
Une jeune femme explore la plage « Tavana », située à deux pas de notre pension, sur l’île de Tubuai, dans l’archipel des Australes, en Polynésie française, le dimanche 14 mai. Le climat aux Australes est plus frais que dans les autres archipels. La température oscille, en mai, entre 21 et 26 degrés.

Un peu plus loin, le dimanche 21 mai, promenade à « la Baie Sanglante« . C’est dans cette baie qu’ont eu lieu, en mai 1789, les premiers combats entre les insulaires et les mutins du HMS Bounty. Malgré tous leurs efforts (et la construction d’un fort – le fort George), les révoltés du Bounty n’arriveront jamais à s’implanter à Tubuai. Ils devront quitter l’île (pour Tahiti puis Pitcairn) en septembre 1789. Photo – Freddy.

Chaude ambiance le vendredi 20 mai dans la cuisine de notre pension, à Tubuai. Au menu du souper ce soir-là: carpaccio de thon, salade de chou et vermicelles chinois. Autour de Diana, rayonnante, Poe, Imelda et Nadine (en bleu) entourée de ses nièces, étudiantes au collège de Tubai.

Montés par d’intrépides cavaliers lors des grandes courses des fêtes traditionnelles du « Heiva » en juillet, des chevaux gambadent près du village de Anua, à l’ouest de l’île…

Sous le regard attentif de Teddy, pêcheur et agriculteur, installé à Tubuai depuis plus de trente ans. Teddy, 53 ans, cultive ce matin-là, près des chevaux, son champ de pandanus, un arbuste dont les feuilles sont utilisées…

… dans la vannerie et la chapellerie, sources importantes de revenus pour les habitants des Australes. Ci-dessus, chapeaux et paniers, typiques de l’archipel, entièrement faits à la main, exposés dans une boutique de Tubuai

Promenade familiale au village de Avera, à l’ouest de l’île de Rurutu, le lundi 22 mai.
Nous avons vécu une autre splendide aventure pendant ces quatre semaines passées dans les îles Australes!
La visite de ce quatrième archipel en Polynésie française a confirmé ce que nous avions ressenti lors de notre premier voyage aux Îles de la Société, aux Tuamotu, aux Marquises.
L’accueil, partout sur le territoire, est chaleureux.
Les sourires, généreux, éclatants.
Les gens ici, souvent, vous aiment et rient avec les yeux.
Seul regret, notre séjour s’est terminé beaucoup trop vite!

Diana en compagnie de Maimiti et d’Imelda à notre pension à Tubuai, le samedi 20 mai
Quelques repères, pour les férus d’histoire.
L’archipel des Australes – composé de sept îles dont cinq sont habitées – portait autrefois le joli nom de « Îles Tubuai », Tubuai étant la plus grande île de l’archipel.
Tubuai est aujourd’hui la capitale administrative et économique des Australes.
7000 habitants environ vivent dans l’archipel.

Après notre séjour à Raivavae, nous avons fait halte à Tubuai puis à Rurutu. Les deux autres îles habitées de l’archipel sont Rimatara et la petite île de Rapa, à l’est – que je rêve de visiter!! Rapa est la « petite soeur » de Rapa Nui, le nom polynésien de l’île de Pâques, située beaucoup plus à l’est.
James Cook est le premier navigateur européen à « découvrir » Rurutu, en 1769 lors de son voyage initial dans le Pacifique. Il sera aussi le premier à mentionner Tubuai huit ans plus tard, en 1777, lors de son troisième (et dernier) voyage.
Tubai passe sous protectorat français en 1842, Rurutu en 1889.
Les deux îles seront ensuite annexées par la France, en 1880 pour Tubuai, en 1900 pour Rurutu. Les autorités françaises craignant de perdre les îles Australes aux mains des Anglais – omniprésents à l’époque dans la région via les missionnaires protestants de la London Missionary Society.

Environ 2000 habitants répartis dans de petits villages posés sur le littoral vivent à Tubuai. L’île est entourée d’un immense lagon, l’un des plus vastes en Polynésie française. Notre pension est située à Mataura, le bourg principal, où on retrouve la poste, la mairie, une banque, un petit magasin et quelques « roulottes » de restauration rapide. Une route goudronnée de 26 kms…

… fait le tour de l’île. Ci-dessus, sur la côte ouest de Tubuai, près du village de Anua, le lundi 15 mai. Le lagon, immense, est à l’arrière-plan.

Aperçu de la route de ceinture de Tubuai. L’île est belle, paisible, montagneuse à l’intérieur des terres. En plus de la vannerie, les habitants de Tubuai vivent (comme à Raivavae) de la pêche, de l’agriculture et du tourisme qui se développe peu à peu.

La plupart des habitants possèdent un terrain patrimonial, hérité, partagé et entretenu par les membres d’une même famille. La terre est fertile à Tubai. Dans les jardins, on cultive carottes, pastèques, pommes de terre, et du « taro », un légume racine. Ci-dessus, Diana en compagnie de Freddy, dans la propriété qu’il partage avec son oncle…

Freddy, aux mille talents, homme à tout faire, musicien, responsable avec son épouse, Nadine, de gérer notre pension. Ils ont tous les deux gardé sur nous un oeil bienveillant pendant notre séjour à Tubuai. Merci Freddy et Nadine!

Lors d’une de nos promenades à Tubuai, nous avons rencontré la tante de Freddy, Mins, qui cueille un matin, au bord de la route, des feuilles servant à améliorer la circulation sanguine. Mins en a besoin pour un…

… membre de sa famille. « J’ai appris à reconnaître ces plantes médicinales traditionnelles dans un grand livre écrit en français et tahitien, hérité de ma grand-mère », nous confie-t-elle en remplissant son sac.
Vu la durée de notre séjour à Tubuai (10 jours), nous avons vraiment eu le temps d’écouter les Polynésiens. Longuement et attentivement. Aussi bien les riverains que les Tahitiens de passage. Puisque notre pension a eu la bonne idée d’accueillir en même temps que nous plusieurs petits groupes de techniciens venus accomplir sur l’île des missions précises de 3, 4 ou 5 jours.
La plupart de ces professionnels étaient Tahitiens. Nous étions, autour d’eux, toute ouïe!
Nous avons ainsi partagé nos repas avec une équipe de Météo France-Tahiti venue à Tubuai réparer une antenne et du matériel sur le terrain de l’aéroport.
Des électriciens de Papeete ont également séjourné à la pension afin de vérifier la bonne marche des circuits de divers bâtiments de l’île dont ceux du RSMA, un organisme que je connaissais pas.

Le RMSA en Polynésie française a comme mission principale l’insertion dans la vie active des jeunes adultes de 18 à 25 ans. Différentes formations sont offertes: électricien, soudeur, plombier, aide à la restauration, à la petite enfance, agent administratif… Formations essentielles dans ces petites îles où les structures d’apprentissage sont rares. Le RMSA est financé par le ministère des Outre-Mer.

Devant l’antenne du RMSA à Tubuai
Un groupe de plongeurs a également été des nôtres. Responsable de superviser la délicate pose du cable de fibre optique qui doit bientôt relier Tahiti aux îles Australes. Un service très attendu ici. Le débit du réseau internet étant, dans les îles de l’archipel, extrêmement lent. Difficile à Tubuai ou à Rurutu de télécharger un document ou une photo.
Tout ce beau monde se réunissait deux fois par jour autour de la table de la salle à manger.

Souper à notre pension à Tubuai, le mercredi 17 mai.
Au cours des repas, les sujets de discussion, les opinions, les questions, ne manquaient pas. Nous avons beaucoup appris.
Deux choses m’ont frappé au cours de ces conversations. La première, c’est l’attachement viscéral qu’avaient ces hommes et ces femmes pour leur territoire. Leur façon de vivre en Polynésie, leurs traditions, leur culture, ils parlaient de tout cela avec ferveur et passion.
Pas question pour eux de quitter le pays, « le fenua ». Malgré leurs compétences et les difficultés de la vie quotidienne à Tahiti, aller travailler à Paris, Nantes ou Bordeaux, n’est pas une option.
Deuxième surprise, en dépit des divergences politiques, il y avait chaque soir autour de la table un vrai consensus autour du nouveau gouvernement, indépendantiste, élu le 30 avril. Gouvernement à qui « il faut donner le temps de faire ses preuves » entendait-on.
Aucune animosité donc, pour l’instant, envers le nouveau président, Moetai Brotherson, largement respecté, issu du parti Tavini Huiraatira

Moetai Brotherson, 53 ans, est aussi responsable du ministère du tourisme, des transports aériens internationaux, de l’égalité des territoires, des affaires internationales, du développement des archipels, de l’économie numérique et des conséquences des essais nucléaires.
Le troisième volet des échanges a été plus délicat. Chacun a évoqué à sa façon les défis – nombreux – de la vie quotidienne dans ces îles lointaines – si souvent idéalisées par les étrangers!
L’envers du décor, de la carte postale, est très différent. Le nouveau gouvernement a du pain sur la planche. Quatre enjeux, parmi beaucoup autres, ont été évoqués.
* Dans un territoire où les allocations chômage n’existent pas, 26 % environ de la population en Polynésie française vit sous le seul de pauvreté, 300 euros par mois. (Chiffres de 2021 de Institut de la statistique de la Polynésie Française (ispf.pf))
* Les violences conjugales – liées en grande partie à la consommation abusive d’alcool – sont partout sur le territoire un fléau.
* Le taux de suicides sur le territoire est inquiétant. Près de 230 tentatives sont recensées par an et environ 30 à 50 personnes mettent fin à leurs jours. Chez les jeunes, c’est souvent la première cause de mortalité, dépassant même, certains années, les accidents de la route.
* Le taux d’inflation en Polynésie française a atteint 8.5% en 2022. La plupart des ménages ont beaucoup de mal à boucler leur fin de mois.

Thierry a grandi sur l’île de Rapa et vend le midi dans sa roulotte des sandwiches (« hachis-frites« ) sur le bord de mer de Mataura, à Tubuai. Son rêve? Venir exercer son métier au Canada. Projet difficile. Le Canada n’a aucune antenne officielle en Polynésie française. Les entrevues avec les candidats retenus pour une immigration potentielle au Canada ont lieu à Sydney, Auckland, Honolulu ou Los Angeles! Le coût du voyage est défrayé par les candidats. Sans aucune garantie de succès.

Elvis, travaille dans sa boutique de fruits et légumes, situé sur le bord de la route à Tubuai, à l’ouest de « la station » de Mataura.

Une jeune femme, accompagnée de son enfant, vend des fruits et légumes devant la maison familiale, près de l’aéroport de Tubuai

Baignade et moment de détente avec deux de nos compagnons de voyage, Serge et Agnès, de Lyon, logés quelques jours à notre pension à Tubuai.
Après avoir parcouru l’île de long en large, nourri régulièrement les cochons dans la maison de Freddy, assisté à une messe magnifique, le dimanche 21 mai, après avoir beaucoup ri à la pension et nagé presque tous les jours dans l’eau claire et fraîche du lagon, nous avons quitté Tubuai avec beaucoup de regret.
Nous aurions pu facilement rester ici beaucoup plus longtemps. Tant la vie est douce, insouciante, à Tubuai. Comme à Raivavae, les touristes sont une denrée rare sur l’île.

Ci-dessus, aperçu de la plage de la Baie Sanglante, près du village de Mataura. Au revoir Tubuai!
Le lundi 22 mai, un vol d’une quarantaine de minutes nous emmène à Rurutu, dernière étape de notre voyage aux Australes.

Rencontre avec un groupe de jeunes, à l’extérieur du « snack Sabrina« , au village de Avera, le jour de notre arrivée à Rurutu. Nous avons fait ce jour-là, en scooter 50cc, le tour de l’île…

… quelques heures seulement après notre descente d’avion! Ci-dessus, devant la mairie d’Avera. Direction: la pointe sud de l’île de Rurutu

où nous nous arrêtons (casques de scooter en mains), près du village de Narui, au bord d’une magnifique plage de sable blanc! Voir la carte ci-dessous.

La montagneuse et mystérieuse île de Rurutu. Environ 2400 habitants vivent ici, dans trois villages principaux: Moerai, la localité principale, au nord-est, Avera, sur la côte ouest et Auti sur la côte est. Notre pension (croix bleue sur la carte) est située dans le bourg de Vitaria

dans une cocoteraie! On aperçoit derrière les arbres, de l’autre côté de la route,

… la plage, déserte, où nous nous sommes baignés pratiquement tous les jours. Près de la pension, des bassins d’eau profonde permettent de nager dans le lagon. Note: la température de l’eau à Rurutu est beaucoup plus agréable (chaude) qu’à Tubuai. Et la recherche de coquillages plus intéressante!

Rencontre avec Pa, le jeudi 25 mai, à Moerai, devant la coopérative agricole de Rurutu. Pa cultive sur ses terres le taro. Comme tous les anciens, il parle sur l’île le Rurutu, un dialecte similaire au tahitien mais qui se distingue par son vocabulaire et la façon de prononcer certains mots. La lettre « h » par exemple n’est pas utilisée en Rurutu. Le village de Hauti en Tahitien = Auti en Rurutu. Le Rurutu est enseigné ici à l’école primaire.
La production agricole à Rurutu est très importante. L’île (avec Tubuai) est l’un des vergers de la Polynésie française.
En plus du taro, poussent ici: citrons, papayes, grenades, bananes, noix de coco, mangues, avocats, corossol, potiron, « pota » (choux chinois), « uru » (le fruit de l’arbre à pain), goyaves.
Une grande partie des fruits et légumes vendus dans les marchés de Tahiti vient des Australes.

Une plantation de choux près du village de Moerai, à Rurutu.
Rurutu produit aussi un excellent café!

Nova a repris il y a quelques mois dans la coopérative de Rurutu la commercialisation du café de l’île. Elle arrive difficilement à répondre aux demandes qui affluent d’un peu partout. Nous avons réussi à repartir avec quelques paquets de café fraîchement torréfiés.

Une maison nichée au coeur d’une cocoteraie, près du village de Narui

Nelly, après un bon repas, partage des conseils de couture avec Diana, à Moerai, le mardi 23 mai.
Une autre belle surprise nous attend à Rurutu: l’immense diversité de ses habitants!

Hani, née d’un père coréen et d’une mère tahitienne, travaille dans un restaurant, face au port de Moerai, à Rurutu.
Nous avons ainsi rencontré en quelques jours, partout dans les villages, des riverains issus de métissages complexes. Métissages qui reflètent la présence sur l’île, au fil des ans, des navigateurs, aventuriers, missionnaires, commerçants et immigrants venus, des quatre coins du monde, s’établir à Rurutu.
La plupart des riverains ici ont du sang portugais, espagnol, français, sud-américain, chinois.
Nous avons appris que l’argent échangé dans les commerces à Tahiti a été, jusqu’à la fin du 19è siècle, la monnaie chilienne et péruvienne!

Thenyou, 71 ans, derrière le comptoir de son magasin à Avera, à Rurutu, où il est né. Son père est arrivé dans l’île, à la fin des années 20, en provenance du sud de la Chine. Afin de reprendre, à Avera, le magasin (ci-dessus) tenu déjà, à l’époque, par une famille chinoise!

Plat de Chow Mein servi au restaurant « Les Délices de Rurutu« , le mardi 23 mai. La cuisine chinoise est partout présente en Polynésie.

Des jeunes filles marchent tranquillement dans une rue de Moreai, à Rurutu, le mardi 23 mai. J’ai eu parfois l’impression à Rurutu de marcher dans les rues de ma ville natale, Les Cayes, dans le sud d’Haïti.

Maison typique de Moreai. Pas un papier qui traîne dans la cour. Nous avons remarqué que les Polynésiens, dans chacun des archipels où nous sommes passés, nettoient consciencieusement leurs jardins et l’espace devant leurs maisons.
Nous avons aussi rencontré à Moerai un homme, encore jeune, Dominique, qui vient de prendre sa retraite… à l’âge de 39 ans!

Après 20 ans de bons et loyaux services (2003-2023) dans l’armée française, Dominique est revenu chez lui, à Rurutu, prendre sa retraite. Pendant son service, Dominique a été déployé en Afghanistan, au Kosovo et au Mali.
Fait peu connu: la Polynésie (avec la Réunion) est l’un des premiers viviers de recrues de l’armée française. Vu le taux élevé de chômage chez les jeunes, le manque de débouchés sur le territoire, des centaines de jeunes polynésiens (hommes et femmes) s’engagent chaque année dans l’armée afin de défendre aux quatre coins du monde le drapeau tricolore.
Certains s’engagent dans la Légion étrangère

Avis de recrutement affiché sur les murs de la mairie de à Auti, à Rurutu.

Sashimi de thon à la javanaise, servi au restaurant Piareare, à Moerai. « Tama’a Maitai »! = Bon appétit!
Après une semaine bien remplie, nous devons déjà quitter Rurutu.

Diana participant à un atelier de tressage à notre pension, à Vitaria.
Nous avons rencontré aux Australes des gens simples, paisibles, généreux, fiers de leurs îles!
Cela a été un vrai bonheur de vivre ici.
Nous sommes extrêmement reconnaissants d’avoir pu réaliser ce second voyage en Polynésie française.

Une femme et son enfant, devant l’église Saint Jean-François Régis, à Rurutu, le dimanche 28 mai.
Mais… combien de temps encore ces petites îles des Australes pourront-elles rester à l’écart des grands circuits touristiques- lorsqu’on apprend que le nouveau gouvernement veut tripler à 600 000 par an le nombre de visiteurs en Polynésie française?
Les prochaines années seront ici fertiles en événements. Après les récentes élections, comment va évoluer le territoire, politiquement?
Quelles seront les premières grandes mesures prises par les membres du parti indépendantiste?
Quelle marge de manoeuvre la France va-t-elle accorder à sa « collectivité d’outre-mer »?

Diana en compagnie de Hinano et de ses enfants près de notre pension, à Vitaria, le mercredi 24 mai.
Cela a été une magnifique expérience de découvrir les îles Australes!
Nous avons eu la chance de visiter, jusqu’à présent, douze îles dans quatre des cinq archipels de la Polynésie française.
Nous reviendrons. Le cinquième archipel – les îles Gambier – nous attend.

Sur une plage de Raivavae, le jeudi 4 mai.
Nous sommes de retour à Punaauia, au bord de la plage.
Papeete est à vingt minutes de route, au nord.
Notre vol (direct) pour Seattle part ce soir. Nous serons à Vancouver mercredi après-midi.
« Nana » (Au revoir)!