs venus de la Belgique, de la France, de l’Allemagne, du Japon. Il y a des Britanniques, des Russes, quelques Canadiens mais, à ma grande surprise, la grande majorité des randonneurs sont des Népalais. De jeunes Népalais, inscrits à l’université souvent, qui parlent un anglais remarquable, et qui viennent, en groupe, joyeusement, découvrir la région…

« C’est un phénomène relativement récent », m’explique Yubraj qui parcourt les sentiers de l’Annapurna depuis cinq ou six ans… « Avec les réseaux sociaux, et le calme revenu au pays, les Népalais, les jeunes professionnels de Pokhara et Katmandou ont eux aussi envie de découvrir ces régions, et partager leurs aventures, leurs découvertes »…

Des jeunes Népalais profitent de la paix retrouvée pour visiter leur pays

En arrivant à Ghorepani, un panneau rappelle aux visiteurs les défis immenses auxquels sont confrontés l’ACAP (l’Agence de Protection de l’Annapurna) et les villages, dépourvus d’infrastructures, qui accueillent les randonneurs, douze mois par année maintenant. 

Plus de 100 000 touristes visitent la zone de l’Annapurna chaque année.

Comment peut-on, dans ces conditions, gérer et protéger adéquatement l’environnement fragile de la haute montagne?

Recycler les déchets, les bouteilles en plastique en particulier, est un case-tête considérable pour les villageois et les autorités…  

Un projet de construction de points d’eau filtrée et potable dans l’Annapurna est en cours afin de réduire le nombre de bouteilles en plastique que transportent les randonneurs…

Deuxième halte, le lundi 3 décembre, dans le village de Ghorepani. Altitude: 2750 mètres.

Dans les rues de Ghorepani, des dizaines d’ânes circulent du matin au soir après avoir monté, pour les randonneurs et les résidents, nourriture et équipement

Pat de légumes au curry, Ghorepani

Snow View Lodge, Ghorepani, mardi matin, le 4 décembre

Nous assistons au réveil à Ghorepani… et ensuite, sur la route vers Tadapani, à un spectacle grandiose… Il fait un temps splendide!

Les pics de l’Annapurna entre Ghorepani et Tadapani, le mardi 4 décembre

Le balisage sur le sentier est le même que celui du GR65…

Cuisinier dans une « tea house »

Petit-déjeuner avec Yubraj, mercredi matin, le 5 décembre, à Tadapani

… spectacle renouvelé le lendemain matin lorsque nous quittons Tadapani… pour Ghandruk…

Tadapani, mercredi matin, le 5 décembre. J’ai adoré les quelques heures passées dans le village, une des plus petites localités du circuit de l’Annapurna…

… en route, nous traversons une étonnante forêt de rhododendrons…

… avant de nous arrêter un instant, dans une petite buvette, juste avant Ghandruk…

Thé noir, servi avec le sourire, lors de notre dernière halte entre Tadapani et Ghandruk…

…Ghandruk… où nous arrivons en début d’après-midi… C’est ici que nous terminons notre randonnée…

Arrivée à Ghandruk. le mercredi 5 décembre

Coup de foudre en découvrant la ville, coupée en deux…

En haut, la ville « moderne » avec de beaux et anciens bâtiments, qui servaient autrefois d’entrepots, et qui ont été repeints, rénovés en gîtes ou en hôtels…

Bâtisses à Ghandruk

Portes sculptées à Ghandruk

… en bas… la vieille ville de Ghandruk… Un village magnifiquement préservé… et curieusement ignoré par la majorité des touristes et des randonneurs…

La vieille ville de Ghandruk, le mercredi 5 décembre

… Une vieille ville, propre, paisible, accueillante, avec son musée… vieille ville où les artisans perpétuent les traditions…

Confection de paniers en bambou dans un atelier de Ghandruk

Livraison inhabituelle…

Surprise en marchant dans les ruelles… Des enfants me font signe… Une fête se prépare à Ghandruk!… Je les suis vers le haut du village….

Ghandruk, le mercredi 5 décembre

… où notables, dignitaires et membres de la communauté sont déjà rassemblés…

Visages de la communauté réunie à Ghandruk

… afin de participer à une grande célébration… On honore, cet après-midi-là, un couple âgé du village pour sa contribution au fil des ans à la communauté…

Après les discours, une danse traditionnelle…

Quelle belle façon de terminer cette randonnée!

Ghandruk, au réveil, jeudi matin, le 6 décembre

C’est déjà le moment de rentrer à Pokhara…

Ces cinq jours dans l’Annapurna sont passés très vite, en un clin d’oeil

Très heureux d’avoir fait cette randonnée!

Merci à tous les villageois rencontrés et au personnel des « tea houses« 

Cela a été une merveilleuse expérience!

Un aperçu de la gare routière de Ghandruk, jeudi matin… On a l’impression ici d’être au bout du monde… Le retour en bus vers Pokhara – quatre heures quinze de trajet sur les routes de montagne – sera épique!

« Dal bhat » traditionnel népalais servi à Pokhara

Avant de terminer, et avant de partager quelques conseils pratiques sur cette randonnée dans l’Annapurna, je tiens à remercier ici mes amis Stephen et Annie qui ont parcouru le même chemin quelques jours avant moi. Leurs suggestions, partagées à Pokhara avant le départ, ont été précieuses. Merci à tous les deux!

Un des deux permis de randonnée obligatoires pour emprunter les sentiers de l’Annapurna

Voilà donc ci-dessous quelques suggestions pour ceux et celles qui songent peut-être à réaliser ce circuit de quelques jours dans l’Annapurna… 

  • Amener (il va sans dire) des vêtements chauds. Il fait très froid en altitude, la nuit, et au petit matin.
  • Se munir de savon, d’une serviette de toilette… et de papier hygiénique – items introuvables dans les chambres.
  • Les lits dans les « tea houses » n’ont qu’un simple drap (pas toujours propre) posé sur le matelas, et une couverture (à la propreté douteuse également). Amener un sac de couchage est une bonne idée. On peut en acheter ou en louer facilement à Pokhara. Ou se munir d’une housse, en soie ou en coton, dans laquelle on se glisse. La housse (« liner ») offre une couche de protection entre la peau et le drap/la couverture.  
  • Le prix des chambres est dérisoire. Entre 400 et 1000 roupies la nuit ($5 à $11 ou 3 à 7 euros). La nourriture, qui doit être acheminée à pied ou à dos d’âne jusqu’aux villages, est beaucoup plus chère. Compter 500-600 roupies pour le petit-déjeuner ($6 ou 4 euros). Le même prix pour le déjeuner ou le souper.

Le lac Phewa Tal au centre-ville de Pokhara, samedi matin, le 8 décembre

Au-revoir, Pokhara!

J’ai été très heureux ici, avant et après mon « trek », tranquille dans mon quartier de Lakeside East où les touristes sont moins nombreux.

Logé, au troisième étage, au Nanohana Lodge. Une très bonne adresse.

Le quartier Lakeside East, à Pokhara, samedi matin le 8 décembre

Après quatre semaines en Inde et au Népal, j’ai maintenant pris mon rythme de croisière. J’ai encore devant moi cinq belles semaines de voyage. Ma santé est bonne, le moral, excellent. 

Indra, originaire de Ghandruk, a gentiment préparé et servi la plupart de mes repas pendant mon séjour à Pokhara

Je quitte Pokhara demain pour Katmandou. Un trajet de sept ou huit heures en bus. Ai bien hâte de découvrir la capitale du Népal, et la vallée de Katmandou où j’ai prévu faire plusieurs autres excursions.

J’ai beaucoup écrit depuis un mois. Et je ne sais pas quand le prochain article sera publié – avant ou après Madras (Chennai), dans le sud de l’Inde, où j’arriverai le 18 décembre, Madras où il fait aujourd’hui… 31 degrés!… 

Alors, juste au cas où… déjà… JOYEUX NOËL À TOUS!   

J’ai rencontré Karchhung, devant sa modeste maison, en arrivant à Ghorepani, le 3 décembre. Nous avons le même âge, et nous avons tout de suite sympathisé. Il m’a indiqué où me placer dans le village le lendemain matin pour avoir les meilleures vues du lever du soleil sur l’Annapurna. Karchhung a un fils qui étudie à Seattle et il espère lui rendre visite dans les prochains mois. Bon voyage, et merci Karchhung!