Arrivée à Cahors, le samedi 4 mai, après six jours de marche depuis Figeac. Sur la droite, le Lot, gonflé, presqu’en crue après les pluies abondantes des derniers jours…La veille, le vendredi 3 mai, Jacques, accompagné de son épouse, Anne-Marie, sert l’apéritif dans leur grande maison de Pasturat où ils accueillent randonneurs et pèlerins depuis… 41 ans! Nous serons 25 ce soir-là à la table du souper, Français, Suisses, Belges, Canadiens. Une superbe soirée!Sous la flèche bleue, mon parcours sur la « Voie du Célé » qui relie, via le GR651, Figeac et Cahors. 109 kms environ parcourus en six étapes: Figeac – Corn – Marcilhac-sur-Célé – Cabrerets – Saint-Cirq-Lapopie – Pasturat – Cahors. Le sentier suit de près la rivière Célé puis (après Bouziès), le Lot. Le chemin monte et descend tout le temps. Tracé plus difficile que le GR65.
Que retenir de ce périple de six jours dans le merveilleux département du Lot?
(Malgré le temps souvent maussade: nous avons eu, lundi et mardi, deux jours de fortes pluies).
1. – D’abord, l’accueil chaleureux reçu presque partout le long du chemin!
Conversation matinale, ci-dessus, dans la boulangerie de Marcilhac-sur-Célé, le mardi 30 avril. Et ci-dessous…… sourire devant un casse-croûte de Bouziès, le vendredi 3 maiTableau de répartition des chambres, Marcilhac-sur-Célé, le mardi 30 avril. Merci à Véronique et Jean!
Le service reçu dans les hébergements, dans les chambres d’hôtes, a parfois été exceptionnel.
Un exemple?
Une heure environ avant mon arrivée à Cahors, samedi vers midi, mon téléphone sonne. Un message SMS de Jacques (mentionné plus haut) qui m’informe que j’ai oublié dans ma chambre, à Pasturat, un chandail. Je l’appelle. Il répond aussitôt.
Jacques me demande où je loge à Cahors. Après quelques secondes, il m’annonce qu’il « a des courses à faire à Cahors » et qu’il viendra déposer mon chandail à mon hébergement. Je n’en reviens pas. Il y a 20 kms environ (en voiture) entre Pasturat et Cahors… Arrivé deux heures plus tard, après le déjeuner, à mon hébergement, mon chandail, soigneusement plié, m’attendait. Incroyable. Merci mille fois, Jacques!
Premier jour de marche, le dimanche 28 avril, entre Figeac et le village de Corn
2. – L’effort physique, intense, continu, qu’exige chacune des étapes du chemin
J’aurais dû mieux écouter les conseils de mon amie Florence qui connaît bien la région. À part la première étape (Figeac-Corn) relativement simple, le GR651 est une véritable succession de courtes montagnes russes! On monte, parfois très haut… comme le montre l’image ci-dessous…
Au-dessus du petit village d’Espagnac, blotti au coeur du Quercy, le lundi 29 avril.
…puis on redescend, tout aussi abruptement…
Arrivée au village de Cabrerets, le mardi 30 avril
Je ne m’attendais pas à fournir un tel effort, quotidien. J’arrivais souvent, en fin d’étape, fourbu. C’est peut-être aussi l’âge. Bientôt 68 ans. Cela fait beaucoup de bougies…
On est, sur ces sentiers escarpés, abrupts, très loin du long fleuve tranquille, paisible du GR65. Malgré les nombreuses croix, les superbes églises qui jalonnent le chemin, la plupart des randonneurs sont ici, semble-t-il, dans un esprit, dans une démarche plus sportive que spirituelle. C’est du moins mon impression.
Les randonneurs sur le Célé sont également (en majorité) plus jeunes que ceux que l’on croise en général sur le GR65.
Le clocher d’une église semble monter jusqu’au ciel aux alentours du hameau de Boussac
3. – Les merveilleux villages que traverse le GR651!
C’est l’une des plus belles surprises de la Voie du Célé!
Aperçu du village de Saint-Cirq-Lapopie où a vécu, l’été, entre 1951 et 1966, André Breton. Pour accéder au village, à pied…… un magnifique chemin de halage taillé dans le roc des Causses. Le chemin (qui servait autrefois au transport des marchandises) est, le jeudi 2 mai, malheureusement, partiellement inondé et interdit d’accès… par arrêté municipal.
Après avoir consulté quelques riverains, je suis passé quand même!
… et ai été surpris de voir, dans un des petits bras du Lot, un bassin d’eau émeraude… (Curieusement, personne n’a pu m’expliquer la couleur de l’eau à cet endroit précis…)
Je tenais absolument à visiter la maison et le village où vécu André Breton.
Avant de publier, en 1924, son « Manifeste du Surréalisme », l’écrivain faisait partie du Mouvement Dada avec Tristan Tzara, Philippe Soupault, Jacques Rigaut et bien d’autres. Dada est mouvement artistique fascinant, scandaleux parfois, né à Zurich après la grande guerre (1914-1918) et sur lequel, jeune homme rebelle que j’étais alors, j’ai écrit ma thèsede Maîtrise, à l’université McGill, en 1982.
(42 ans plus tard, « l’esprit Dada » est toujours, chez moi, bien vivant).
André Breton photographié par Man Ray en 1932. Man Ray a longtemps été le compagnon de route d’André Breton, dans l’aventure Dada, puis pendant la période du surréalisme. Le photographe était régulièrement invité à séjourner dans la maison d’André Breton et de son épouse Elisa à Saint-Cirq-Lapopie.
Fait peu connu, André Breton a participé dans le département du Lot, à la fin des années quarante, au projet de « la route mondiale ». C’est ce projet qui l’a conduit, un peu plus tard, à s’établir à Saint-Cirq-Lapopie.
Un tableau dans le village nous apprend qu’en 1949, « en réaction aux horreurs de la seconde guerre mondiale, Cahors se déclare ville citoyenne du monde, bientôt suivie par 239 communes du Lot. Un an après est inauguré, en présence d’André Breton, le premier tronçon de la route mondiale, « route de l’espoir » qui part de Cahors jusqu’à Saint-Cirq-Lapopie : 5 000 personnes y participent. Aujourd’hui, seules les bornes de cette route existent toujours.
Magnifique esprit d’ouverture du Lot!
Malgré le temps gris, le village est splendide!
Aperçus des différents quartiers de Saint-Cirq-Lapopie…le jeudi 2 mai. Le village, l’hiver, est pratiquement désert…Veillant à la mémoire de l’écrivain, Olivier est l’un des gardiens de la Maison André Breton, l’une des plus anciennes du village…
En quittant Saint-Cirq-Lapopie le lendemain, le vendredi 3 mai…
… le chemin de halage est complètement inondé. Impossible de passer cette fois. Il a fallu redescendre par « la route touristique » jusqu’à Bouziès.
Avant de poursuivre, j’aimerais saluer ici toutes les petites communes où passe la Voie du Célé.
Ces bourgs, ces hameaux sont de véritables trésors!
Bravo et respect aux riverains qui s’accrochent contre vents et marées à leurs villages et s’évertuent à les faire vivre – malgré les nuages à l’horizon et les défis, nombreux, quotidiens:
Fermeture des petites lignes de chemin de fer en Occitanie et, avec elles, la fermeture des gares de ces communes, liens essentiels pour la survie des villages.
La fermeture des écoles. L’école du village de Marcilhac-sur-Célé, par exemple, compte cette année 13 élèves, répartis en trois niveaux. L’école risque de fermer l’an prochain, à cause du manque de financement. « Tout dépendra de la volonté du Maire » m’a confié le seul enseignant, rencontré le mardi 30 avril, au bord du GR651.
Comme le montre l’image ci-dessous, la colère gronde dans le monde agricole en Occitanie…
Partout sur les routes du département du Lot, en guise de protestation contre les « normes » européennes qu’on veut leur imposer, les panneaux des villes, des villages ont été déboulonnés et renversés par les agriculteurs et leurs partisans. Ci-dessus, à l’entrée du village de Boussac.
4. – La gastronomie du sud-ouest
C’est un immense privilège de goûter de nouveau à quelques-uns des plats de la région!
Agneau confit 7 heures accompagné de salade, légumes et pommes de terre, Corn, le 28 avril.Salade de magret de canard fumé, suivi d’un……filet mignon de porc aux petits légumes, sauce curcuma, Cabrerets, le mercredi 1er mai.Pièce de cochon fermier, cuisson 7h, légumes du moment, pommes boulangères. Auberge du Sombral, Saint-Cirq-Lapopie, le jeudi 2 mai. Un repas exceptionnel! Merci Marion et Mathieu!
Malgré le bilan météo très mitigé, j’ai a-d-o-ré découvrir et parcourir la Voie du Célé!
Entre Figeac et Corn, sur le GR651
Après une nuit passée à Cahors, j’ai pris hier dimanche le train jusqu’à Figeac où j’ai retrouvé avec plaisir le confort et le calme de ma chambre d’hôtes, au bord du Célé.
Boulangère à la manoeuvre, tôt le matin, à Figeac…
Je reprends la route ce matin, lundi 6 mai. Une nouvelle découverte m’attend: « la Voie de Rocamadour ».
Première étape: 24 kms entre Figeac et Lacapelle-Marival. (Voir la carte au début de l’article).
Sur le chemin de Compostelle en Aveyron, 3 kms environ avant le village de Saint-Côme-d’Olt, Muriel régale depuis 20 ans marcheurs et pèlerins avec ses délicieux petits plats et ses « farçous » servis, avec le sourire, dans son jardin. Merci, Muriel!Soulignées en rouge, mes étapes sur le haut plateau de l’Aubrac: Nasbinals – Aubrac – Saint-Chély-d’Aubrac – Saint-Côme-d’Olt. Le plateau, magnifique, est partout irrigué de cours d’eau (on les appelle ici les « boraldes ») qui se jettent dans le Lot.
Malgré le temps couvert et le vent, mordant, glacial parfois, quatre jours de randonnées exceptionnelles entre Nasbinals et Saint-Côme-d’Olt, au cœur du haut plateau de l’Aubrac !
Au départ de Nasbinals, le lundi 22 avril, une famille entame sur le GR65 l’une des nombreuses petites montées qui mènent…au plateau de l’Aubrac…Quelle merveilleuse façon de célébrer le Jour de la Terre! Température? Un ou deux degrés. Et il y a, sur le plateau, un vent à décorner les boeufs!! Superbe aventure. Je suis au 7è ciel. Je pourrais refaire ce chemin dix, vingt fois!Le lundi 22 avril, sur le GR65, 8 kms environ avant l’arrivée à Saint-Chély-d’Aubrac. La croix, à l’arrière plan, marquait autrefois pour les pèlerins « le bout de l’Enfer« , la fin de la dangereuse traversée de l’Aubrac où sévissaient loups, brigands et gredins.
Il y a six ans, lorsque j’avais découvert la région, je m’étais promis de revenir dans l’Aubrac – à une condition. Avoir le temps d’explorer et de savourer ce lieu remarquable où marcheurs et pèlerins passent souvent trop vite, les yeux rivés sur les kilomètres et les étapes à parcourir.
Arrivée sur le GR65 à Saint-Chély-d’Aubrac, en Aveyron, le 22 avril
J’ai donc pris le temps cette fois-ci de me poser à Saint-Chély-d’Aubrac pendant trois jours. Logé en chambre d’hôtes dans une bâtisse rénovée du 15è siècle, j’ai pu sillonner en toute tranquillité les merveilleux sentiers qui bordent le village.
D’un petit chemin rural, aperçu du village de Saint-Chély-d’Aubrac le mardi 23 avril. Le village (comme celui d’Aubrac, un peu plus haut sur le plateau) avait jadis pour vocation l’accueil et la protection des pèlerins.Le bourg compte aujourd’hui environ 300 habitants…
Comme le montre la photo ci-dessus, à partir de 9h30 ou 10h le matin, la majorité des pèlerins a quitté St-Chély et a repris la route, le GR65, vers Saint-Côme d’Olt (16kms) ou vers Espalion (24 kms). Le village est pratiquement désert.
C’est le moment idéal, dans une boulangerie, dans un café, pour aborder les riverains, les anciens, et les écouter partager l’histoire de leur région.
Au milieu du 19è siècle, les hommes et les femmes de l’Aubrac quittent massivement leur terre « qui n’arrive plus à les nourrir ». Ils montent à Paris. Et exercent dans la capitale les métiers les plus pénibles: chaudronniers, charbonniers, frotteurs de parquet, porteurs d’eau. On les appelle, avec les Auvergnats, les « bougnats ». Les femmes préparent les repas dans des cafés-charbons où le mari livre le charbon et la femme sert les clients.
Bougnat et son sac de charbon, à Paris, en 1930.
Peu à peu ces cafés-charbons se transforment en bars-tabac, puis en restaurants. La réussite, sociale, financière, est souvent au rendez-vous. Un siècle plus tard, les descendants des « bougnats » possèdent la majorité des grands cafés parisiens dont La Brasserie Lipp, le Café de Flore, les Deux magots, le restaurant Maxim’s. (Source: Vivre à Paris, janvier 2022)
Aujourd’hui, grâce au chemin de Compostelle, au tourisme, au travail, à la détermination des habitants, les villages de l’Aubrac, autrefois abandonnés, délaissés, revivent, prospèrent.
À moins de réserver plusieurs mois à l’avance, il est souvent difficile, entre avril et octobre, de trouver une place dans un gîte ou une chambre d’hôtes de la région.
Coupe de fromage Laguiole dans une boutique de Saint-Chély-d’Aubrac, le mardi 23 avril. Le Laguiole est un fromage typique de l’Aubrac, produit dans la ville du même nom. Voir la carte plus haut. Le village de Laguiole est aussi mondialement connu pour ses couteaux pliants.Un chemin forestier à quelques centaines de mètres de Saint-Chély, conduit doucement…… à l’une des maisons typiques de la région, le mardi 23 avril. Une autre journée splendide dans l’Aubrac!
Après plusieurs courtes randonnées aux alentours de Saint-Chély d’Aubrac, j’ai repris le jeudi 25 avril le chemin jusqu’à Saint-Côme-d’Olt.
On peut aussi emprunter à Saint-Chély-d’Aubrac, en plus du GR6 ou du GR65, de nombreux sentiers ruraux et d’anciennes voies romaines…
Malgré le mauvais temps, vacances scolaires obligent (zones A et B), il y a beaucoup de randonneurs sur le GR65 ce matin-là. Des Français bien sûr, mais aussi des Suisses, des Allemands, des Coréens, plusieurs Québécois, très populaires sur le chemin.
Début de journée pluvieuse entre Saint-Chély-d’Aubrac et Saint-Côme-d’Olt, le jeudi 25 avrilHeureusement, très vite…un soleil timide fait son apparition… Le temps plus sec permet même à certains…… de pique-niquer au bord d’une boralde, ci-dessus près du hameau de La Rozière…
Après quatre heures de marche, nous rejoignons…
… le magnifique village de Saint-Côme-d’Olt. La commune, où vivent environ 1500 habitants, est reconnue comme l’un des plus beaux villages de France.
Après une bonne nuit de sommeil au Couvent de Malet (la photo ci-dessus a été prise jeudi après-midi, de ma chambre, au couvent dont j’ai déjà parlé ici), j’ai repris vendredi, comme prévu, la navette de la Malle postale…
… où j’ai retrouvé lors d’une courte halte, à Conques, quelques-uns de mes éphémères compagnons de route qui terminent à Conques cette année leur aventure sur le GR65. Bonne continuation sur le chemin, l’an prochain, Sylvie, Stéphanie, Célia! Cela a été un grand privilège de vous rencontrer!
Me voilà maintenant à Figeac, samedi 27 avril, jour de marché au village…
Malgré le temps, toujours maussade, les clients se pressent devant les étals, près du Lycée Champollion où le marché a été temporairement relocalisé, à cause des travaux en cours, place Carnot.
Le marché du samedià Figeacle 27 avril
J’ai eu le temps de déjeuner à Figeac à « La Petite Graine », un restaurant associatif et solidaire, géré en grande partie par des bénévoles.
Grâce à la contribution des clients, le restaurant vient en aide à la population démunie et marginalisée de Figeac en leur offrant des repas de qualité, à un prix modique.
Une belle initiative. Et un excellent repas, partagé dans un cadre convivial et chaleureux.
Le restaurant « La Petite Graine », rue Emile Zola, dans la vieille ville de Figeac. Une bonne adresse.
Après avoir parcouru environ 45 kilomètres dans l’Aubrac, j’ai maintenant terminé, tel que prévu, ma préparation. Aucun pépin à signaler.
Deux grandes randonnées m’attendent maintenant: La Voie du Célé (environ 109 kms) et la Voie de Rocamadour (environ 120 kms), deux variantes du GR65, entre Figeac et Cahors.
En bleu, le tracé de « laVoie du Célé« » le sentier de Grande Randonnée, le GR651, qui court de Figeac à Cahors. Une carte plus détaillée accompagnera le prochain article…
Au programme demain, dimanche: 19 kilomètres entre Figeac et Corn (le village de Corn est situé en amont de Marcilhac-sur-Célé.
J’ai bien hâte de commencer! Et je suis très reconnaissant de pouvoir tenter cette nouvelle aventure!
Je vous laisse en partageant une pancarte et une affiche, pleines de vérité, aperçues cette semaine le long du chemin…
Sur une clôture, à l’entrée du village de Saint-Côme-d’Olt, le jeudi 25 avril.Rue des Maquisards, à Figeac, le samedi 27 avril
Le samedi, c’est jour de marché, aux alentours de la place du Plot, dans la vieille ville…… du Puy-en-Velay où je suis arrivé jeudi après-midi…… en train (TGV + TER), directement de l’aéroport CDG … après un merveilleux séjour…… en famille avec Diana, à Montréal, où nous avons retrouvé avec bonheur mon frère, ma sœur, mes nièces, leurs conjoints… et une rimbambelle d’a-d-o-r-a-b-l-e-s petits-enfants dont le plus jeune, né il y a cinq mois, le jour de mon anniversaire, porte en partie… mon prénom! Je suis aux anges, honoré, comblé.
Nous avons profité au maximum de notre court séjour à Montréal!
Diana (sur la gauche, casque rouge) en grande discussion, le lundi 15 avril, avec deux étudiants inscrits en 1ère année à McGill. Quel plaisir de retrouver, en vélo et sous le soleil, le campus de l’université où j’ai étudié pendant 5 ans. Nous sommes ensuite allés découvrir, à dix minutes de marche, au centre-ville, un formidable nouvel espace culinaire et culturel où nous avons dégusté de merveilleux plats…Griot de porc, riz aux pois, banane pesée et accra, restaurant Paul Toussaint, Time Out Market, 705 Rue Sainte-Catherine, Montréal.Cela a été un immense bonheur de retrouver la famille à Montréal! Ci-dessus, chez ma soeur, le 14 avril.Scènes de marché, Le-Puy-en-Velay…le samedi 20 avril
Me revoilà, pour la troisième fois, au Puy-en-Velay, à l’aube d’une nouvelle aventure qui m’emmènera vagabonder pendant trois semaines le long de sentiers féeriques en Occitanie.
Les trois départements (encerclés en orange) où je randonnerai entre le 22 avril et le 12 mai. La ville du Puy-en-Velay est située juste au nord-est, en Haute-Loire, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Voir cartes détaillées ci-dessous.La carte de mon itinéraire en Occitanie. #1 – Du Puy-en-Velay, une navette me conduira à Nasbinals (Lozère), point de départ de 4 jours de marche dans le plateau de l’Aubrac. #2 – Après l’Aubrac, direction Figeac (Lot) où je débuterai mon parcours le long de la rivière Célé jusqu’à Cahors (tracé rouge sur la carte). #3 – Retour (en train) enfin jusqu’à Figeac pour conclure la boucle (tracé vert) – la voie de Rocamadour – jusqu’à Cahors.
Pourquoi ces randonnées et pourquoi ce retour au Puy-en-Velay? Une ville où je suis passé deux fois déjà, en 2018 et en 2022.
La réponse est toute simple. Je viens terminer ici un projet inachevé.
À la fin de mon périple sur le chemin de Compostelle en juillet 2022, je devais immédiatement reprendre le train vers Figeac afin de parcourir deux des variantes mythiques du GR65: la voie du Célé et la voie de Rocamadour.
Mais après deux jours de repos à Saint-Jean-Pied-de-Port, fin juillet 2022, je me suis vite rendu compte que j’allais devoir remettre mon projet. Après avoir cheminé sous la canicule plus de 325 kms entre Conques et Cahors puis entre Nogaro et les Pyrénées, j’étais tout simplement vidé, fatigué, incapable d‘envisager deux longues randonnées supplémentaires.
À la mi-juillet, en 2022, le thermomètre était monté jusqu’à 40 degrés sur le chemin (25 kms) entre Nogaro et Barcelonne-du-Gers. J’avais eu l’impression ce jour-là, le 16 juillet, et toute la semaine, de marcher dans un four. Une expérience que je n’oublierai jamais.
Les habitudes sur le GR65 avaient été complètement bouleversées lors de la canicule. Les propriétaires des chambres d’hôtes, des gîtes, avaient dû rapidement ajuster leurs horaires. Le petit-déjeuner était servi à l’aube. Dès 6 ou 7 heures, randonneurs, pèlerins étaient en route. Et nous terminions nos étapes en nage, exténués, vers midi ou 13h, au lieu de l’heure d’arrivée habituelle: 15h ou 16h.
Arrivée sous une chaleur écrasante à Barcelonne-du-Gers, le 16 juillet 2022.
Me revoilà donc de retour dans la région, au printemps cette fois, déterminé à réaliser ce projet inachevé il y a deux ans.
Avant d’entamer le Célé (109 kms) puis la voie de Rocamadour (120 kms environ), j’avais cependant besoin d’une période de rodage, de « mise en jambes », quelques jours de marche afin de mieux me préparer avant d’arriver à Figeac.
J’ai tout naturellement choisi l’Aubrac, pour sa proximité avec le département du Lot, mais c’est aussi et surtout une région que je rêve de retrouver depuis mes premiers pas sur le chemin de Compostelle en 2018!
Pour les marcheurs, ce tronçon du GR65 – à mi-chemin entre Le-Puy-en-Velay et Conques – est tout simplement divin!
Voilà donc mon itinéraire dans ces régions du centre et du sud-ouest de la France que je ne me lasse pas d’explorer!
Traversée du plateau de l’Aubrac, entre Nasbinals et…… Saint-Chély-d’Aubrac, en mai 2018
Partie A = Le-Puy-en-Velay et le plateau de l’Aubrac
Mes quatre jours de randonnée dans l’Aubrac me mèneront de Nasbinals à Saint-Chély d’Aubrac où je m’arrêterai et explorerai les sentiers autour du village. 15 petits kms de marche ensuite jusqu’à Saint-Côme d’Olt où je serai hébergé au couvent de Malet. Une partie de ce tronçon du GR65 est inscrite au patrimoine de l’Unesco.
18 – 21 avril = Le Puy-en-Velay (Haute-Loire)
21 avril = Navette Le Puy-en Velay – Nasbinals (Lozère)
22 avril = Nasbinals – Saint-Chély-d’Aubrac (Aveyron) = 16 kms
23 avril et 24 avril = Randonnées autour de Saint-Chély-d’Aubrac
25 avril = Saint-Chély-d’Aubrac – Saint-Côme-d’Olt (Le Couvent de Malet) = 15 kms
26 avril = Navette La Malle Postale: Saint-Côme-d’Olt – Conques (déjeuner) – Figeac (Lot)
27 avril = Figeac (grand marché du samedi)
Rencontre avec « Baladin », portant vaillamment les bagages d’un duo de randonneurs, dans l’Aubrac, en mai 2018
B = La Voie du Célé (environ 109 kms, sur le GR 651)
28 avril = Figeac – Corn = 19 kms
29 avril = Corn – Marcilhac-sur-Célé = 24 kms
30 avril = Marcilhac-sur-Célé – Cabrerets = 18 kms
Vue d’ensemble de la région avec le tracé (en vert) de la voie du Célé et (en bleu + pointillé vers Cahors) de la voie de Rocamadour. En longeant le Célé, je ferai un léger détour/une halte à Saint-Cirq-Lapopie, le village où vécu autrefois, l’été, André Breton.
C = La Voie de Rocamadour (environ 127 kms, sur le GR 6 et le GR 46)
6 mai = Figeac – Lacapelle-Marival = 22 kms
7 mai = Lacapelle-Marival – Saint-Chignes = 21 kms
8 mai = Saint-Chignes – Rocamadour = 18 kms
9 mai = Repos à Rocamadour
10 mai = Rocamadour – Labastide-Murat = 27 kms (selon ma condition, exceptionnellement, pour cette très longue étape, je prendrai peut-être la navette de la Malle Postale). Très peu d’options d’hébergement entre Rocamadour et Labastide-Murat.
11 mai = Labastide-Murat – Vers = 23 kms
12 mai = Vers – Cahors = 16 kms
13 mai = Cahors – Paris (train)
D = Paris, 13-20 mai
Au programme à Paris: retrouvailles avec un ancien camarade de classe perdu de vue depuis notre scolarité turbulente au Collège Stanislas de Montréalau milieu des années 70. J’irai aussi refaire un tour à Melun (Seine-et-Marne) où j’ai vécu, en pension puis en famille, dans les années 60. Retour à Vancouver le 20 mai.
Bon printemps à tous!
Notes de lecture:
Amin Maalouf
On a beaucoup parlé d’Amin Maalouf l’automne dernier lorsqu’il a été élu à Paris (à 28 voix contre 8 à son concurrent, Jean-Christophe Rufin) secrétaire perpétuel de l’Académie française. Une éclatante victoire. Je me suis alors aperçu que je n’avais encore rien lu de cet écrivain, né à Beyrouth et arrivé en France en 1976, peu après le début de la guerre au Liban.
J’ai donc essayé, au Maroc puis à Vancouver, de rattraper mon retard en lisant trois ouvrages absolument remarquables. Deux romans et un essai qui m’ont profondément remué, bouleversé. Et qui m’ont permis de découvrir un grand écrivain, un historien, érudit, plein de talent. Un écrivain de génie.
i. Les Échelles du Levant – (1996)
L’histoire fascinante d’une famille fortunée vivant, au début du siècle dernier, au « Levant », la région bordant la côte méditerranéenne de l’Asie (Syrie, Liban, Turquie). À la tête de la famille, un homme cultivé, raffiné, fantasque, qui a, pour son fils aîné, Ossyane, les plus hautes ambitions. Ce dernier, cependant, n’a qu’une envie: s’affranchir au plus vite de l’emprise de son père. Ossyane part donc, en juillet 1937, étudier la médecine à Montpellier. Sa vie bascule deux ans plus tard. La 2è guerre mondiale éclate. Ossyane entre, en France, dans la Résistance. Où il se distingue, se fait un nom. Il rencontre Clara, résistante elle aussi, de confession juive. Ils se marient. Ont une fille. Après la guerre, Ossyane rentre au pays, au Liban, où s’est installé son père. Il est accueilli en héros. Commence alors pour Ossyane, malheureusement, un long et inexorable déclin. Une descente aux enfers. Arrivera-t-il à s’en sortir? Des fastes de l’Orient, aux drames de la guerre, aux moeurs surannées d’un autre temps, le roman nous entraîne dans une aventure extraordinaire où se mêlent le destin tragique d’un homme et l’histoire de toute une région. Un récit palpitant, déchirant, dont on ressort ébloui.
ii. Les désorientés – (2016)
Un roman splendide (520 pages) qui explore deux thèmes complexes et délicats: l’amitié et l’exil. Un groupe d’anciens amis, inséparables pendant leur jeunesse universitaire au Liban, se retrouve à Beyrouth après s’être perdus de vue pendant vingt ans. Ils sont réunis à l’occasion de la mort d’un de leurs camarades, Mourad. Ces anciens amis ont, pour la plupart, quitté le Liban pendant la guerre civile. Leur vie s’est construite ailleurs: à Paris, à Sao Paulo, à Amman, dans l’Indiana. Certains, par contre, sont restés au pays. Ont fait front. Ont combattu les milices. Ou sont entrés dans les ordres. Trajectoires diamétralement opposées. Après vingt ans, éparpillés aux quatre coins du monde, que reste-t-il de leurs convictions? De leurs idées de jeunesse? De leur idéalisme? Devant leurs camarades, ils doivent expliquer, justifier leurs choix. Un ouvrage admirable. Sur l’amitié qui, au fil des ans, des circonstances, évolue, fluctue, jusqu’à devenir, parfois, un lointain souvenir.
iii. – Le naufrage des civilisations – (2019)
Un essai magistral qui résume dans un premier temps les événements qui ont profondément secoué et transformé le Moyen-Orient entre 1948 et la guerre des « Six Jours » en 1967. Événements bien souvent oubliés aujourd’hui mais qui éclairent, expliquent la poudrière qu’est devenue la région depuis. Qui se souvient par exemple de l’assassinat, en 1948, du premier ministre égyptien suivi, en 1949, du meurtre du fondateur de la confrérie des Frères musulmans? Qui se rappelle du « grand incendie » du Caire qui met fin à la présence militaire britannique en Égypte et entraîne l’avènement de Nasser et du « panarabisme »? Se souvient-on que l’Irak était, à la même époque, une monarchie, dirigée par le roi Fayçal II, assassiné en 1958? Se rappelle-t-on enfin qu’entre 1958 et 1961, l’Egype et la Syrie (et brièvement le Yémen) formaient un seul et même état: la République arabe unie? Tous ces événements conjugués, écrit Amin Maalouf, et d’autres, comme l’échec du panarabisme qui visait à unifier les peuples arabes qu’ils soient Sunnites, Chiites, Juifs ou Chrétiens, « finiront par avoir des retombées dans le monde entier, du Sahara aux montagnes d’Afghanistan jusqu’aux tours jumelles new-yorkaises détruites par un commando ayant à sa tête un militant islamiste égyptien. »
Une remarquable leçon d’histoire qui se termine, dans un deuxième temps, par un double constat. Dans un monde hyper médiatisé, saturé de réseaux dits « sociaux », A. Maalouf constate « l’engourdissement » collectif de notre esprit critique. Et, plus inquiétant encore, il observe le manque de solidarité de nos sociétés contemporaines où chacun agite son drapeau, revendique son identité, sa différence, au détriment du bien et de projets communs. « Il y a aujourd’hui », conclut A. Maalouf, « de plus en plus de facteurs qui fragmentent et de moins en moins en moins de facteurs qui cimentent ». Précieuses réflexions, parmi tant d’autres.
Carte à l’extérieur d’un restaurant, dans la vieille ville du Puy-en-Velay, le samedi 20 avril.
Je vous laisse avec un aperçu de quelques-uns des plats savourés pendant mon (trop court) séjour au Puy-en-Velay.
Déjeuner, vendredi 19 avril, feuilleté de saumon fumé, suivi…… d’une escalope de dinde, accompagnée d’une sauce bordelaise au vin rouge, de riz, de purées de carottes et de brocoli.Déjeuner, samedi 20 avril, truite de mer et coulis de tomates, puis…… crépinette de lentilles du Puy au petit salé (morceaux de porc salés). Restaurant « Le Bilboquet », 52 Faubourg Saint-Jean, Le-Puy-en-Velay.
Nous voilà installés depuis quelques jours « chez nous », au bord de l’océan, à Essaouira, après une semaine splendide de voyage dans le sud du Maroc.
Beaucoup de chemin parcouru depuis notre départ de la palmeraie de Skoura, le 25 novembre. Ci-dessous…… une carte plus détaillée de la région du sud du Maroc où nous avons séjourné fin novembre. Nous étions basés à Zagora, dernière grande ville avant les dunes du Sahara et la frontière algérienne située à environ 40 km de M’HamidAperçus de la rue principale de Zagora…… le boulevard Mohammed V, la grande artère…… qui traverse la ville et mène, ci-dessus, au sud, vers Amezrou, Tamegroute et M’Hamid. À l’arrière-plan, l’édifice de la préfecture de la province de Zagora.Exemple d’une des ruelles (marchandes et résidentielles) typiques du centre-ville de Zagora
Après quatre heures de route depuis Skoura et une petite semaine devant nous avant le retour vers Marrakech, nous avons décidé de rayonner sagement autour de Zagora, et explorer la région, sans toutefois aller trop loin.
Nous avons préféré comme d’habitude privilégier notre proximité avec les gens, et les écouter, plutôt que parcourir chaque jour de longues distances sur les routes rectilignes et arides du grand sud…
Jeunes dromadaires en semi liberté entre Zagora et Tamegroute, le mercredi 29 novembre
Nous avons fait, je crois, le bon choix.
Nous avons ici beaucoup vu, entendu, goûté, appris!
C’est dans la région de Zagora (précisément à Sijilmâssa, ville située un peu plus au nord, aujourd’hui en ruines) qu’arrivaient et partaient autrefois les caravanes qui assuraient le commerce transsaharien entre les pays du Maghreb et l’Afrique subsaharienne.
Un commerce qui a duré plusieurs siècles.
Réplique du panneau emblématique qui accueillait jadis les voyageurs à Zagora. Le panneau est reproduit et visible un peu partout dans la ville.
Au départ de Tombouctou, direction nord, ces grandes caravanes transportaient de l’or, des étoffes de coton, des épices, du sel et surtout, malheureusement, des esclaves – esclaves requis, par centaines, par un monde musulman et des cités méditerranéennes en pleine expansion entre le Moyen-Âge et la Renaissance.
Du nord vers le sud, ces caravanes repartaient avec des chevaux, des dattes, des barres de cuivre, du verre, des perles, de la maroquinerie, des bracelets, des ustensiles en cuivre.
Ce négoce Nord-Sud a joué un rôle central dans la diffusion de l’islam en Afrique subsaharienne.
Villes et routes du commerce transsaharien à la fin du XVème siècle. De part et d’autre des flèches vertes, deux des plus importantes cités marchandes de ce commerce longtemps florissant: au sud, Tombouctou (aujourd’hui au Mali) et, au nord, Sijilmâssa, située à proximité de Zagora. Entre les deux, les mines de sel de Taghazza (dans l’actuelle Mauritanie).
Cela a été passionnant d’entendre à Zagora le détail de ces voyages dans le Sahara, voyages qui duraient plusieurs semaines. Les caravanes se déplaçaient le soir, la nuit et au petit matin afin d’éviter les 50 degrés de chaleur dans la journée. Elles avaient pour seuls repères, la nuit, les étoiles « que les nomades connaissent comme on lit un livre » nous a-t-on expliqué.
Autre technique d’orientation: l’odorat, très développé chez les caravaniers. Ils pouvaient, en quelques secondes, humer une poignée de sable et confirmer, simplement à l’odeur, au toucher, la direction à prendre.
J’ai trouvé ces récits absolument fascinants! Apprend-on encore aujourd’hui ce genre de choses aux enfants?
Tajine Makfoul, un plat de poulet (ou de dinde) accompagné d’olives, de tomates, d’oignons et de coriandre, servi brûlant. Une spécialité du sud marocain et un régal!
Entre deux conversations, nous avons aussi eu l’occasion d’observer à Zagora, le jeudi 30 novembre, l’une des nombreuses démonstrations organisées dans tout le pays par les enseignants marocains fermement opposés au nouveau statut que veut leur imposer le gouvernement.
Moha, la trentaine, enseignant de physique et chimie dans une école secondaire de la région de Zagora, présent à la manifestation du 30 novembre…… tenue, paisiblement, devant la préfecture de la province. Suite à leurs pressions et aux grèves, les enseignants ont eu gain de cause. Leur salaire sera bientôt majoré et leur nouveau statut, envisagé par le gouvernement, révisé. Un retour à la normale est en cours dans les écoles publiques.Aperçu du grand souk qui se tient à Zagora tous les dimanches et les mercredis. À noter: la grande majorité des clients…dans les souks sont des hommes…Les femmes, à moins d’être veuves ou divorcées, sont rarement présentes…Omelette berbère (oeufs, oignons, ail, coriandre, poivrons), un plat traditionnel, servi avec des olives et du pain, dans le sud du Maroc.Abdelhafi, chef cuisinier, la trentaine, père de deux enfants, a préparé avec talent plusieurs de nos repas à Zagora. Merci infiniment Abdelhafi!Vue partielle du jardin de notre hôtel, un havre de paix…… aux abords du centre-ville.
Nous avons aussi eu le temps de faire deux excursions pendant notre semaine à Zagora.
En route vers Amezrou, le mardi 28 novembre
La première nous a conduit, en petit taxi, dans le village fortifié (« ksar« ) d’Amezrou (aussi orthographié Amzrou), situé à 4 km, le long de la vallée du Drâa, au sud de Zagora.
Le village abritait jadis une importante communauté juive et on peut encore, avec un guide, visiter la synagogue, en partie restaurée.
Amzrou est réputé pour son artisanat, en particulier pour ses bijoux en argent, travaillés à la main et exposés dans la coopérative du village où on restaure également de magnifiques portes anciennes, en bois, sculptées, incrustées d’ivoire. Ouvrages de grande qualité.
En nous promenant dans les petites rues d’Amezrou, nous avons pu prendre toute la mesure de l’atmosphère très particulière qui règne dans le village.
Le temps est ici comme suspendu. Les traditions perdurent. Il y a partout dans le bourg des forgerons, des joailliers, des peintres, des menuisiers qui travaillent consciencieusement dans leurs ateliers. Une très belle communauté d’artisans.
Dans la lumière feutrée de la mi-journée, deux hommes devisent tranquillement…… sur un trottoir, dans le village d’Amezrou, le mardi 28 novembre…
Après notre visite d’Amezrou, la tête pleine d’images et d’informations, nous regagnons – à pied – notre hébergement à Zagora.
Une heure de marche sous un soleil éclatant.
Rencontres inattendues sur le chemin entre Amezrou…… et Zagora, le mardi 28 novembreLe lit de la rivière Drâa, sur la droite, complètement à sec, lui aussi, tout comme l’oued de la palmeraie de Skoura, quelques jours plus tôt. Le changement climatique fait des ravages dans le sud du Maroc…et la vallée du Drâa, ci-dessus, autrefois verdoyante, a terriblement soif. Quand donc arrivera la pluie?
Dernière excursion, en grand taxi cette fois, jusqu’au village de Tamegroute, situé à environ 20 km au sud de Zagora.
Les mythiques grands taxis Mercedes d’autrefois, jugés trop vieux et polluants, ont peu à peu été remplacés au Maroc par des voitures (de marque Lodgy) qui peuvent transporter jusqu’à six passagers. Ci-dessus, une station de grand taxi à Zagora.
Après une trentaine de minutes…
Arrivée au village de Tamegroute…le mercredi 29 novembre…
Pourquoi venons-nous jusqu’ici?
Tamegroute est l’un des hauts lieux du savoir du Royaume du Maroc. Le village abrite une bibliothèque fondée au 17è siècle, riche de 4000 ouvrages. Sur les tablettes, des manuscrits rares, anciens, en peau de gazelle, écrits à la plume de roseau. Des ouvrages de théologie, d’histoire, de médecine, d’astronomie, de poésie, de droit coranique, de philosophie, toutes les disciplines sont représentées. Aucune photo n’est autorisée.
Dans la pièce principale, entouré de ces trésors, nous chuchotons et marchons sur la pointe des pieds.
Rachid est le conservateur de la bibliothèque de Tamegroute.
Quelle incroyable richesse dans ce petit village situé aux portes du désert!
Nous quittons Tamegroute, inspirés, en début d’après-midi, le mercredi 29 novembre pour…… les cafés et l’urbanité (toute relative) de Zagora…
Après une semaine passée dans la province de Zagora, nous repartons, en bus cette fois – via Ouarzazate – pour Marrakech.
Sept heures sur une route vertigineuse qui serpente au milieu de paysages magnifiques, dans le Haut-Atlas!
Entre Zagora et Marrakech, le vendredi 1er décembre, quelques kilomètres avant de franchir le col du Tizi-N-Tichka (2260 mètres). Une journée inoubliable de voyage.Village du Haut-Atlas entre Ouarzazate et Marrakech
Nous ne sommes que de passage à Marrakech. Essaouira, sur la côte atlantique, nous appelle!…
Nous en profitons pour découvrir un quartier que nous ne connaissons pas, « Bab Doukkala ». (Bab = porte en arabe.)
Clients achetant leur pain à Bab Doukkala, secteur situé à Marrakech entre la nouvelle ville, Guéliz…… et la médina…… le samedi 2 décembre…Comme d’habitude, les terrasses des cafés de Marrakech (ci-dessus près de la médina) sont pleins de monde…
Nous quittons « la ville ocre » après deux jours, comme prévu, pour Essaouira, sur la côte atlantique. Un trajet d’environ deux heures trente, en voiture, sans histoires.
Aperçu de la longue plage d’Essaouira où il fait un temps splendide depuis notre arrivée, le lundi 4 décembre. À l’arrière-plan, l’île de Mogador, devenue aujourd’hui une réserve naturelle, protégée, d’oiseaux marins…… au nord de la plage, sur la droite, les bâtiments blancs de la médina, l’ancienne ville, où nous avons loué un riad, une habitation traditionnelle. Diana aura sa cuisine.Notre riad (ci-dessus, tôt le matin) est doté d’une haute terrasse qui surplombe l’océan…
Nous allons vivre ici, simplement, au soleil, pendant un mois.
Objectif: profiter de la douceur de vivre au Maroc.
En faisant, régulièrement, quelques excursions à l’extérieur d’Essaouira…
La plage du petit village berbère de Sidi Kaouki, situé…… à une vingtaine de kilomètres au sud d’Essaouira. Pas de surfeurs ce matin-là. Seuls quelques dromadaires déambulent sur la plage…… Sidi Kaouki, où…… dans une charmante auberge…… un peu à l’écart du village…… nous avons dégusté, sur la terrasse, servi par Larbi, 73 ans…… l’un des meilleurs tajines aux légumes de notre séjour au Maroc! Un régal!
Nous retrouvons, le lendemain, au petit matin…
… la promenade du bord de mer d’Essaouira…… puis l’agitation et l’effervescence du port de pêche, l’un des plus importants au Maroc. On pêche ici les sardines, le merlan, la sole, la daurade…Longtemps surnommé « le port de Tombouctou« , le port d’Essaouira était autrefois un point de rencontre et de commerce avec les caravanes, venant du sud…… on échangeait ici de l’or, des épices, des esclaves…
Essaouira a longtemps été, au 16è-17è siècles, occupée par les Portugais…
Ils ont laissé derrière eux, près du port, des remparts, quelques canons…
Vue partielle des remparts qui surplombent l’océan
Nous continuons, après le port, vers le tohu-bohu de la médina…
Ci-dessus, « Bab Doukkala », l’une des portes principales…de l’ancienne ville…où le commerce et les échanges débutent dès le lever du jour…
… la médina d’Essaouira, classée depuis 2001 au patrimoine mondial de l’UNESCO, où l’on croise, en quelques pas…
bouchers…marchands de pain…troubadours venus d’un autre temps…poissonniers, découpant (ci-dessus) d’énormes quartiers de thon…ou désossant, pour les clients, des sardines toutes fraîches…
La médina d’Essaouira, une vraie ruche, où travaillent et cohabitent, paisiblement…
des tailleurs et marchands de tissus, comme Hakim, ci-dessus…… des « tourneurs » de thuya, comme Abdellah qui travaille, avec le sourire, le bois, dans son petit atelier, depuis plus de trente ans… Bonne continuation et merci Abdellah!Carte des plats de poissons offerts dans les petits restaurants du port d’Essaouira, à la mi-décembre. 20 dirhams = CAN$ 2.70 ou 1.80 euros.Tajine au poulet, Essaouira, décembre 2024
Nous avons dû, malheureusement, pour des raisons familiales, abréger notre séjour au Maroc, quitter Essaouira à la hâte, et revenir au Canada…
Joyeuses Fêtes à tous, malgré tout!
Prenez bien soin de vous!
Soyez en paix.
Où est le ballon?…. Regardez, tout en haut…Dromadaires au repos sur la plage d’Essaouira. À l’horizon, l’île de Mogador.
Semaine pleine d’enseignements passée dans la région de Skoura!
Au pied de la chaîne de montagnes du Haut-Atlas, un homme se promène dans la palmeraie de Skoura, le mardi 21 novembre, en matinée. Il n’a pas plu dans cette région du sud du Maroc depuis le mois de février…La petite ville de Skoura, au centre de la carte, située à cinq heures de route environ au sud de Marrakech et à 40 kilomètres au nord-est de Ouarzazate. Nous passons une semaine à explorer la région autour de Skoura avant de poursuivre notre route vers Zagora, au sud.Un des carrefours du centre de Skoura et, ci-dessous…La rue principale du centre-ville, vers midi, le mardi 21 novembre.
30 000 habitants environ vivent paisiblement à Skoura.
Berbères – la première communauté à s’établir dans la région – et Arabes font ici bon ménage, depuis bien longtemps.
La ville est tranquille, sans histoires. Une petite population juive vivait aussi ici autrefois.
Un grand souk a lieu dans la ville tous les lundis. On y trouve de tout, fruits, légumes, matériel de construction, tissus, quincaillerie…. Certains marchands viennent d’Agadir vendre leurs produits.Un marché d’animaux se tient également en annexe au souk du lundi. Les pourparlers et marchandages autour des chèvres, des brebis et des boucs ont lieu dans une atmosphère calme et feutrée…
Quelques remarques, avant d’aller plus loin.
Le voyage a le grand mérite de clarifier le regard qu’on porte sur sa propre communauté.
En arrivant dans le sud du Maroc, en provenance d’une grande métropole, plusieurs détails, fondamentaux, sautent aux yeux lorsqu’on se promène et qu’on découvre une petite ville comme Skoura.
Il n’y a pas ici de sans-abris, ni de banque alimentaire. Selon le principe de la « Zakât » (la charité, l’un des piliers de l’islam), tout le monde au village mange à sa faim. Malgré la pauvreté de la majorité des habitants. La solidarité est exemplaire.
Les congélateurs étant rares, les gens consomment au jour le jour uniquement ce dont ils ont besoin. Pas plus.
Le grand souk, le lundi, tient lieu de grande surface. Le supermarché le plus proche est à Ouarzazate, à 40 kilomètres.
Les femmes marocaines que nous avons rencontrées dans la communauté et à qui nous avons parlé nous ont confié qu’elles circulaient sans crainte dans la ville et dans la palmeraie, même le soir. Les agressions sont rares. Et lorsqu’elles surviennent, très sévèrement sanctionnées.
La plupart des nombreux jeunes que nous avons croisés ne possèdent pas de téléphone portable. Et n’ont pas trop l’air d’en souffrir. Ils se parlent. Rient. Jouent ensemble.
Rares sont les adultes qui possèdent un téléphone dit « intelligent ».
On se salue plutôt ici, fraternellement, dans la rue: « Salam » (bonjour), « Marhba » (bienvenue), « Choukran » (merci), « Bsslama » (au revoir). Gestes de politesse essentiels, répétés plusieurs fois par jour, qui font du bien à tout le monde, aux plus jeunes comme aux plus vieux.
Ces quelques facteurs conjugués contribuent (selon moi) à nourrir le climat social très apaisé dans lequel nous avons vécu ici pendant toute la semaine.
Diana, après notre déjeuner, le samedi 18 novembre, à Ouarzazate, entre Marrakech et Skoura, en compagnie de notre chauffeur (et excellent guide!)
Revenons maintenant à Skoura…
Habitation typique de la région de Skoura. Ces maisons sont construites en « pisé« , un mélange d’argile et de paille, préparé de façon traditionnelle. Le « pisé » est ensuite posé sur une structure de briques ou de bois. La technique du pisé date de plusieurs siècles.
La population du bourg est répartie dans deux secteurs bien distincts. D’un côté, Skoura-ville (ou Skoura centre) où sont regroupés les principaux commerces.
De l’autre côté, la palmeraie de Skoura, immense, 50 km², l’une des rares palmeraies du Maroc encore habitée et cultivée…
Une petite route de 2 kilomètres relie le centre de Skoura à la palmeraie…
Le contraste entre le centre-ville de Skoura et la palmeraie est saisissant!
C’est dans la palmeraie que vit la majorité de la population.
Au sud de la palmeraie, une femme accompagnée de deux enfants…converse, avec les mains et les yeux, avec Diana, le jeudi 23 novembre. Les écoles publiques sont toujours en grève cette semaine au Maroc (comme au Québec!) et les enfants, malheureusement, souvent laissés à eux-mêmes ou sous la garde de leurs grands-parents…
Et c’est dans la palmeraie bien sûr que nous avons passé le plus clair de notre temps!
Un groupe de jeunes travailleurs profite d’un bref moment de repos lors de la fabrication de briques, briques qu’on aperçoit, à l’arrière-plan, séchant au soleil.Dans la palmeraie aussi les maisons sont construites en « pisé ». Certaines structures, comme celle ci-dessoussont beaucoup plus élaborées! Ces bâtiments, construits en pisé il y a plus d’un siècle, ont pour la plupart résisté au tremblement de terre du 8 septembre…
Nous avons été hébergés ici pendant une semaine dans une résidence somptueuse (et abordable) gérée par la même famille depuis bientôt vingt ans…
Notre pied-à-terre…… au coeur de la palmeraie de Skoura… avec Kader, ci-dessus, enfant du pays, devant un délicieux tajine et de l’huile d’olives produite sur le domaine. Sur les olives, SVP voir plus bas.Le massif du Haut-Atlas à l’horizon, vu de la terrasse de notre hébergement
Résidence où nous avons été dorlotés, chouchoutés, presque comme des membres de la famille!
Mais nous n’avons pas chômé pendant notre séjour!
Car nous sommes arrivés à Skoura en pleine de saison de récolte!
Partout, dans la palmeraie, en octobre et novembre, les habitants se relaient au pied des palmiers et des oliviers afin de récolter et de commercialiser dattes et olives – deux denrées dont dépend l’économie de la région.
Nous avons appris qu’il existe deux types de palmiers. Les palmiers mâles et les palmiers femelles. Les mâles produisent le pollen…tandis que les palmiers femelles donnent les dattes… qui se balancent à Skoura, en grappes, au soleil, au milieu des chemins de terre de la palmeraieMohammed, 74 ans, au pied d’un palmier, après la collecte, le dimanche 19 novembre
La récolte des olives, elle, est beaucoup plus délicate et chronophage…
Hommes et femmes se pressent dès le petit matin dans les oliveraies de la palmeraie. Diana, sur la droite, participe également à la cueillette des olives…qu’on récolte ici dans de grandes bâches posées au sol.
Dans le domaine où nous logeons, on s’affaire également. La résidence compte plus de 250 oliviers.
Et on ne badine pas avec la récolte qui s’annonce.
Le mardi 21 novembre au matin, nous nous portons volontaires pour participer à une grande opération!
1. – Transporter les bacs d’olives, cueillies dans la propriété…2. – Et les charger sur un des camions de la résidence.
À bord du camion, nous nous dirigeons vers l’un des pressoirs de Skoura où les olives sont tour à tour…
3. – pesées soigneusement4. – puis acheminées sur un treillis afin d’être…5. – nettoyées, lavées puis broyées…6. – avant que le précieux liquide soit recueilli dans des bidons…
361 kilos d’olives ont donné ce jour-là environ 45 litres d’huile d’olives.
« La production totale d’huile d’olives a été réduite de moitié par rapport à l’an dernier« , nous a-t-on précisé. En cause: la sécheresse qui sévit depuis plusieurs mois dans le sud du Maroc.
Diana, dans palmeraie, jeudi matin
Longue balade en vélo dans la palmeraie le jeudi 23 novembre
Nous allons ce jour-là visiter l’un des monuments les plus connus du Maroc: la Kasbah Amridil, située à la pointe sud de la palmeraie.
La Kasbah Amridil, ci-dessus, est une véritable institution au pays. La Kasbah figurait autrefois sur les billets de 50 dirhams marocains. Malgré quelques fissures, la structure, en pisé, a résisté au séisme du 8 septembre.
Construite à la fin du 17è siècle, la Kasbah (maison fortifiée) Amridil a d’abord été une école coranique puis un centre administratif et enfin un tribunal. Sa fonction principale a longtemps été l’enseignement et la promotion dans la communauté des 5 piliers de l’islam:
la Shahada (la foi)
la Zakât (l’aumône, la charité envers le prochain) ;
le pèlerinage à La Mecque (si on le peut)
le jeûne (du mois de Ramadan) ;
la prière (qui doit être faite cinq fois par jour)
Nous avons vraiment beaucoup appris pendant notre visite!
De profondes fissures sont visibles sur la façade d’une maison dans la palmeraie de Skoura
Deux derniers mots:
J’aimerais comme plusieurs autres saluer la réponse exemplaire du gouvernement marocain suite au violent séisme du 8 septembre. Très vite, partout au pays, les secours se sont organisés afin de venir en aide aux régions touchées. Couvertures, nourriture, médicaments, vêtements, tentes, la population entière s’est mobilisée afin d’acheminer des vivres aux villageois piégés, meurtris et isolés dans les montagnes du Haut-Atlas, au sud-ouest de Marrakech. Le sauvetage des enfants a été prioritaire. Bravo au Maroc!
La région de Skoura n’a malheureusement pas été épargnée. Plusieurs bâtisses ici se sont effondrées…
Une des nombreuses tentes érigées dans la palmeraie de Skoura afin d’abriter les familles touchées par le séisme
Enfin… Notre séjour à Skoura aurait été bien différent si nous n’avions pas eu à nos côtés, toute la semaine, un couple chaleureux, exceptionnel, visionnaire…
Catherine
Catherine, avec le sourire, comme d’habitude, marchandant joyeusement lundi, au milieu du souk, l’achat de deux poulets pour la basse-cour de notre résidence. Je suis reparti du souk avec les deux poulets sous le bras, empaquetés dans une boîte en carton. Prix par poulet: 7 dirhams (environ 7 euros ou Can$9.50)
et Philippe
Rentrée à la résidence à la tombée du jour, le lundi 20 novembre, après une longue marche et une conversation à bâtons rompus avec Philippe, fervent partisan d’un monde responsable, équitable et écologique. Sur la photo ci-dessus, nous sommes à quelques dizaines de mètres du lit de « l’oued » (la rivière) qui longeait autrefois la palmeraie. « Il y a dix ans, en hiver, il était parfois difficile ici de franchir la rivière tant le courant était fort et le débit élevé » m’a confié Philippe. L’oued est cette année, malheureusement, complètement sec. Le changement climatique frappe aujourd’hui de plein fouet le Maroc.
À tous les deux, un immense merci!
Diana a beaucoup apprécié apprendre pendant son séjour de nouvelles recettes et techniques de cuisine marocaine. Ci-dessus, un plat de légumes du jardin accompagné de « keftas » et de pâtes à l’huile d’olives et pasata.
Tout va bien dans le sud du Maroc.
Nous reprenons la route ce samedi, plein sud, vers Zagora.
Dans le contexte, très particulier, du puissant tremblement de terre qui a frappé le pays, le 8 septembre, grande émotion de retrouver cette semaine, sous le soleil, le Maroc!
Soulagement aussi.
Le lendemain de notre arrivée à Marrakech, Diana (encore en décalage horaire) devant le minaret de la mosquée Koutoubia, l’un des monuments emblématiques de la ville. Le minaret, construit au 12è siècle, a malheureusement été endommagé lors du séisme du 8 septembre, il est aujourd’hui fragilisé.
Malgré les messages échangés avec nos hôtes et les informations diffusées depuis le séisme, nous ne savions pas trop à quoi nous attendre en débarquant à Marrakech.
Dans quel état allions-nous retrouver la ville et ses habitants?
Dans quelle atmosphère et dans quelles conditions serions-nous reçus?
Nous avons, heureusement, vite été rassurés.
À quelques pas de l’entrée de la médina de Marrakech, le jour de notre arrivée, le mardi 14 novembre.Fatima et Rachida servent le matin avec le sourire…le petit déjeuner sur la terrasse de notre petit hôtel de famille, situé au coeur de la médina
Deux mois après le tremblement de terre, la vie a repris à Marrakech et les habitants nous ont offert, toute la semaine, une belle leçon de résilience!
Scènes typiques de la médina de Marrakech, rue Bani Marine…le jeudi 16 novembre
Tout le monde, ou presque, semble-t-il, travaille dans la véritable ruche qu’est devenue la médina. Tout le monde met la main à la pâte afin de relever la ville, remettre la communauté sur pied, préparer l’avenir.
Personne ne se plaint. Tous les Marocains que nous avons rencontrés marchent, fiers, la tête haute.
Ils veulent « vivre de leur commerce« , nous disent-ils. Ne dépendre que de leur labeur. Ils veulent donner l’exemple.
Nous avons été impressionnés, par leur courage, leur détermination. Quelle belle leçon!
Un petit marché, non loin du « Mellah », l’ancien quartier juif de la ville et, historiquement, l’un des plus pauvres, situé au sud de la médina. SVP voir la carte ci-dessous.
Cependant, malgré l’affluence dans les souks et les boutiques de la médina, la ville est calme. Soucieuse. En convalescence.
Après la tragédie du 8 septembre, Marrakech panse encore ses plaies, ses cicatrices.
Chacun se souvient et partage, à voix basse, le récit de ce qu’il ou elle a vécu cette nuit-là, autour de 23h10, lorsque la terre a tremblé.
La cité, on le voit dans le regard de certains habitants, est toujours sous le choc du séisme et se remet, lentement.
Marrakech est dans l’attente, appréhensive, craintive qu’une nouvelle réplique vienne encore frapper – beaucoup plus fort cette fois.
Plusieurs bâtisses ici, situées notamment dans le pourtour du « Mellah », au sud de la médina, ont été touchées et se sont effondrées.
Quarante-huit personnes ont perdu leur vie à Marrakech, la nuit du 8 septembre.
La carte de la médina de Marrakech, le coeur historique de la ville. Au centre, la place Jemaa-el-Fna. Au sud, souligné en noir, le « Mellah », l’ancien quartier juif. À l’extérieur de la médina, à l’ouest, Guéliz, « la nouvelle ville », le quartier moderne, plus aisé.Ruelle du « Mellah », le jeudi 16 novembre, l’un des quartiers les plus touchés par le tremblement de terre. On aperçoit sur la droite, les gravats d’un immeuble qui s’est écroulé.Dans le secteur sud de la médina, la rue Riad Zitoun El Jdid, l‘une des ruelles principales menant au Mellah…L’avenue Houman el Fetouaki qui longe la médina, le jeudi 16 novembre
Il y a ces jours-ci, pour la majorité des parents au Maroc, un autre sujet d’inquiétude: la grogne des enseignants, dans le secteur public, de nouveau en grève.
Les écoles ont été fermées trois jours cette semaine. Une énième grève depuis un an. Motif? Les professeurs contestent le nouveau statut que veut leur imposer le gouvernement.
Activités parascolaires, recrutement, évaluation, rémunération des enseignants, formation continue, les sujets de discorde ne manquent pas entre les deux parties. Le ministère et les syndicats se renvoient la balle depuis plusieurs mois. Entre temps, les élèves inscrits dans le public, sont laissés à eux-mêmes. Et les parents, désemparés.
À noter, la grève des enseignants ne touche pas le secteur privé…
Symbole d’une société à deux vitesses? Des écoliers, inscrits dans une institution privée, en excursion dans un parc de Marrakech, accompagnés de parents et d’enseignants, le mercredi 15 novembreTajine aux légumes, rue Bani Marine, Marrakech (médina), le mardi 14 novembre
Le soleil, lui, est bien au rendez-vous à Marrakech!
Trente degrés à notre arrivée, mardi, et chaque jour, à l’heure du déjeuner, le thermomètre grimpe un peu plus, 31 degrés mercredi, 32 jeudi! Pour notre plus grand bonheur et celui des « Marrakchis » qui se pressent, nombreux, dans les espaces verts et aux terrasses des cafés…
Aperçu d’une des terrasses légendaires de la médina de Marrakech, La Brasserie du Glacier, le jeudi 16 novembre. Les visiteurs du monde entier sont de retour à Marrakech! En fait, depuis le 8 septembre, ils n’ont jamais vraiment quitté la ville…Demain samedi, direction Ouarzazate puis Skoura…
Nous partons demain pour notre deuxième halte, la palmeraie de Skoura, située à cinq heures trente de route environ, au sud-est de Marrakech.
Une route de montagne relie Marrakech aux villages du Haut Atlas. La route file ensuite, direction sud-est, vers Ouarzazate et Zagora, une des portes d’entrée du désert du Sahara. La palmeraie de Skoura est située à environ 40 km au nord de Ouarzazate.
Une fois n’est pas coutume, nous avons décidé, vu les circonstances, de louer une voiture avec chauffeur pour nous emmener à Skoura. Départ prévu à 10h.
Tout va bien.
Nous sommes vraiment heureux d’avoir retrouvé le Maroc!
Juillet 1988, premier voyage au Maroc. Après des haltes à Tanger, Asilah, Fès et dans le village de montagne de Azrou (au sud de Fès), je poursuis ma route vers Marrakech et Agadir. SVP voir les cartes ci-dessous.Quelques semaines plus tard, en août 1988, sur les remparts de l’ancienne cité fortifiée de El Jadida, sur la côte atlantique.
Comment exprimer notre solidarité envers le peuple marocain – et lui venir en aide – après le tragique tremblement de terre qui a secoué, le 8 septembre, le centre du pays ?
C’est la question que nous nous sommes posée à Vancouver dès la diffusion des premières images du séisme, survenu dans une région, au sud-ouest de Marrakech, que nous connaissons et où nous avions l’intention de retourner cet automne.
Depuis plusieurs mois déjà, nous étions en mode planification pour un nouveau voyage au Maroc – un quatrième séjour au « Royaume » pour moi, un second pour Diana.
Une longue histoire d’amour avec un pays accueillant, chaleureux, où je me suis souvent senti presque comme chez moi.
Aux abords de la Place Jemaa el-Fna, à Marrakech, en décembre 2007. Photo: Diana
Après mes années d’études à Montréal (McGill) et à Vancouver (UBC), le Maroc (avec l’Espagne et le Portugal) a été l’une de mes toutes premières destinations de voyage lorsque j’ai enfin rejoint, comme enseignant, le marché du travail.
J’avais finalement quelques sous en poche, un emploi stable, utile, passionnant – et de quoi voyager, l’été.
Je me rappellerai toujours mon arrivée, en juillet 1988, dans la médina de Tanger, émerveillé, après avoir traversé la Méditerranée, en bateau, depuis Algeciras. (Les traversiers en provenance de l’Espagne arrivaient à ce moment-là directement au port de Tanger, situé juste en-dessous de la médina, la vieille ville).
Les ruelles de la médina étaient pleines de monde, les cafés, bondés, un chameau égaré se promenait près des boutiques du « Petit Socco », personne n’y prêtait attention, il y avait partout un brouhaha indescriptible, une clameur venant des souks. Un vendeur d’eau fraîche, lourdement vêtu de laine rouge, serviette et gobelets d’argent à la main, un chapeau de paille sur la tête, zigzaguait devant moi, en haranguant la foule, à la recherche de clients…
J’ai posé mon sac à l’extérieur d’un café. Ai pris une table. Très vite, avec un grand sourire, on m’a servi du thé à la menthe, brûlant. Autour de moi, des rires, des palabres. Je passais complètement inaperçu.
Je n’ai jamais oublié ce spectacle ni ces premières heures à Tanger! J’étais fasciné. L’Europe, que je venais à peine de quitter, était si loin!
C’est à ce moment-là, je crois, lors de ces premiers pas au Maroc, que j’ai attrapé une maladie, devenue, depuis, incurable: le virus du voyage.
Soulignées en bleu, les principales étapes de mon voyage au Maroc, en 1988. En vert, le parcours (avec Diana) d’un second séjour, en 2007. En rouge, quelques-unes des haltes d’un troisième périple, de Tanger à Tétouan à Chefchaouen dans les montagnes du Rif, en 2012, pour marquer le début de ma retraite.
Début septembre donc, tout était prêt pour ce quatrième voyage. Nos hébergements, réservés. Nos billets d’avion, confirmés. Départ pour Marrakech le 13 novembre, retour le 10 janvier. Un séjour de deux mois. Notre itinéraire devait cette fois nous emmener jusqu’aux portes du Sahara.
Soulignées en bleu, les étapes du parcours prévu cet automne/hiver. Après Marrakech, cap sud-est, via Ouarzazate, vers la palmeraie de Skoura avant de rejoindre, fin novembre, Zagora. Retour ensuite sur la côte atlantique pour un longue halte (un mois) dans un riad dans la médina de Essaouira.
Lors de notre précédent séjour, en 2007, nous avions passé plusieurs jours dans la ville et la province de Taroudant, situées juste au sud de l’épicentre du récent tremblement de terre. Nous avions aussi cette année-là (déjà) séjourné à Marrakech puis à Essaouira.
Décembre 2007, premier séjour au Maroc pour Diana, ci-dessus, dans l’atelier d’un sculpteur de pierre, dans un village de montagne, au sud de Taroudant.
De ce voyage, en 2007, nous n’avons gardé que d’excellents souvenirs.
La gentillesse, l’hospitalité marocaine. Les randonnées avec un guide dans les villages reculés du Haut Atlas. Le marché animé de Taroudant.
Nous nous étions presque partout déplacés en « grand taxi », entassés à six dans ces vieilles Mercedes qui parcourent le pays pour trois fois rien, à une vitesse folle, la sono poussée à fond. « Inch Allah, mon frère! », murmuraient les passagers, en se cramponnant aux sièges.
Autre souvenir? La cuisine marocaine. En plus des délicieux tajines, après toutes ces années, Diana a encore sur le bout de la langue le goût sucré des «msemem », les délicates crêpes feuilletées, enrobées de miel, servies le matin avec le café et de la confiture d’abricots.
Petit-déjeuner sur la terrasse de notre modeste hôtel, à Marrakech, en décembre 2007.
Et voilà que cette région que nous avions tant appréciée était violemment touchée, mutilée. Le dernier bilan du séisme du 8 septembre fait état de 3000 morts, plus de 5000 blessés. 50 000 habitations ont été détruites.
Que devions-nous faire? Que pouvions-nous faire?
Vu l’ampleur du séisme, fallait-il annuler notre voyage?
Quelle était la situation sur le terrain?
Afin d’y voir plus clair, nous avons décidé à la mi-septembre de prendre contact avec chacun des établissements où nous devions loger. Et nous avons rapidement reçu une réponse – presqu’un cri – la même, partout, unanime.
« Ce n’est pas le moment de laisser tomber le Maroc. Nous avons besoin de vous. Venez! »
Voici deux extraits des missives que nous avons reçues.
Marrakech, le 11 septembre
« Bonjour,
Vu le nombre de messages que je reçois, je suis navré de ne pas répondre à chacun de vous, personnellement, alors j’envoie le même message à vous tous, chers clients.
Merci infiniment pour vos messages d’inquiétude, votre soutien et vos chaleureux sentiments! Je vous rassure que toute notre équipe est saine et sauve ainsi que tous les membres de nos familles! Je vous confirme que votre réservation est maintenue! Au plaisir de vous accueillir très prochainement. »
Très cordialement,
Monsieur Saïd
*******
Skoura, le 18 septembre
Bonjour Max et Diana,
Merci de prendre des nouvelles de l’équipe. Skoura à été touchée par le séisme, mais aucun blessé n’est compté à ce jour. Beaucoup de maisons traditionnelles (construites en pisé) sont abîmées, et certaines familles doivent être relogées.
Nos constructions sont antisismiques. La structure des bâtiments n’a pas été touchée. Malgré tout, nous avons beaucoup d’éléments de décorations cassés, quelques fissures à réparer et le plâtre à refaire. Mais, nous restons ouverts, et nous pouvons vous accueillir en toute sécurité. Votre séjour est confirmé. »
Nicolas
Même son de cloche à Zagora et à Essaouira.
Le message était clair. Les gens avaient besoin de nous. De notre contribution. Ce n’était pas le moment d’annuler.
Comme le précisait dans la presse un résident de Marrakech, quelques semaines après le séisme: « Dès qu’un groupe annule son voyage, ce sont 10 à 20 personnes, guide, muletier, transporteur, artisans, employés, qui n’ont plus de revenus. Comment vont-ils nourrir leurs familles?
Nous avons donc décidé, dans une démarche humanitaire, solidaire, inattendue, de maintenir notre voyage.
Nous savons que ce séjour de deux mois ne ressemblera pas aux précédents – le nouveau contexte politique au Moyen-Orient, depuis les événements du 7 octobre, venant encore complexifier la situation.
Mais nous partons, confiants.
Nous serons, bien sûr, hyper prudents.
Inch Allah!
Diana, entourée sur la place Jemaa el-Fna à Marrakech, en janvier 2008.
Voici donc le calendrier de notre périple, pour les deux prochains mois.
13 -14 novembre = Vancouver – Francfort – Marrakech
14 – 18 novembre = Marrakech
18 – 25 novembre = Palmeraie de Skoura
25 novembre – 1er décembre = Zagora
1er – 4 décembre = Marrakech
4 décembre – 4 janvier = Essaouira
4 – 9 janvier = Marrakech
9 -10 janvier = Marrakech – Francfort – Vancouver
Sur le campus de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) lors d’une randonnée en vélo en septembre.Avec l’un de mes partenaires de squash, au « Vancouver Racquets Club » – le court de UBC étant dorénavant fermé. Parties endiablées plusieurs fois par semaine…
Notes de lecture:
Roland Brival, Les fleurs rouges du flamboyant – (Paris, 2018)
Un roman magnifique, bouleversant. Le retour inattendu au pays natal, en Martinique, d’un écrivain, Simon Darnell, exilé en France depuis 20 ans. Que se cache-t-il derrière ce retour? Que vient donc chercher sur l’île Simon, se demandent les membres de sa famille, oncles, tantes qui n’ont jamais, eux, quitté le pays?
On apprend au fil des pages que l’écrivain est de retour afin de résoudre un douloureux mystère. Connaître – enfin – l’identité de son père. Un lourd secret de famille, bien gardé. Le roman nous plonge, dans un premier temps, dans le passé et la période insouciante de l’enfance, des vacances au bord de la mer. Puis vient l’adolescence. Face au scandale provoqué par la naissance de cet enfant bâtard, le jeune homme doit quitter l’île, sa famille, ses amis, et va rejoindre sa mère, partie plus tôt, dans une banlieue grise et anonyme de Paris. Il découvre là-bas un autre monde. Déterminé, adulte, à percer enfin ce secret de famille, l’écrivain réussit, à Fort-de-France, dans les dernières pages du roman, à retrouver son père. Un roman magistralement écrit, tout comme « Nègre de Personne » (2016) dont j’ai parlé icidans Notes de lecture. L’un des mes écrivains préférés.
Bernard Pivot, Le métier de lire – (Paris, 2018)
Un petit livre truffé de souvenirs et d’anecdotes qui nous emmène dans les coulisses de deux émissions littéraires phares de la télévision française: « Apostrophes » (1975-1990) et « Bouillon de culture » (1991-2001), programmes cultes, animés par Bernard Pivot.
Pendant vingt-cinq ans, des centaines d’écrivains français et étrangers ont répondu, souvent avec verve et panache, aux questions fécondes de Bernard Pivot. Ces entretiens, diffusés généralement le vendredi soir, ont eu un énorme retentissement. Le samedi, les lecteurs, un peu partout en France et dans la francophonie, assaillaient les libraires, réclamant avec impatience les ouvrages dont on avait parlé la veille. La formule est ici renversée. En répondant – par écrit – aux questions de Pierre Nora, Bernard Pivot revient avec malice, intelligence et humour sur les grands et petits moments de ces deux émissions, mythiques, qui ont marqué l’histoire du petit écran et de tout un pays.
Leïla Slimani, Le diable est dans les détails – (Paris, 2017)
Six nouvelles, « six petits bijoux« , d’une écrivaine, née au Maroc, de parents « qui aimaient Voltaire et les Lumières. » Six textes, courts, mordants, écrits « dans l’urgence et la rage », au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, à Paris.
Leïla Slimani pourfend dans ce recueil les ayatollahs et les intégristes de tout poil qui n’hésitent pas, au nom du prophète, à tuer, à détruire, à interdire, à lapider des femmes. J’ai lu ces nouvelles avec l’impression d’avoir une grenade logée au creux de la main, grenade qui peut exploser à tout moment. Forte et intense expérience de lecture. Un authentique appel à la mobilisation, à l’engagement citoyen.
Voici un extrait d’un des textes. « Moi, née musulmane, Marocaine et Française, je vous le dis (…) Paris est ma patrie depuis le jour où je m’y suis installée. C’est là que je suis devenue une femme libre, là que j’ai aimé, que j’ai été ivre, que j’ai connu la joie, que j’ai eu accès à l’art, à la musique, à la beauté (…) Paris est tout ce que vous haïssez. Un mélange sensuel et délicieux de langues, de peaux et de religions. Paris où l’on s’embrasse à pleine bouche sur les bancs (…) Cette nuit, nos théâtres, nos musées, nos bibliothèques sont fermées. Mais demain ils ouvriront à nouveau et c’est nous, enfants de la patrie, mécréants, infidèles, simples flâneurs, adorateurs d’idoles, buveurs de bière, libertins, humanistes, qui écriront l’histoire. » Merci, Leïla Slimani. À noter, l’avant-propos du recueil, lumineux, rédigé par Éric Fottorino.
Grand bonheur de revoir ma soeur, Marie-Hélène, venue de Montréal nous rendre visite à Vancouver, il y a quelques jours. Ci-dessus, au parc Sunnyside, dans le quartier Kensington-Cedar Cottage.Restaurant végétarien Po Kong, Kingsway, Vancouver, octobre 2023.