Une heure à Vancouver avec Dany Laferrière

À peine rentré, le 31 mai, d’un voyage en Polynésie française, une magnifique surprise m’attend à la maison!

Radio-Canada m’invite à participer à une grande entrevue (radio) avec Dany Laferrière, de passage à Vancouver.

L’écrivain et académicien, né en Haïti, doit recevoir, le mercredi 7 juin, un doctorat honorifique de l’Université Simon Fraser (SFU).

J’accepte l’invitation, bien sûr! Après un mois aux îles Australes, quelle meilleure façon de retrouver Vancouver et, en même temps, l’accent, la verve, la poésie d’Haïti?

L’entrevue est programmée pour le jeudi 8 juin, à 14h, dans les studios de CBUF-FM, l’antenne de Radio-Canada en Colombie-Britannique. Radio où j’ai eu le bonheur et le privilège de travailler autrefois, peu de temps après mon arrivée sur la côte ouest.

L’entretien doit être diffusé deux jours plus tard, le samedi 10 juin, dans le cadre de l’émission hebdomadaire Culture et Confiture, en ondes tous les samedis dans les quatre provinces de l’ouest canadien – Manitoba, Saskatchewan, Alberta, Colombie-Britannique – ainsi qu’au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest.

L’entrevue devrait durer une heure environ. Une heure, c’est long à la radio! Et je n’ai que quelques jours pour me préparer!

Je file  en vélo à la bibliothèque de UBC et reviens les bras chargés de livres. Une relecture, annotée, des ouvrages de Dany Laferrière s’impose.

On m’apprend que nous serons trois, dans le studio, autour de l’écrivain: Mireille Langlois, animatrice de l’émission, mon ami, Marc Fournier, réalisateur associé à Radio-Canada et moi.

J’ai déjà eu la chance de rencontrer, au printemps 1992, Dany Laferrière. (Voir ici le récit de mes premières années à Vancouver).

L’écrivain, pas encore « Immortel » venait de publier « L’Odeur du café » (1991) et « Le Goût des jeunes filles » (1992).

CBUF-FM 2 saison 1991-1992
Printemps 1992, derrière le micro de CBUF-FM à Vancouver, après une première entrevue avec Dany Laferrière, accompagné déjà, de Marc Fournier, libraire à ce moment-là.

Trente-et-un ans plus tard, le 8 juin, en compagnie de Marc, je retrouve, ému, devant l’édifice de Radio-Canada à Vancouver, au 700 rue Hamilton, Dany Laferrière, fringant, décontracté, en pleine forme.

Il a reçu, la veille, devant un parterre d’étudiants respectueux, un doctorat honoris causa de SFU. SVP voir ici.

Quelques minutes plus tard, dans un des studios qui jouxte l’immense salle de nouvelles de la SRC, l’écrivain s’installe. Je suis nerveux. Je n’ai pas « fait de micro » depuis plus de trente ans…

La conversation commence. Elle durera près d’une heure… SVP cliquez sur le lien ci-dessous.

https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/culture-et-confiture/segments/entrevue/446440/dany-laferriere-sfu-vancouver-max-adrien-litterature

8 juin 2023 plus
Le jeudi 8 juin 2023 à CBUF-FM/ Vancouver, « pastiche » de la photo prise en 1992. Seconde entrevue avec Dany Laferrière. Nous sommes trois cette fois, avec Marc (en blanc) et l’animatrice de Culture et Confiture, Mireille Langlois (qui a pris la photo), à conduire la conversation.
8 juin 2023 intro
Dany Laferrière dans les studios de CBUF-FM à Vancouver, le jeudi 8 juin, juste après l’entrevue. La conversation, avec l’animatrice Mireille Langlois, tourne à ce moment-là autour de l’écrivain italien, Italo Calvino. A l’arrière-plan, Marc prépare son équipement. Nous partons, tous les quatre, quelques minutes plus tard…
8 juin 2023
faire une promenade dans les rues de la ville…
8 juin 2023 1
afin de recueillir, sur Vancouver, les impressions de l’écrivain…

Cela a été un immense honneur de rencontrer une deuxième fois Dany Laferrière!

Que de chemin parcouru en trente-et-un an!

Merci infiniment, Dany, d’avoir partagé avec nous ton humour, ton érudition, ton amour de la littérature et, surtout, ta prodigieuse intelligence!

*******

J’ajoute ici le discours très émouvant prononcé par Dany Laferrière, le 7 juin 2023, à l’Université Simon Fraser, à Burnaby, en Colombie-Britannique, lors de la cérémonie de remise de son doctorat honoris causa. Note: le discours commence à la 44è minute.

Tubuai & Rurutu

Une jeune femme explore la plage « Tavana », située à deux pas de notre pension, sur l’île de Tubuai, dans l’archipel des Australes, en Polynésie française, le dimanche 14 mai. Le climat aux Australes est plus frais que dans les autres archipels. La température oscille, en mai, entre 21 et 26 degrés.
Un peu plus loin, le dimanche 21 mai, promenade à « la Baie Sanglante« , un lieu mythique à Tubuai. C’est dans cette baie qu’ont eu lieu, en mai 1789, les premiers combats entre les insulaires et les mutins du HMS Bounty. Malgré tous leurs efforts (et la construction d’un fort) les révoltés du Bounty n’arriveront jamais à s’implanter à Tubuai. Ils devront quitter l’île (pour Tahiti puis Pitcairn) en septembre 1789. Photo – Freddy.
Chaude ambiance le vendredi 20 mai dans la cuisine de notre pension, à Tubuai. Tout le monde met la main à la pâte. Au menu du souper ce soir-là: carpaccio de thon, salade de chou et vermicelles chinois. Autour de Diana, rayonnante, Poe, Imelda et Nadine (en bleu) entourée de ses nièces, étudiantes au collège de Tubuai.
Montés par d’intrépides cavaliers lors des grandes courses des fêtes du « Heiva », en juillet, des chevaux gambadent près du village de Anua, à l’ouest de l’île…
… sous le regard attentif de Teddy, pêcheur et agriculteur, installé à Tubuai depuis toujours. Teddy cultive ce matin-là, près des chevaux, son champ de pandanus, un arbuste dont les feuilles sont utilisées…
… dans la vannerie et la chapellerie, sources importantes de revenus pour les habitants des Australes. Ci-dessus, chapeaux et paniers, typiques de l’archipel, entièrement faits à la main, exposés dans une boutique de Tubuai
Promenade familiale au village de Avera, à l’ouest de l’île de Rurutu, le lundi 22 mai.

Nous avons vécu une splendide aventure pendant ces quatre semaines passées dans les îles Australes!

La visite de ce quatrième archipel a confirmé ce que nous avions ressenti lors de notre premier voyage aux Îles de la Société, aux Tuamotu, aux Marquises.

L’accueil, partout sur le territoire, est prodigieux.

Les sourires, généreux, éclatants.

Les gens ici, souvent, rient, et vous aiment, avec les yeux.

20 mai plus 2023
Diana en compagnie de Maimiti et d’Imelda à notre pension à Tubuai, le samedi 20 mai

Quelques repères, pour les férus d’histoire.

L’archipel des Australes – composé de sept îles dont cinq sont habitées – portait autrefois le nom de « Îles Tubuai », Tubuai étant la plus grande île de l’archipel.

Tubuai est aujourd’hui la capitale administrative et économique des Australes.

7000 habitants environ vivent dans l’archipel. 

Après notre séjour à Raivavae, nous avons fait halte dans les Australes à Tubuai puis à Rurutu. Les deux autres îles habitées de l’archipel sont Rimatara et la petite île de Rapa, à l’est – que je rêve de visiter!! Rapa est la « petite soeur » de Rapa Nui, le nom polynésien de l’île de Pâques, située beaucoup plus à l’est.

James Cook est le premier navigateur européen à « découvrir » Rurutu, en 1769 lors de son voyage initial dans le Pacifique. Il sera aussi le premier à mentionner Tubuai huit ans plus tard, en 1777, lors de son troisième (et dernier) voyage.

Tubai passe sous protectorat français en 1842, Rurutu en 1889.

Les deux îles seront ensuite annexées par la France, en 1880 pour Tubuai, en 1900 pour Rurutu. Les autorités françaises craignant de perdre les îles Australes aux mains des Anglais – omniprésents à l’époque dans la région via les missionnaires (protestants) de la London Missionary Society.

Environ 2000 habitants répartis dans de petits villages posés sur le littoral vivent à Tubuai. L’île est entourée d’un immense lagon, l’un des plus vastes en Polynésie française. Notre pension est située à Mataura, le bourg principal, où on retrouve la poste, la mairie, une banque, un petit magasin et quelques « roulottes » de restauration rapide. Une route goudronnée de 26 kms…
15 mai 2023 3
… fait le tour de l’île. Ci-dessus, sur la côte ouest de Tubuai, près du village de Anua, le lundi 15 mai. Le lagon, immense, est à l’arrière-plan.
tubuai-route
Aperçu de la route de ceinture de Tubuai. L’île est belle, paisible, montagneuse à l’intérieur des terres. En plus de la vannerie, les habitants de Tubuai vivent (comme à Raivavae) de la pêche, de l’agriculture et du tourisme qui se développe peu à peu.
La plupart des habitants possèdent un terrain patrimonial, partagé et entretenu par les membres d’une même famille. Ce qui provoque parfois des tensions. La terre est fertile à Tubai. Dans les jardins, on cultive carottes, pastèques, pommes de terre, et du « taro », un légume racine. Ci-dessus, Diana en compagnie de Freddy, dans la propriété qu’il partage avec son oncle…
Freddy, musicien, aux mille talents, homme à tout faire, responsable avec son épouse, Nadine, de gérer notre pension. Ils ont tous les deux gardé sur nous un oeil bienveillant pendant notre séjour à Tubuai. Merci Freddy et Nadine!
16 mai 2023 2
Lors d’une de nos promenades à Tubuai, nous avons rencontré la tante de Freddy, Mins, qui cueille un matin, au bord de la route, des feuilles servant à améliorer la circulation sanguine. Mins en a besoin pour un…
16 mai 2023 3
… membre de sa famille. « J’ai appris à reconnaître ces plantes médicinales traditionnelles dans un grand livre écrit en français et tahitien, hérité de ma grand-mère », nous confie-t-elle en remplissant son sac.

Vu la durée de notre séjour à Tubuai (10 jours), nous avons vraiment eu le temps ici d’écouter les Polynésiens. Longuement et attentivement. Aussi bien les riverains que les Tahitiens de passage. Puisque notre pension a eu la bonne idée d’accueillir en même temps que nous plusieurs petits groupes de techniciens venus accomplir sur l’île des missions de 3, 4 ou 5 jours.

La plupart de ces professionnels étaient Tahitiens. Nous étions toute ouïe.

Nous avons ainsi partagé nos repas avec une équipe de Météo France-Tahiti venue réparer du matériel sur le terrain de l’aéroport.

Des électriciens de Papeete ont également séjourné à la pension afin de vérifier la bonne marche des circuits de divers bâtiments de l’île – dont ceux du RSMA, un organisme que je connaissais pas.

Le RMSA en Polynésie française a comme mission principale l’insertion dans la vie active des jeunes adultes de 18 à 25 ans. Différentes formations y sont offertes: électricien, soudeur, plombier, aide à la restauration, à la petite enfance, agent administratif, etc… Formations essentielles dans ces petites îles où les structures d’apprentissage sont rares. Le RMSA est financé par le ministère des Outre-Mer.
Devant l’antenne du RMSA à Tubuai

Un groupe de plongeurs a aussi été des nôtres. Responsable de superviser la délicate pose du cable de fibre optique qui doit bientôt relier Tahiti aux îles Australes. Un service très attendu ici. Le débit du réseau internet étant, dans les îles de l’archipel, extrêmement lent. Difficile à Tubuai ou à Rurutu de télécharger un document ou même une photo.

Tout ce beau monde se réunissait deux fois par jour autour de la table de la salle à manger.

Souper à notre pension à Tubuai, le mercredi 17 mai.

Au cours des repas, les sujets de discussion, les opinions, les questions, ne manquaient pas. Nous avons beaucoup appris.

Deux choses m’ont frappé au cours de ces conversations. La première, c’est l’attachement viscéral qu’avaient ces hommes et ces femmes pour leur territoire. Leur façon de vivre en Polynésie, leurs traditions, leur culture, ils parlaient de tout cela avec ferveur et passion.

Pas question pour eux de quitter le pays, « le fenua ». Malgré leurs compétences et les difficultés de la vie quotidienne à Tahiti, aller travailler à Paris, Nantes ou Bordeaux, n’est pas une option.

Deuxième surprise, en dépit des divergences politiques, il y avait chaque soir autour de la table un vrai consensus autour du nouveau gouvernement, indépendantiste, élu le 30 avril.  Gouvernement à qui « il faut donner le temps de faire ses preuves » entendait-on.

Aucune animosité, pour l’instant, envers le nouveau président, Moetai Brotherson, largement respecté, issu du parti Tavini Huiraatira

Moetai Brotherson, 53 ans, sera aussi responsable du ministère du tourisme, des transports aériens internationaux, de l’égalité des territoires, des affaires internationales, du développement des archipels, de l’économie numérique et des conséquences des essais nucléaires.

Le troisième volet des échanges a été plus délicat. Chacun a évoqué à sa façon les nombreux défis de la vie quotidienne dans ces îles lointaines – si souvent idéalisées par les étrangers!

L’envers du décor, de la carte postale, est très différent. Le nouveau gouvernement a du pain sur la planche. Quatre enjeux, parmi beaucoup autres, ont été évoqués.  

* Dans un territoire où les allocations chômage n’existent pas, 26 % environ de la population en Polynésie française vit sous le seul de pauvreté, 300 euros par mois. (Chiffres de 2021 de Institut de la statistique de la Polynésie Française (ispf.pf))

* Les violences conjugales – liées en grande partie à la consommation abusive d’alcool – sont partout sur le territoire un fléau. 

* Le taux de suicides sur le territoire est inquiétant. Près de 230 tentatives sont recensées par an et environ 30 à 50 personnes mettent fin à leurs jours. Chez les jeunes, c’est souvent la première cause de mortalité, dépassant même, certaines années, les accidents de la route.

* Le taux d’inflation en Polynésie française a atteint 8.5% en 2022. La plupart des ménages ont beaucoup de mal à boucler leur fin de mois.

16 mai 2023 5
Thierry a grandi sur l’île de Rapa et vend le midi dans sa roulotte des sandwiches (« hachis-frites« ) sur le bord de mer de Mataura, à Tubuai. Son rêve? Venir exercer son métier au Canada. Projet difficile. Le Canada n’a aucune antenne officielle en Polynésie française (il faut passer par le consulat australien). Les entrevues avec les candidats retenus pour une immigration potentielle ont lieu à Sydney, Auckland, Honolulu ou Los Angeles! Le coût du voyage est défrayé par les candidats. Sans aucune garantie de succès.
Elvis, dans sa boutique de fruits et légumes située à Tubuai, à l’ouest de « la station » de Mataura.
Conversation amicale avec une jeune femme, accompagnée de son enfant, qui vend des fruits et des légumes devant la maison familiale, sur la route de l’aéroport à Tubuai
Baignade et moment de détente avec deux de nos compagnons de voyage, Serge et Agnès, à Tubuai.
Tubuai messe - mai 2023
Messe de l’Ascension célébrée à la paroisse Saint-Joseph de Tubuai

Après avoir parcouru l’île de long en large, nourri régulièrement les cochons dans le jardin de Freddy, assisté à une messe magnifique, le dimanche 21 mai, après avoir beaucoup ri à la pension et nagé presque tous les jours dans l’eau claire et fraîche du lagon, nous avons quitté Tubuai avec beaucoup de regret.

Nous n’avons pas vu les jours passer et nous aurions pu facilement rester ici beaucoup plus longtemps. Tant la vie est douce, indolente et insouciante à Tubuai! Comme à Raivavae, les touristes sont une denrée rare sur l’île.   

15 mai 2023 5
Aperçu de la plage de la Baie Sanglante, près du village de Mataura, à Tubuai.

Le lundi 22 mai, un vol d’une quarantaine de minutes nous emmène à Rurutu, dernière étape de notre voyage aux Australes. 

22 mai 2023 5
Rencontre avec un groupe de jeunes, à l’extérieur du « snack Sabrina« , au village de Avera, le jour de notre arrivée à Rurutu. Nous avons fait ce jour-là, en scooter, le tour de l’île…
27 mai 2023
… quelques heures seulement après notre descente d’avion! Ci-dessus, devant la mairie de Avera. Direction: la pointe sud de l’île de Rurutu
22 mai 2023 8 plus
où nous nous arrêtons près du village de Narui, au bord d’une magnifique plage de sable blanc!
cfinrurutu1
La montagneuse île de Rurutu. Environ 2400 habitants vivent ici dans trois villages principaux: Moerai, la localité principale, au nord-est, Avera, sur la côte ouest et Auti sur la côte est. Notre pension (croix bleue sur la carte), est située dans le bourg de Vitaria…
22 mai 2023 3 plus
… au milieu d’une cocoteraie, ci-dessus. On aperçoit, derrière les arbres, de l’autre côté de la route…
… la plage, déserte, où nous nous sommes baignés pratiquement tous les jours.  Des bassins d’eau profonde dans le lagon, près de la pension, permettent de nager facilement. La température de l’eau à Rurutu est beaucoup plus agréable (chaude) qu’à Tubuai et la recherche de coquillages réserve de belles surprises!
PAintroblog1
Rencontre avec Pa, le jeudi 25 mai, à Moerai, devant la coopérative agricole de Rurutu. Pa cultive sur ses terres le « taro ». Comme tous les anciens, il parle sur l’île le reo Rurutu, un dialecte similaire au tahitien mais qui se distingue par son vocabulaire et la façon de prononcer certains mots. La lettre « h » par exemple n’est pas utilisée en Rurutu. Le village de Hauti en Tahitien = Auti en Rurutu. Le Rurutu est enseigné ici à l’école primaire.

La production agricole à Rurutu est très importante. L’île (avec Tubuai) est l’un des vergers de la Polynésie française.

En plus du « taro », poussent ici: citrons, papayes, grenades, bananes, noix de coco, mangues, avocats, corossol, potiron, « pota » (choux chinois), « uru » (le fruit de l’arbre à pain), goyaves…

Une grande partie des fruits et légumes vendus dans les marchés de Tahiti provient des Australes.

Rurutu champs
Une plantation de choux près du village de Moerai

Rurutu produit aussi un excellent café!

Nova 2 Rurutu
Nova, originaire des Marquises, a repris il y a quelques mois à la coopérative de Rurutu la commercialisation du café de l’île. Elle arrive difficilement à répondre aux demandes qui affluent d’un peu partout. Nous avons réussi à repartir avec quelques précieux paquets de café, fraîchement torréfié.
27 mai 203 1
Sur le pourtour de la sinueuse route de ceinture de Rurutu, des structures de pierre rappellent, avant chaque village, un épisode de l’histoire de l’île. Rurutu est surprenante à parcourir en scooter. On longe au départ de magnifiques plages de sable blanc puis, quelques minutes plus loin, la route franchit de petits cols de montagne qui embaument le pin et l’eucalyptus. Une magnifique aventure!
27 mai 203 2
Une maison nichée au coeur d’une cocoteraie, près du village de Narui, au sud de Rurutu.
Nelly
Nelly partage avec Diana des conseils de couture, à Moerai, le mardi 23 mai.

Une autre belle surprise nous attend à Rurutu: l’immense diversité de ses habitants!

25 mai 2023 3 Hani restro Piaareare
Hani, née d’un père coréen et d’une mère tahitienne, travaille dans un restaurant, face au port de Moerai, à Rurutu.

Nous avons rencontré en quelques jours, partout dans les villages, des riverains issus de métissages complexes. Métissages qui reflètent la présence sur l’île, au cours des ans, de navigateurs, aventuriers, commerçants, missionnaires et immigrants venus, des quatre coins du monde, s’établir à Rurutu.

La plupart des habitants ici ont du sang portugais, espagnol, français, chinois, parfois sud-américain.

Nous avons appris que l’argent échangé dans les commerces à Tahiti a été, jusqu’à la fin du 19è siècle, la monnaie chilienne et péruvienne! 

22 mai 2023 boutique
Thenyou, 71 ans, derrière le comptoir de son magasin à Avera, à Rurutu, où il est né. Son père est arrivé sur l’île à la fin des années 20, en provenance du sud de la Chine, afin de reprendre, à Avera, le magasin tenu déjà, à l’époque, par une famille chinoise!
23 mai 2023 4
Plat de « Chow Mein » servi au restaurant « Les Délices de Rurutu« , le mardi 23 mai. La cuisine chinoise est partout présente en Polynésie.
moerain
Des jeunes filles marchent tranquillement dans une rue de Moreai. J’ai eu parfois l’impression à Rurutu de marcher dans les rues d’une petite ville dans le sud d’Haïti. 
25 mai 2023 2
Maison typique du bourg de Moreai. Pas un papier qui traîne dans la cour. Nous avons remarqué que les Polynésiens, dans chacun des archipels où nous sommes passés, nettoient consciencieusement leurs jardins et l’espace devant leurs maisons.

Nous avons aussi rencontré à Moerai un homme jovial, surprenant, dynamique, encore jeune, Dominique, qui vient de prendre sa retraite… à l’âge de 39 ans!

Après 20 ans de bons et loyaux services (2003-2023) dans l’armée française, Dominique est revenu chez lui, à Rurutu, prendre sa retraite. Pendant son service, Dominique a été déployé en Afghanistan, au Kosovo et au Mali.

Fait peu connu: la Polynésie est (avec la Réunion) l’un des premiers viviers de recrues de l’armée française. Vu le taux élevé de chômage chez les jeunes et le manque de débouchés sur le territoire, des centaines de jeunes polynésiens (hommes et femmes) s’engagent chaque année dans l’armée afin de défendre aux quatre coins du monde le drapeau tricolore. 

Certains s’engagent dans la Légion étrangère 

Avis de recrutement affiché sur les murs de la mairie de Auti, à Rurutu.
Sashimi de thon à la javanaise, servi au restaurant Piareare, en face du port, à Moerai. « Tama’a Maitai »! = Bon appétit!

Après une semaine bien remplie, nous devons déjà quitter Rurutu.

26 mai 2023
Diana participant à un atelier de tressage avec Tuparii à notre pension, à Vitaria.

Nous avons rencontré aux Australes des gens simples, paisibles, généreux, fiers de leurs îles!

Cela a été un vrai bonheur de vivre ici.

28 mai 2023
Une femme et son enfant, devant l’église Saint Jean-François Régis, à Rurutu, le dimanche 28 mai.

Nous sommes extrêmement reconnaissants d’avoir pu réaliser ce second voyage en Polynésie française. 

Mais nous repartons quand même avec quelques interrogations.

 * Combien de temps encore ces petites îles isolées, dans les Australes, pourront-elles rester à l’écart des grands circuits touristiques – lorsqu’on apprend que le nouveau gouvernement veut tripler à 600 000 par an le nombre de visiteurs en Polynésie française?

* Après les élections, tenues en avril, comment va évoluer le territoire, politiquement? Quelles seront les premières grandes mesures prises par le parti indépendantiste?

* Quelle marge de manoeuvre la France va-t-elle accorder à sa lointaine « collectivité d’outre-mer« ?

DSC03683
Diana en compagnie de Hinano et de ses enfants près de notre pension, à Vitaria, le mercredi 24 mai.

Cela a été une magnifique expérience de découvrir les îles Australes!

Seul regret, notre voyage s’est terminé beaucoup trop vite!

ppt
Vol Rurutu-Papeete le lundi 29 mai

Nous avons eu la chance de visiter, jusqu’à présent, douze îles dans quatre des cinq archipels de la Polynésie française.

Nous reviendrons, bien sûr. Le cinquième archipel – les îles Gambier – nous attend!

4 mai 2023 Raivavae
Sur une plage de Raivavae, le jeudi 4 mai.

Nous sommes de retour à Punaauia, au bord de la plage.

Papeete est à vingt minutes de route, au nord.

Notre vol (direct) pour Seattle part ce soir. Nous serons à Vancouver mercredi après-midi.

« Nana » (Au revoir)!

Raivavae

Raivavae est sans aucun doute l’île la plus sauvage que nous avons visitée jusqu’à présent en Polynésie française.

L’une des plus belles et captivantes aussi.

Halte sur une petite plage lors de notre première randonnée en vélo, le jeudi 4 mai, sur l’île de Raivavae, dans l’archipel des Australes, en Polynésie française

Joanne
Un peu plus tôt le même jour, alors que je me promène devant notre bungalow, Joanne, ci-dessus, traverse la route avec un grand sourire pour me souhaiter la bienvenue à Raivavae! Elle va chercher son pain. Née aux îles Tuamotu, Joanne est arrivée avec sa famille à Raivavae à 17 ans. Elle n’est jamais repartie.

carteouipolynesie
Raivavae, soulignée en vert, première étape de notre voyage dans l’archipel des Australes. Nous visiterons ensuite, à l’ouest, Tubuai puis Rurutu.

Une route presqu’entièrement goudronnée et plate d’environ 20 kms fait le tour de Raivavae. L’île est située au coeur d’un magnifique lagon encerclé d’une série de motus (atolls). Il y a quatre villages à Raivavae: Vaiuru, Rairua (le plus important), Mahanatoa et Anatonu (souligné en bleu) où est située notre pension.

5 mai 2023 5 Flores Nui
Lors de nos promenades en vélo, nous allons comme d’habitude à la rencontre des riverains, aussi heureux que nous ici de faire connaissance! Longue conversation le vendredi 5 mai avec Nui Flores qui travaille dans son champ de taro (un turbercule) près du village de Mahanatoa.

5 mainew 2023 2 5 Flores Nui
Nui Flores nous parle de sa plantation, de sa famille, qui vit à Raivavae depuis plusieurs générations. Nui Flores revendique fièrement ses racines espagnoles et portugaises. Le maire de Raivavae, Bruno Flores, réélu en 2020, appartient à une autre branche de la même famille Flores.

Environ 900 habitants vivent ici paisiblement de la pêche, de l’agriculture, du tourisme.

Tout le monde se connaît. Et se retrouve régulièrement lors des événements et des fêtes qui ponctuent la vie des quatre petites communes de l’île.

7 mai 2023 6
Participants à la grande fête du  au village de Vaiuru, le dimanche 7 mai. Le est une importante célébration qui réunit chaque dimanche, pendant tout le mois de mai…

protestante
la communauté protestante de Raivavae et celle de chacune des îles de l’archipel des Australes. Voir détails plus bas.

Malgré la construction en 2002 d’un aéroport qui permet de rejoindre Papeete en deux heures, une poignée de visiteurs seulement s’aventure chaque année jusqu’ici.

Diana devant notre bungalow, situé au bord du lagon

11 mai 2023
à la pointe nord-est de l’île

La météo est capricieuse à Raivavae. La nature, parfois hostile. Il pleut souvent. Comme dans les autres îles de l’archipel.

Nous avons donc eu droit pendant notre séjour à plusieurs averses abondantes et à de très fortes rafales de vent. Nous avons même pendant deux jours été privés d’internet, pour cause de forte houle.

Heureusement, ces intempéries ont été suivies de plusieurs longues et belles éclaircies. Nous avons eu des journées splendides!

9 mai 2023 vélo
Un riverain rentre tranquillement chez lui, au sud de Rairua le mardi 9 mai

Sur la paisible route de ceinture, à quelques centaines de mètres de notre pension, rencontre avec…

Poema, née à Raivavae. Son nom en tahitien signifie « la perle propre« . Poema tient dans les mains des bouteilles remplies de petits coquillages. Elle part ce matin-là fabriquer chez elle des colliers et des bracelets.

Raivavae compte six pensions de famille disposant chacune de chambres ou de bungalows. Les logements sont très rarement tous occupés en même temps. En fait, à part les deux sympathiques couples (de St-Malo et de Paris) hébergés à notre pension, nous n’avons pratiquement vu ici aucun autre touriste.

6 Mai 2023 1
Nous rencontrons tôt un matin, au sud d’Anatonu, Bernard qui revient de sa pêche quotidienne aux algues. Ces algues, « le caviar vert » des Australes, seront lavées, séchées puis vendues un peu plus tard dans les commerces et pensions de Raivavae…

Bernard, ci-dessus, revenant de sa pêche, travaille aussi à la Mairie de Raivavae… et son épouse…

Rofina, vend devant leur domicile des concombres géants, des papayes, des pamplemousses récoltés dans leur jardin. Rofina tient aussi dans les mains les algues ramenées par son mari. Merveilleuse polyvalence des Polynésiens!

12 mai 2023 6
Paysage typique du littoral de la côte nord de Raivavae, entre Anatonu et Raiuru. Un petit paradis.

Il n’y a pas d’hôtel à Raivavae. Les résidents (comme à Maupiti) n’en veulent pas. L’île a un restaurant, souvent fermé. Aucune banque (seulement un DAB à la poste). Pas de transport collectif. Ni de location de voiture. Très peu de circulation automobile.

La meilleure façon de se déplacer à Raivavae est le vélo. En version électrique, souvent, pour les résidents.

Grande randonnée autour de l’île, le samedi 6 mai. Tout en pédalant, conversations amicales avec les habitants. Ci-dessus, sur la droite, Ismaël et son épouse Tania en discussion avec Diana…

Nous nous dirigeons ce jour-là vers la redoutable route transversale, abrupte, qui relie les communes de Mahanatoa et Vaiuru. Randonnée épique!

Trois ou quatre petits « magasins » vendent aux riverains quelques produits de première nécessité, le pain, l’huile, le riz, des pâtes, des soupes chinoises, en paquets. Une bouteille de vin très ordinaire coûte 2000 CFP Francs Pacifique (17 euros ou Can$25).

La plupart des habitants cultivent chez eux un petit potager où poussent des légumes (pommes de terre, salades, taro, tomates) et des arbres fruitiers (papayes, citrons, oranges)

Comme dans les autres petites îles en Polynésie, on se débrouille ici pour les services comme on peut. On fait appel à un voisin pour la plomberie ou pour régler un problème d‘électricité. On vend sur le bord de la route les produits de son jardin.

La communauté – à 90% protestante – est très soudée. Il n’y a ici aucun sans-abri ou de banque alimentaire, comme à Tahiti. Les gens s’entraident, partagent, échangent.

Nouvelle conversation un matin avec Marie qui propose devant son jardin des bottes de chou chinois (bok choi). On les appelle ici « pota ».

Marie nous parle elle aussi longuement de ses origines. Son père, français, était légionnaire. Sa mère vient de Tahiti. Sur la gauche, on aperçoit une partie de l’édifice qui était autrefois l’école primaire.

9 mai 2023 2 Yves
Le chou chinois, préparé à la pension, était excellent et nous retournons chez Marie quelques jours plus tard. Cette fois, c’est son mari Yves qui va dans le jardin déterrer pour nous…

9 mai 2023 1
… deux nouvelles bottes de chou. Impossible de manger plus local et plus frais!

Petit-déjeuner à notre pension autour d’Eléonore (robe rouge, à gauche) et son mari Denny, debout à ses côtés.

Comme souvent en Polynésie française, un des moments que j’apprécie le plus est le rituel des repas pris en commun le soir avec notre famille d’accueil. Les oreilles grandes ouvertes, nous écoutons attentivement les informations que partagent nos hôtes sur l’histoire de leurs îles.

Un soir, autour de la table du souper, Eléonore, la propriétaire de notre pension, n’hésite pas à résumer la façon dont la vie quotidienne a radicalement changé à Raivavae où elle est née, il y a plus de soixante ans.

« Raivavae autrefois produisait du café », nous dit-elle. Mais les plantations ont peu à peu disparu dans les années soixante lorsque les hommes de l’île sont partis travailler à Papeete et ailleurs afin de construire les nombreuses infrastructures du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) – l’organisme responsable de gérer les essais nucléaires français en Polynésie française entre 1966 et 1996.

Presque du jour au lendemain, précise Eléonore, les petites communes dans les Australes, dans les Tuamotu, dans les Îles Sous-le-Vent, se sont vidées. Les hommes sont partis, en masse, attirés par les paillettes de la ville (Papeete), l’argent facile, les tentations et les salaires alléchants offerts dans les chantiers du CEP.

Cet exode a eu un effet domino dévastateur dans ces petites îles. Les hommes étaient dans ces communautés les pêcheurs, ceux qui ramenaient tous les jours à la maison du poisson pour nourrir leurs familles. Ils cultivaient aussi les champs, entretenaient les plantations, de café notamment. Laissés maintenant à l’abandon.

Une fois les hommes partis, les sources d’alimentation dans les îles ont été bouleversées. Au milieu des années soixante, les boites de conserve venues de Tahiti ont progressivement remplacé le poisson frais. Le Nescafé est arrivé. Les grandes bouteilles de boissons gazeuses aussi. Ces produits nocifs importés de la métropole ont envahi le marché. Les traditions alimentaires des Polynésiens ont été profondément modifiées.

On apprend aujourd’hui en lisant la presse que le Coca-Cola produit en Polynésie est le plus sucré du monde. Et que le taux de sucre dans ces sodas augmente chaque année. Impunément. C’est inexcusable. Comment un gouvernement peut-il laisser des entreprises traiter ainsi les citoyens?

Les taux d’obésité et de diabète sont très élevés en Polynésie française. 70% de la population adulte est en surpoids dont 40% au stade d’obésité.

Eléonore conclut cette leçon d’histoire par une une note plutôt optimiste. Elle nous apprend que le gouvernement nouvellement élu le 30 avril, gouvernement indépendantiste, a dans son programme un vaste projet visant à encourager et à subventionner sur le territoire la reprise de pratiques agricoles traditionnelles. Quelle excellente idée!

Tous nos vœux de succès aux nouveaux élus et aux communes qui adhèreront à ce projet!

9 mai 2023 Nui
Nous avons revu quelques jours plus tard Nui Flores dans son champ de taro, la boue jusqu’aux genoux. Son compagnon de travail, Samuel, est à ses côtés. Nous leur avons communiqué les informations partagées par Eléonore. Nous les avons aussi encouragés à prendre contact avec la Mairie de Raivavae. En espérant de tout coeur qu’ils puissent tous les deux bénéficier des subventions de ces nouveaux programmes.

Grande effervescence le samedi 6 mai dans les communes de Raivavae! On célèbre le lendemain la grande fête du Mè!

6 mai 2023
Un groupe de riverains ci-dessus, nettoie le terrain de l’église protestante située juste derrière notre pension, à Anatonu.

De l’autre côté de l’île, dans le village de Vaiuru où doit avoir lieu cette première célébration du , Guillaume, ci-dessous, à droite, accompagné des membres de la communauté, s’affaire. Il n’y a pas une minute à perdre! Plus de 200 convives sont attendus  le lendemain pour le déjeuner dans la salle paroissiale de Vaiuru.

6 mai 2023 8
Guillaume en pleine préparation. Au menu: poulet et cochon cuits au four et, sur la table à gauche, du poisson enveloppé dans une feuille de « auti ».

6 mai 2023 9 Guillaume
En compagnie de Guillaume, pêcheur et agriculteur, né à Raivavae, père de trois enfants. Il nous invite gentiment à assister au le lendemain. Nous acceptons avec plaisir!

Dimanche, 7 mai. C’est le grand jour!

Des quatre coins de l’île, hommes, femmes et enfants se pressent devant l’église protestante de Vaiuru.

Les participants, grands sourires aux lèvres, descendent du bus…

mmmmmm
… scolaire de la commune

mmmmm
Tout le monde est sur…

… son trente-et-un!

A l’intérieur de la salle, des chants, des cantiques, de la musique, une ambiance extraordinaire!

Les musiciens (Guillaume est à gauche) sont vêtus du costume

7 mai 2023 11
de leur paroisse

Les femmes portent sur la tête des couronnes de fleurs et de feuilles cueillies le matin même dans leurs jardins.

mmmmm
C’est la tradition!

Un des objectifs principaux du est de recueillir des membres de la paroisse des fonds pour l’église protestante de la Polynésie française.

Ces fonds serviront en partie à subventionner le coût des voyages des pasteurs et des missionnaires en Polynésie et ailleurs dans le monde.

Chacune des quatre communes de l’île organisera, dans sa paroisse, pendant le mois de mai, son propre Mè. Il y aura donc à Raivavae cette année quatre – les 7, 14, 21 et 28 mai – événements auxquels participent les membres de la communauté protestante, s’ils le désirent.

mmmmm
Des dignitaires de la commune de Vaiuru officient et gèrent solennellement l’événement.

Je me suis renseigné. Pour la seule île de Raivavae, les fêtes du rapportent chaque année à l’église protestante de la Polynésie française plus de 5 millions de francs CFP, l’équivalent de 50 000 euros ou CAN $73 000.

Sur la côte sud de Raivavae… Après avoir été plongées dans l’eau du lagon, les régimes de bananes mûrissent au soleil, en hauteur, à l’abri des rongeurs…

Terei devant sa maison accompagnée de ses enfants qui rentrent de l’école primaire

Nous avons passé ici l’un de nos plus beaux et authentiques séjours en Polynésie française!

Notre vol de 40 minutes pour Tubuai – notre deuxième étape aux Australes – part vendredi après-midi.

Cela a été un vrai bonheur de retrouver à Raivavae l’accueil chaleureux et le sourire des Polynésiens.

L’aventure continue à Tubai puis à Rurutu.

On vous embrasse.

Ultime balade en vélo autour de Raivavae, le jeudi 11 mai. L’île est un bijou.

11 mai 2023 7
Nous rentrons à la maison, notre pension est située juste en face de l’église, côté mer.

12 mai 2023 1
Nous avons le temps juste avant notre départ le vendredi 12 mai d’assister à Anatonu

12 mai 2023
à la préparation du repas du qui aura lieu dimanche (le 14) dans la commune

12 mai 2023 3
Pièce maîtresse du menu: « le cochon« , comme on l’appelle qui est ici pesé avant d’être dépecé quelques minutes plus tard.

Les îles Australes

statueLa statue du dieu A’a de l’île de Rurutu, exposée au Musée de Tahiti, le 28 février 2023. VAIKEHU SHAN HANS LUCAS VIA AFP
La statue du dieu A’a de l’île Rurutu, exposée ce printemps au Musée de Tahiti, à Punaauia, près de Papeete. Voir l’article publié dans « Le Monde », édition du 12 mars 2023. Photo Vaikehu Shan/Hans Lucas.

Un peu moins de quatre mois après notre retour de la Polynésie française, nous repartons dans quelques jours pour cette région au bout du monde.

Cap sur les îles Australes cette fois. Un séjour d’un mois. Dans trois des sept îles de l’archipel le plus méridional du territoire, situé (pour l’île la plus proche, Rurutu) à plus de 500 kms au sud de Tahiti.

Tlesaustralesintroplus
Les archipels de la Polynésie française. Soulignées en jaune, au sud, dans les Australes, les trois petites îles où nous ferons escale, au mois de mai. Rurutu, Tubuai et Raivavae. Soulignées en vert, au nord, nos étapes précédentes en Polynésie (novembre 2022 – janvier 2023) dans l’archipel de la Société, aux îles Tuamotu et aux Marquises.

Un séjour que nous avons commencé à préparer peu de temps après notre retour, à la mi-janvier. Tant nous étions impatients de retrouver la Polynésie. Et curieux d’aller découvrir des îles encore plus lointaines, dans un archipel encore méconnu et peu visité.

Nous gardons, pour ce second séjour, la formule que nous avons tant appréciée lors de notre premier voyage. Nous logerons dans chacune des trois îles dans des petites pensions de famille, simples, modestes, en demi-pension.

Nous n’avions de toutes façons, pour les hébergements, pas beaucoup d’autres choix. Les hôtels dans les Australes sont pratiquement inexistants. Les touristes sont rares, sauf pendant la saison d’observation des baleines, au large de Rurutu, entre juillet et septembre.

L’archipel accueille environ 2000 visiteurs par an. Ce qui représente moins d’un pourcent du nombre annuel de touristes sur l’ensemble du territoire. Une goutte d’eau – et une statistique qui nous convient parfaitement.

Notre objectif à Raivavae, Tubuai et Rurutu est le même que celui de notre périple précédent. Essayer de vivre dans ces îles le plus près possible des habitants. Loin des paquebots. Des croisières. À l’abri du tumulte et de la cohue des voyages organisés.

Nous souhaitons simplement – comme à Maupiti ou Tikehau – observer et partager, dans ces îles reculées, la vie quotidienne des riverains.

Nous ne savons pas ce qui nous attend ni ce que nous allons trouver là-bas. Qui allons-nous rencontrer sur notre chemin? Quelles découvertes allons-nous faire?

Nous savons seulement que sommes infiniment reconnaissants de pouvoir repartir une deuxième fois, en quelques mois, pour ces îles singulières et si attachantes du Pacifique Sud.

australes3
Les sept îles qui composent l’archipel des îles Australes en Polynésie française. Seules cinq des sept îles sont habitées. (Maria et Marotiri sont désertes). L’archipel compte environ 7000 habitants.

L’histoire des îles Australes diffère sensiblement de celle des autres archipels de la Polynésie française.

Les Australes ont été les dernières à être peuplées (entre le 11è et le 14è siècle, lors des grandes migrations polynésiennes), par des habitants venus, semble-t-il, selon les historiens, de Tahiti.

Elles ont aussi été les dernières à être « découvertes » par les navigateurs européens.

L’île de Rimatara, par exemple, à l’ouest de l’archipel, n’a été « révélée » au reste du monde qu’en 1811. Et l’île Maria sera « reconnue » pour la première fois en 1824.

En d’autres mots, en terme de chronologie et d’histoire d’exploration maritime, ces petites îles ont été « découvertes », par les non-Polynésiens… tout récemment!

carteplusraivavae
Raivavae sera notre première halte dans l’archipel des Australes. L’île est entourée d’un lagon ceinturé par une barrière de corail comprenant vingt-huit motus (îlots). Une route d’environ 20 kms fait le tour de l’île.

Voici donc notre itinéraire pour les prochaines semaines:

29 – 30 avril = Vancouver – Seattle – Papeete 

30 avril – 3 mai = Punaauia (commune résidentielle située au sud de Papeete)

3 – 12 mai = Raivavae – 16 km² (905 habitants)

12 – 22 mai = Tubuai – 45 km² (2050 habitants)

22 – 29 mai = Rurutu – 36 km² (2325 habitants)

29 – 30 mai = Punaauia

30 – 31 mai = Papeete – Seattle – Vancouver

Parenthèse politique – Nous arrivons à Papeete le dimanche 30 avril, le jour du deuxième tour des élections territoriales en Polynésie française. À la surprise générale, le parti indépendantiste, Tavini Huira’atira, dirigé par Oscar Temaru, est arrivé en tête (34.9% des voix) au premier tour, le 16 avril, et est donné gagnant au second tour – malgré l’alliance, cette semaine, des partis autonomistes.

Les indépendantistes reprendront-ils le pouvoir en Polynésie française, le 30 avril? Leur mandat à l’Assemblée territoriale (57 sièges) sera de cinq ans. S’ils remportent une majorité, comment réagira Paris? À suivre.

Notes de lecture:

Loïc Josse, Polynésie – (Bruxelles, 2022)

lplusjosse

L’un des meilleurs guides pour préparer intelligemment un voyage en Polynésie française. Pas de consignes ici sur les hôtels ou sur les lieux de restauration mais un texte court (92 pages), superbement écrit, truffé d’informations sur le pays, son histoire, sa culture et les nombreux défis auxquels fait face aujourd’hui le « fenua ». En quelques mots, sur des sujets très variés, l’essentiel est dit. 

La deuxième partie de l’ouvrage propose trois entretiens, brûlants d’actualité, menés au printemps 2021. Trois voix, très différentes, s’expriment. Celle d’un anthropologue connu, Bruno Saura. Celle d’un politicien indépendantiste, Moetai Brotherson. Et celle d’une jeune femme tahitienne, Hinatea Boosie. Conversations riches et fertiles. Regards croisés sur l’identité et la complexité du pays. Un petit livre à mon avis essentiel pour bien/mieux comprendre la Polynésie et ses multiples enjeux aujourd’hui.  

24 mars 2023 Gabriola island Ground Up Restaurant
Pois chiches au curry accompagnés de pakoras, de riz brun et de chutney à la mangue, restaurant Ground Up, 560 North Road, Île Gabriola, le vendredi 24 mars.
27 mars 2023
Splendide retour en traversier et en vélo de l’île Gabriola, le lundi 27 mars. Depuis la gare maritime de Horseshoe Bay (West Vancouver), 27 kms en bicyclette pour rejoindre le parc Stanley et Vancouver, via le pont Lions Gate (d’où la photo a été prise). À l’arrière-plan, la municipalité de West Vancouver. Le bonheur de vivre au bord du Pacifique!

Michael Audain, One Man in his Time – (Madeira Park, B.C, 2021)

m1audainUne autobiographie remarquable. La métamorphose fascinante d’un militant gauchiste devenu, au fil des ans, un riche hommes d’affaires et l’un des personnages les plus en vue de la Colombie-Britannique, généreux bienfaiteur dans le domaine des arts visuels.

Michael Audain fait fortune dans les années 80 comme promoteur dans le lucratif marché immobilier de la grande région de Vancouver.

Président de la compagnie Polygon Homes Ltd, son entreprise a construit (jusqu’à Seattle) plus de 30 000 logements. Éclatante réussite financière.

Quelle surprise de découvrir dans cette étonnante autobiographie une orientation et un parcours de jeunesse bien différents.

Engagé à gauche, le jeune Michael obtient à UBC un diplôme en travail social. Il travaille dans les quartiers défavorisés de Vancouver et songe à rejoindre (via le Panama) Fidel Castro à Cuba. Il participe en 1961, auprès de Tommy Douglas, au congrès inaugural du Nouveau Parti Démocratique (parti de centre-gauche).

Au même moment, il milite aux USA pour la cause des Noirs. Et devient, dans un bus entre Memphis et la Nouvelle-Orléans, un freedom rider. Il est arrêté à Jackson, au Mississipi. Il refuse, au poste de police, de renier ses convictions et est incarcéré pendant quatre mois dans un pénitencier. Pages saisissantes.

En Mai 68, on le retrouve à Paris, aux côtés de Daniel Cohn-Bendit. Une jeunesse trépidante, exemplaire.

Après l’élection en Colombie-Britannique, en 1972, du NPD, dirigé par Dave Barrett (ex-travailleur social lui aussi), sa vie bascule. 

Le nouveau gouvernement le nomme conseiller auprès du Ministère du Logement. Il élabore et participe à la construction de milliers de logements sociaux dans la province. Michael Audain s’éloigne ensuite, peu à peu, du NPD et crée sa propre compagnie, Polygon. Un nouveau chapitre commence.

Un récit palpitant, plein de rebondissements. Et une vie, bien remplie, qui ressemble à un roman d’aventures.   

1er avril 2023 John 316
Poulet au curry et porc braisé, cuisine malaisienne, restaurant John 3:16, 1063 West Broadway, Vancouver, le samedi 1er avril.

Un dernier mot, avant le départ.

Après plus de dix ans de pourparlers et de réunions avec la Ville…

travaux
Les travaux de réaménagement de notre rue, dans le quartier Mount Pleasant, ont commencé ce printemps. Sur un tronçon de quatre pâtés de maisons, notre rue va être transformée en piste cyclable et voie verte. Plutôt que ruisseler sur l’asphalte et se retrouver dans les égouts, l’eau de pluie sera en grande partie récupérée et réutilisée…
travaux1
afin d’irriguer le long de la rue de nouveaux espaces verts, des zones humides et des jardins aménagés par la Ville. Le projet vise aussi à réduire (et à éliminer sur deux tronçons) la place de la voiture dans un quartier qui tend à se densifier. Notre petit groupe d’activistes, fondé en 2010, à l’origine du projet, est aux anges! Nous avons même, l’an dernier, gagné un prix! Voir (Greenest City): 2022 Awards of Excellence, City of Vancouver

Bon printemps à tous!

Hiva Oa & Tahuata, visages des îles Marquises

madeleine, 61 ans, église de Taaoa, 27 décembre 2022
L’une de mes premières rencontres sur l’île de Hiva Oa, le lendemain de notre arrivée, le mardi 27 décembre. Madeleine, née à Ua Pou, prépare pour un baptême l’autel de l’église du village de Taaoa (200 habitants), situé à 7 kms à l’ouest d’Atuona. Les routes de l’île étant très escarpées, j’ai rejoint le village en vélo électrique. SVP voir les cartes ci-dessous.

31dec1
Un client devant le magasin Naiki, près de la boulangerie de Roger et Viviane, à Atuona, le samedi 31 décembre. Les tatouages aux Marquises étaient autrefois intimement liés au rang et à la fonction d’un individu au sein de la communauté. Les tatouages indiquaient sa profession, ses habiletés spécifiques, ses croyances.

28decintro
Autres sourires chaleureux en arrivant en bateau, le mercredi 28 décembre, au quai de Hapatoni, un bourg d’environ 80 habitants sis sur la côte ouest de l’île de Tahuata.

marquisesa
Les îles Marquises, situées à plus de 1400 kms au nord-est de Tahiti. Soulignée en orange, l’île de Nuku Hiva où nous avons séjourné du 16 au 26 décembre. En vert, dans le groupe sud de l’archipel, les îles de Hiva Oa et Tahuata.

Cartehivaoa et tahuata
En vert, quelques-unes de nos haltes sur l’île de Hiva Oa (2 500 habitants) et sur l’île de Tahuata, 750 habitants – la plus petite île habitée de l’archipel. Depuis Atuona (mal orthographié sur la carte), il faut compter une bonne heure de traversée pour rejoindre Tahuata. Notre pension est située au-dessus du village d’Atuona, la commune principale d’Hiva Oa. C’est à Atuona qu’ont vécu autrefois Paul Gauguin et Jacques Brel. Ils reposent tous les deux au cimetière du village. Voir plus bas.

a3plus
Du balcon de notre pension, le soleil se lève au-dessus de la baie d’Atuona, le samedi 31 décembre. Le mont Temetiu, haut de 1213 mètres, surplombe la baie. Les bâtiments sur la droite (toits verts) abritent le musée Gauguin et l’espace culturel Brel.

3decterrasse
Diana à la table du petit-déjeuner sur la terrasse de notre pension à Atuona.

Comment conclure cette série d’articles sur notre voyage de deux mois en Polynésie française?

Un périple qui nous a emmenés dans trois des cinq archipels du territoire – les Îles de la Société, les Tuamotu, les Marquises. Et dans neuf îles, chacune au caractère bien différent: Tahiti, Moorea, Huahine, Maupiti, Bora Bora, Tikehau, Nuku Hiva, Hiva Oa et Tahuata.

Nous avons vécu ici, au soleil, dans ces îles lointaines, pépites du Pacifique Sud, une expérience i-n-o-u-b-l-i-a-b-l-e!

Inoubliable en grande partie à cause des gens merveilleux – « nos anges gardiens », affirme Diana – que nous avons croisés et rencontrés sur notre chemin.

30dec françoise artisan à Hiva Oa
Françoise, l’une des nombreuses artisanes de Hiva Oa, accompagnée de ses enfants, à Atuona, le vendredi 30 décembre. La famille vit à Puamau.

Leurs sourires, leur accueil, leur gentillesse, ont guidé et éclairé notre séjour.

3jan
Diana en compagne de Gilda, Tiae, Tama et V. à leur domicile, au-dessus d’Atuona, le mardi 3 janvier

J’aimerais ici les remercier. Les saluer. Leur rendre hommage.

Tout en partageant quelques-unes de nos aventures et rencontres à Hiva Oa!

thon228dec
Livraison matinale de thon rouge devant notre pension, à Atuona, le jeudi 29 décembre. Les deux jeunes filles sont cousines et travaillent en famille avec les pêcheurs qui reviennent tôt le matin au petit port d’Hiva Oa – Photo: Diana

2dec10
Une famille en excursion au village de Puamau situé à une heure trente de route à l’est d’Atuona.

Vu la taille et la topographie de l’île, j’ai dû me résoudre à rejoindre ici (une fois n’est pas coutume) des groupes d’excursions.

Impossible, comme à Moorea ou Huahine, de sillonner les routes d’Hiva Oa en scooter! Les pistes de l’île sont de véritables montagnes russes, bien trop accidentées pour un petit moteur 50cc – comme en témoigne l’image ci-dessous.

rsin1
Aperçu de la piste qui dévale les falaises et sinue entre les localités de Hanaiapa et Nahoe, sur la côte est de Hiva Oa, le lundi 2 janvier.

Il a aussi été beaucoup plus simple de rejoindre et visiter l’île de Tahuata dans le cadre d’un voyage organisé. J’ai dû m’adapter.

ex1
En compagnie de Teiki (à droite) et d’une équipe aguerrie d’hommes de mer, nous quittons le mercredi 28 décembre le petit port de Hiva Oa (à l’arrière-plan). Grand départ…

28dec3
pour l’île de Tahuata. Nous sommes une quinzaine, répartis en deux groupes. Ambiance de fête à bord des deux navires!

28decnew
Il nous faudra une bonne heure pour rejoindre le quai du petit bourg d’Hapatoni. Population, 80 habitants.

28dec1
À notre arrivée au village, accueil au son des tambours…

28decMau
et des sourires curieux des résidents comme celui de Mau

La production du coprah à Tahuata ayant au fil des ans considérablement diminué, Hapatoni vit aujourd’hui principalement de l’artisanat. Deux fois par an, un groupe de villageois se rend à Tahiti afin d’exposer et de vendre les oeuvres réalisées dans la commune, comme celles ci-dessous.

28decbijoux
Aux Marquises, la plupart des bijoux (bracelets, boucles d’oreilles, pendentifs, colliers) sont réalisés à partir d’ossements de boeufs ou de « cochons » (comme on les appelle ici) – os qui sont patiemment travaillés, polis puis sculptés…

28decIsraella
Israëlla vend à Hapatoni quelques-unes des pièces créées par les membres de sa famille

28decguide
Après la visite du village, leçon d’histoire sur les Marquises offerte par notre guide, Brian O’Connor. La famille de Brian, d’origine irlandaise, réside aux Marquises depuis plusieurs générations.

28decconcert
Nous reprenons un peu plus tard le bateau afin de déjeuner, au nord de Hapatoni, au village de Vaitahu. SVP voir la carte plus haut. Autour de la table, au son des ukélélés, concert impromptu de chansons traditionnelles marquisiennes. Notre guide Brian, à gauche, est accompagné de son frère, Pifa, au centre. Pifa est aussi, à ses heures … policier, à Atuona.

28decpoerani la perle
Poerani, résidente d’Atuona, accompagne notre groupe, le mercredi 28 décembre

Notre journée à Tahuata se termine par une longue et magnifique baignade à la plage Hanamoenoa, située à une vingtaine de minutes de bateau au nord du village de Vaitahu.

28dec1
La plage Hanamoenoa, sauvage, bordée de cocotiers, au coeur des Marquises, le mercredi 28 décembre.

28dec2
Retour à bord, en compagnie de Teiki. La pluie et l’hiver canadien sont bien loin! Bonus, il n’y a pas ici (comme à Tikehau) de petits requins à pointes noires pour gêner les baigneurs!

28decplaque
Plaque commémorative posée à Vaitahu, le bourg principal de l’île de Tahuata

Deuxième excursion bien différente – et fascinante – le lundi 2 janvier.

En compagnie de 3 autres visiteurs – un jeune couple allemand, en lune de miel, et Tehihi, responsable des finances à la mairie de Nuku Hiva – nous partons avec notre guide Brian O’Connor à la découverte de l’histoire des premiers Marquisiens.

Nous souhaitons voir et admirer quelques-uns des vestiges que les premiers Marquisiens ont laissé sur l’île – notamment les « tikis », des statues de pierre chargées d’histoire, disséminées à plusieurs endroits à Hiva Oa.

2dec
En excursion, à la recherche des « tikis » de Hiva Oa, le lundi 2 décembre

2dectikisouriant
« Le tiki souriant » de Hiva Oa. Comme pour les statues de Rapa Nui-l’île de Pâques (« les moais »), de nombreuses questions subsistent quant à l’origine et à la fonction de ces figures mystérieuses. Les recherches continuent. Pour info, « le tiki souriant » mesure environ 93 centimètres.

L’objectif de l’excursion est de mieux comprendre la chronologie des lointaines et complexes « migrations polynésiennes » – et les traces qu’ont laissé ici ces premiers habitants.

Les historiens nous rappellent que vers 4000 avant J.-C. une migration débute depuis l’Asie du Sud-Est. Les premiers colons traversent l’océan pour explorer les îles du Pacifique Sud. Ces migrants s’installent aux îles Tonga et à Samoa vers 1300 avant J.C.

Les Marquises deviennent plus tard un lieu d’installation puis un centre de dispersion vers l’ensemble d’une zone qu’on appelle aujourd’hui « le triangle polynésien » – une zone qui va de Tahiti, à Hawaï, à l’île de Pâques (Rapa Nui) et à la Nouvelle-Zélande.

triangle-polynesien
« Le triangle polynésien ». Notez SVP le triangle rouge qui pointe, au-delà d’Hawaï, vers le Pacifique Nord-Ouest et les côtes de la Colombie-Britannique. Je suis persuadé que le peuple Haïda des îles Haïda Gwaïï (anciennement, îles de la Reine-Charlotte) partage avec les Polynésiens une histoire commune!  (Magnifique projet de recherche en perspective.)

Cette période se caractérise, selon les historiens, par l’émergence, dans ce triangle, d’une culture, d’une identité régionale. Suite à ces migrations, les Tahitiens, les Marquisiens, les Hawaïens et les Maoris de la Nouvelle-Zélande partagent tous des ancêtres communs, des pratiques culturelles communes (la danse « haka ») et parlent une langue similaire, connue sous le nom de Ma’ohi.

Exemples: le mot Moana = « océan » en tahitien, marquisien, maori, somoa, hawaïen.

Manu = « oiseau » dans les mêmes langues.

Notre excursion, le long de la côte nord et est de Hiva Oa, se poursuit.

p
Arrivée au bourg de Hanaiapa, au nord de Hiva Oa

L’île est splendide! Et très peu visitée. Aucune pension, aucun commerce dans les villages que nous traversons.

« Les gens ne sont pas très intéressés, nous dit Brian. Ils ont ce dont ils ont besoin ici. L’océan pour la pêche. La forêt où ils peuvent récolter papayes, avocats, corossols, noix de coco, mangues, pamplemousses. Ils élèvent leurs cochons, leurs poules, leurs chèvres. Ils sont tranquilles. Pourquoi faire dormir des touristes ici? »   

2dec3
Hanaiapa compte environ 200 habitants.

2dec4plus1
La petite plage de Hanaiapa, le lundi 2 janvier. Qui n’aimerait pas passer quelques jours ici?

En route pour le site archéologique de Lipona, à Puamau, à la pointe est de l’île, nous traversons, entre de profondes vallées, des paysages majestueux.

2dec8
Une des magnifiques baies situées sur la côte est de Hiva Oa

2dec6
Arrêt entre Hanaiapa et Hanapaaoa

2dec7
au-dessus de panoramas de rêve. Ci-dessus, avant le bourg de Nahoe

Après 90 minutes de route, nous arrivons au village de Puamau (200 habitants) où un déjeuner nous attend « Chez Marie-Antoinette. »

2dec9
Menu du restaurant « Chez Marie-Antoinette ». 2500 CFP (Franc Pacifique) = 21 euros ou CAN$30

2dec11
Notre groupe, réuni autour de Brian, à la table de l’unique restaurant de Puamau, « Chez Marie-Antoinette », le lundi 2 janvier

Avant de rentrer à Atuona, dernier arrêt, au-dessus de Puamau, au site archéologique de Lipona, l’un des plus importants des Marquises

2dectiki1
Le site de Lipona est un immense « meae » (sanctuaire religieux) qui couvre près de deux hectares. Le site représente l’un des principaux témoignages de la civilisation marquisienne, à son apogée, avant l’arrivée des Européens.

Que se passait-il ici exactement dans cet immense sanctuaire? Des sacrifices? Des offrandes?

Qui était habilité à diriger et à participer à ces cérémonies religieuses?

Dans quel but ces cérémonies avaient-elles lieu?

Autant de questions qui font toujours aujourd’hui débat.

lipona
Selon les historiens, l’aménagement du site de Lipona date du 18è siècle. De nombreux « tikis« , comme ceux ci-dessus, ont été découverts au siècle dernier puis restaurés par des équipes d’archéologues. Les travaux et les recherches continuent.

Comme pour les statues de l’île de Pâques, les « tikis » de Lipona, comme ceux des îles voisines, n’ont toujours pas livré leurs secrets.

À noter: le site de Lipona figure en bonne place dans le dossier de candidature des îles Marquises au patrimoine mondial de l’UNESCO. Une décision doit être rendue en 2024.

bplus
Aperçu de la baie d’Atuona, le lundi 2 janvier.

Retour à Atuona

r1
Ultime randonnée matinale, le mardi 3 janvier. Nous quittons Hiva Oa le lendemain.

R1plus1
au-dessus du village d’Atuona. Sur la droite, en blanc, l’église de l’immaculée Conception.

R2Plus1
La journée, comme toutes celles que nous avons passées ici, s’annonce splendide! Au fur et à mesure que nous grimpons, nous observons la vie dans la cour des maisons du village.

R3plus1
Nous nous dirigeons vers l’un des lieux emblématiques d’Atuona…

gauguin1
… « le cimetière du Calvaire » où reposent, à quelques pas l’un de l’autre, le peintre Paul Gauguin (1848-1903)

brel
… et le chanteur Jacques Brel (1929-1978)

Les deux artistes ont laissé à Hiva Oa des souvenirs bien différents. J’ai déjà parlé dans un article précédent de l’héritage très controversé de Gauguin en Polynésie française – et aux Marquises en particulier, où, affaibli, malade, il a passé les dernières années de sa vie. Je laisse à d’autres le soin de juger de sa conduite. Il nous reste ses tableaux. Magnifiques.

Vahiné no te tiare
Vahiné no te tiare (Femme tahitienne avec une fleur) de Paul Gauguin, 1891.

La visite du petit musée qui lui est consacré, à côté de l’espace Brel, à Atuona, a été l’un des temps forts de notre séjour. Nous y avons passé, en arrivant, un long moment. Excellente chronologie des années mouvementées de voyage de Gauguin. On peut aussi admirer, au calme, des dizaines de reproductions de son oeuvre. Une visite incontournable.

gauguin
« La maison du jouir » de Paul Gaugin, à Atuona, a été restaurée et est située dans le village à son emplacement d’origine.

Jacques Brel, de son côté, séduit rapidement les habitants d’Atuona lorsqu’il débarque sur son voilier, en 1975. Maddy, sa compagne, d’origine guadeloupéenne, est du voyage.

Très vite, Brel s’intègre à la vie du village et multiplie les initiatives. Il fait venir d’Europe des caisses de livres et monte une bibliothèque pour les enfants d’Atuona. Il lance une salle de cinéma. Vend son voilier et prend des cours de pilotage. Il achète un avion. Livre le courrier vers des îles lointaines, aux Marquises. Il rapatrie même vers les hôpitaux des femmes malades ou enceintes.

brel
Jacques Brel

Malheureusement, Brel est atteint « d’une grippe qui ne soigne pas. » Il s’éteint, en France, en 1978.

Un bel espace, dans un immense hangar, lui est dédié. On peut y voir son avion, restauré, le Jojo. Un haut-parleur diffuse ses plus belles chansons, y compris l’une de mes préférées ici.

27dec4
L’une des principales voies d’entrée à Atuona, en venant (par la route) de Taaoa. Aucun risque d’embouteillage ici.

Après deux mois de voyage, il faut se résoudre à rentrer!

Avant de terminer cette série d’articles, je tenais à partager quelques-uns des visages et des lieux qui ont particulièrement marqué notre séjour en Polynésie. Les voici, en ordre chronologique.

vp19
Au marché de Papeete, le dimanche 13 novembre. Il existe en Polynésie française une très importante communauté chinoise. Fortement intégrée, elle rayonne dans le commerce et le milieu des affaires. La communauté descend en majorité des ouvriers venus travailler dès 1860 dans les plantations de coton du territoire.

portraits4
« Sam », photographié au-dessus du belvédère Toatea, à Moorea, le jeudi 17 novembre – Photo: Diana

portrait1D
Giovanni, chauffeur de taxi et musicien, à l’aéroport de Raiatea, le mardi 29 novembre. Photo: Diana

portraits3d
Herenui, Hinanui et Evens, à notre pension, le jour de notre départ de Maupiti, le mardi 6 décembre. Beaucoup d’émotions ce jour-là. Photo: Diana.

bora1
Réveil à Bora Bora, le mercredi 7 décembre. La photo a été prise vers 6 heures du matin, à deux pas de notre modeste pension, à la pointe Matira.

Borabora7dec
En route, quelques heures plus tard, pour l’aéroport de Bora Bora.

christian et marguerite
Marguerite et son mari Christian tiennent dans le quartier Paofai à Papeete le restaurant « Le Phénix d’Or ». Leur établissement est vite devenu notre cantine là-bas le midi. Excellente cuisine cantonaise.

p1
En compagnie de Mario, le père de Christian (photo précédente). Mario est né à Tahiti. Tout comme son père. Mario et moi avons exactement le même âge. Papeete, le jeudi 15 décembre.

VP20 26decJessica Nuku Hiva
Jessica qui nous a si gentiment invités à partager avec elle et ses amis à Taiohae (Nuku Hiva) le repas de Noël.

pm
Portrait de famille, le dimanche 25 décembre, à la sortie de la messe de Noël

pm1
à la cathédrale Notre-Dame-des-Îles-Marquises, à Nuku Hiva.

portraits5
Patrick, jardinier, menuisier, chauffeur et homme à tout faire à Atuona, le mardi 27 décembre. Éloignés des services disponibles dans les centres urbains (Papeete/Moorea), les « îliens » sont extrêmement polyvalents – et fiers de vivre une existence basée sur leur auto-suffisance. Nous avons été conquis. Photo: Diana

Trois dernières remarques. (Il pourrait y en avoir plusieurs autres tant nous avons écouté et appris ici)

1. – Lorsqu’on demande à un(e) Polynésien(ne) (hors Papeete) où il/elle aimerait partir en voyage, la réponse, surprenante, a été presque partout la même. Ce n’est pas de Rome, Paris ou New York dont ils rêvent. La plupart des Polynésiens souhaitent plutôt visiter, chez eux, l’un des archipels qu’ils ne connaissent pas – les Marquises ou les Tuamotu sont souvent mentionnées.

2. – Pour les familles polynésiennes, le weekend idéal est souvent un séjour dans leur « plantation », un lopin de terre qu’ils possèdent ou louent à l’intérieur des terres. À défaut, ils prennent une tente et vont camper au bord d’une plage lointaine. Ou ils vont à la pêche. Dans les trois cas, l’objectif est le même: se rapprocher de la nature et vivre en famille en communion avec elle.

3. – Tout le monde aux Marquises et sur les îles (hors Papeete/Moorea) se connait! Lorsqu’à Taiohae (Nuku Hiva) je montrais les photos d’une excursion réalisée à l’autre bout de l’île, on me répondait, invariablement, « Oui, je le connais, il s’appelle…« . « Celui-là aussi, c’est mon oncle (ou cousin), il s’appelle… » J’ai rarement vu un peuple aussi soudé. Cohésion qui saute aux yeux lors des  messes dominicales. La ferveur des assemblées – les chorales sont accompagnées de tambours, d’ukélélés, de guitares – est prodigieuse.

Un autre exemple? Les tables où sont entreposés les produits, au marché de Nuku Hiva, ne sont pas surveillées. Elles appartiennent aux familles de la communauté. Chacun va et prend ce dont il a besoin. On se dirige ensuite vers une autre table où quelqu’un note sur un registre les produits achetés et de quelle table ils proviennent. Le revenu de la vente est ensuite acheminé à la famille concernée.

2dec13
Forêt de cocotiers à l’extérieur du village de Puamau, le lundi 2 janvier.

Le dernier mot est pour Diana.

Diana qui m’a si vaillamment accompagné pendant ces deux mois! Diana qui a bravé les lézards, les moustiques, la chaleur, l’humidité et nos multiples (16) sauts de puce en avion depuis la mi-novembre!

Ce voyage aurait été bien différent si je ne l’avais pas eue à mes côtés!

30dec avec Mahi
En compagnie de Mahi, à notre pension, à Atuona, le vendredi 30 décembre.

Lilly
et avec Lilly, le jour de notre départ d’Hiva Oa

mairesse
Dernière rencontre à l’aéroport d’Hiva Oa avec Joëlle Frébault, la mairesse d’Atuona, en route elle aussi pour Papeete, le mercredi 4 janvier.

En quittant la Polynésie, je ne peux m’empêcher de penser à mon pays d’origine – Haïti – où l’on pouvait aussi, autrefois, au bord de la mer, en français et en créole, profiter de la même douceur de vivre.

27dec
Devant la plage de Taaoa, le mardi 27 décembre

Nous avons réalisé en Polynésie notre plus beau voyage!

Nous avions souvent entendu dire en planifiant cette aventure que les Polynésiens étaient le peuple le plus chaleureux, le plus accueillant de la terre. Et c’est si vrai!

Où d’autre, hors Polynésie, reçoit-on un collier de fleurs ou de coquillages en arrivant à destination?

Et un second collier au moment du départ!

Où d’autre les gens se tutoient-ils dès la première rencontre, dès le premier regard?

28decTepua
Tepua, rencontrée le mercredi 28 décembre à Hapatoni, sur l’île de Tahuata

Tout cela va beaucoup, beaucoup nous manquer!

Mais nous savons déjà que nous reviendrons!

27dec2
Petite maison à l’extérieur du village de Taaoa

Après plusieurs heures de voyage, une nuit en transit à San Francisco, nous sommes maintenant de retour à la maison.

Un grand changement est en cours dans notre quartier, Mount Pleasant. Notre rue va être en 2023/24 complètement transformée, métamorphosée, en voie verte et piste cyclable. Plus aucune automobile ne circulera devant nos fenêtres.

Le bonheur absolu. Bon début d’année à tous!

Nuku Hiva – Noël aux Marquises

20dect
Aperçu de la baie du village de Taiohae, le mardi 20 décembre au petit matin. Le village est situé au sud de l’île de Nuku Hiva, dans l’archipel des Marquises. Taiohae est la principale commune de l’île et compte environ 2 000 habitants.
21decpq1
Pêcheurs et marchands s’affairent au « petit quai » de Taiohae, vers 6h du matin…
21decpq2
… le mercredi 21 décembre
20decallan
… pendant qu’Allan, à deux pas, vend au marché matinal du « petit quai » fruits et légumes provenant de la plantation familiale
18dec1
Match amical de volleyball au bord de la baie de Taiohae, le dimanche 18 décembre, en fin d’après-midi
carteplus_marquises
Situées à 1500 kms au nord-est de Tahiti, l’archipel des Marquises se compose de 12 îles, dont seulement 6 sont habitées. Soulignée en rouge, l’île de Nuku Hiva, la plus grande et la plus peuplée (environ 3000 habitants) de l’archipel. Au sud, l’île de Hiva Oa qui sera, entre le 26 décembre et le 4 janvier, la dernière étape de notre voyage de deux mois en Polynésie française.
nuku-hiva
Nuku Hiva est après Tahiti l’île la plus vaste de la Polynésie française. Soulignés en vert, quelques-uns des lieux visités pendant notre séjour. De l’aéroport, situé au nord-ouest de l’île, il faut compter une bonne heure trente de route pour rejoindre Taiohae.

Après cinq semaines passées aux îles de la Société et dans l’archipel des Tuamotu, changement complet de décor et d’atmosphère en arrivant aux Marquises!

Presque tout est différent ici. Le climat, plus chaud et sec. La langue, on parle dans l’archipel le Marquisien. La faune. La flore. L’artisanat. Même le fuseau horaire diffère. Lorsqu’il est midi à Tahiti, il est midi trente à Nuku Hiva.

Matiki
Comité d’accueil inattendu à notre arrivée à l’aéroport de Nuku Hiva, le vendredi 16 décembre…
matiki1
« Matiki » (c’est son surnom) surgit entre deux voitures garées sur l’aire de stationnement de l’aéroport… et nous souhaite la bienvenue (« Mave Mai »!) à Nuku Hiva! « Kaoha » (merci, en marquisien), Matiki!
communiqué
Communiqué affiché devant le magasin Larson à Taiohae

« Il n’a pas plu ici depuis deux mois », nous annonce Jérôme dans la petite camionnette qui nous emmène, le 16 décembre, de l’aéroport vers notre pension, à Taiohae, tout au sud de l’île.

Nous sommes six à bord, descendus quelques minutes plus tôt du vol d’Air Tahiti qui relie tôt le matin Papeete à Nuku Hiva (3h15 de vol).

Il est 10h30. Il fait déjà près de 30 degrés.

Jérôme, la trentaine, est enseignant et directeur d’une école primaire à Taiohae. Il revient d’une formation de trois jours à Papeete. Il est heureux et « fier » d’être de retour « sur son île » qu’il connaît comme sa poche. Son père, Justin, est au volant.

Dans la camionnette, Jérôme partage généreusement informations et opinions sur les îles de l’archipel. Qu’il a pratiquement toutes visitées.

Encore un peu étourdis par le voyage, nous l’écoutons attentivement.

Il nous parle d’abord de Gauguin (décédé à Hiva Oa). « On ne l’aime pas beaucoup aux Marquises, à cause de ses positions anticléricales. Les églises ici jouent un rôle important dans la communauté. On les respecte. »

Jérôme nous parle ensuite du drame des familles marquisiennes qui voient s’éloigner leurs enfants après la classe de Troisième (Grade 9) au collège. Il n’y a dans l’archipel qu’un ou deux lycées agricoles ou techniques. Pour poursuivre leurs études au-delà de la Troisième, pour décrocher un Bac (scientifique ou littéraire), les élèves doivent aller à Raiatea ou à Papeete. Où ils sont, pendant trois longues années (hors vacances scolaires), privés de leurs familles.

Les déplacements et les frais d’internat à Raiatea ou à Tahiti sont pris en charge par le gouvernement. Chaque étudiant a droit, pendant sa scolarité au lycée, à deux allers-retours par an (à Noël et en juillet) entre Tahiti ou Raiatea et son île de résidence aux Marquises.

(Le même dispositif est en place pour les étudiants vivant aux Îles Sous-le Vent ou dans les Tuamotu. Dans les deux cas, les élèves ont aussi le choix de poursuivre leur scolarité, au-delà de la Troisième, dans un lycée à Raiatea ou à Papeete.)

A mes côtés dans la camionnette, un autre résident de l’île, Philippe, originaire de Levallois-Perret, en région parisienne. Philippe travaille « dans la Santé » et habite Nuku Hiva depuis 28 ans. Il ne se voit plus vivre ailleurs. « C’est chez moi ici maintenant. »

A l’extérieur, sous un grand ciel bleu, des montagnes majestueuses, arides, surplombent une piste étroite, récemment goudronnée. Peu de véhicules sur la route.

Entre deux virages, on aperçoit, au bord du chemin, un troupeau de chevaux en semi-liberté…

« Mave Mai » à Nuku Hiva!

chevaux
Chevaux galopant au bord la route à Nuku Hiva

Il nous faudra plus d’une heure et demie pour rejoindre, de l’aéroport, notre pension, à Taiohae.

22decpension
Notre pension, côté montagne… (notre chambre est en haut, à droite)
rc
… et côté océan avec, du balcon, une vue sur la baie de Taoihae. La plage est à cent mètres.

À première vue – pour ceux qui connaissent le village de Masset, situé au nord de l’île Graham, dans l’archipel Haïda Gwaïï, au large de la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique – Taoihae a quelque chose de familier.

Mêmes plages de sable noir. Même atmosphère languide dans les rues. Même sentiment d’être ici au bout du monde. Mêmes visages surtout, des anciens, marqués par une histoire douloureuse.

Ce qui s’est passé ici, aux Marquises, doit être rappelé.

Dès l’annexation de l’archipel par les autorités françaises en 1842, la culture marquisienne est rapidement marginalisée, dévalorisée.

La langue marquisienne est interdite. Par les missionnaires catholiques d’abord puis par l’administration coloniale. Très vite, les danses, les chants traditionnels, les tatouages sont à leur tour interdits dans l’archipel. Toute la culture d’un peuple périclite, dépérit.

Les étrangers amènent également avec eux les maladies, l’alcool, la syphilis, les armes à feu. La population est anéantie. Avant l’arrivée des européens aux Marquises, on estime la population de l’archipel à entre 80 000 et 100 000 habitants. Ils ne sont plus que 18 000 en 1842, 5 246 au recensement de 1887 et seulement 2 080 en 1926. Une hécatombe.

Heureusement, le vent, bientôt, tourne. Depuis une cinquantaine d’années, aidés par une forte natalité, les Marquisiens se sont peu à peu réappropriés leur langue et leur culture. Le Marquisien est maintenant enseigné à l’école, diffusé dans les médias, parlé dans les commerces.

L’art marquisien (tatouages, sculptures, chants, danses) est aujourd’hui en plein essor. Tous les quatre ans a lieu sur l’une des îles de l’archipel un grand festival des Arts.

Le long bec de l’espadon (le rostre) a été travaillé, sculpté et transformé en une oeuvre d’art qui fait écho aux couteaux traditionnels servant aux Marquises à égorger les cochons.

Réveil à l’aube le mardi 20 décembre…

… afin d’assister au « grand quai » de Nuku Hiva à l’arrivée du mythique cargo-mixte Aranui 5
… un navire de ravitaillement qui dessert, deux fois par mois, les Marquises. Le navire est aussi un bateau de croisière qui peut accueillir plus de 200 passagers
… passagers qui sont vite pris en charge lors de leur courte escale à Nuku Hiva…
20decan8
… par une organisation réglée comme du papier à musique! Après une cérémonie de bienvenue sur le quai, les passagers de l’Aranui 5…
caminnettes
… sont répartis en deux groupes – francophones d’un côté, anglophones et germanophones de l’autre – et s’engouffrent dans des camionnettes qui vont leur faire, en quelques heures, « découvrir » Niku Hiva…
20decleytonhivaoa
… sous la houlette de guides expérimentés comme Leyton, ci-dessus, Marquisien né à Hiva Oa. Les passagers seront de retour sur le navire dans l’après-midi, avant l’appareillage, en soirée…

C’est une façon bien particulière de voyager. Ce n’est pas la nôtre.

Quels contacts véritables les passagers de l’Aranui 5 auront-ils, en quelques heures, avec la population?

21decbaiecol2
Petite randonnée de 90 minutes au-dessus de Taiohae en direction de « la baie Colette », le mercredi 21 décembre…
21decbaiecol
… Nous partageons la plage avec une famille et quelques nageurs, dans une mer toujours agitée dans cette partie de l’île. Une légende dit qu’une goélette – Le Colette – s’est abîmé autrefois ici. D’où le nom de la baie.
petitquai2
Retour matinal au « petit quai » de Taiohae, le vendredi 22 décembre. Pour info, le thon rouge ci-dessous, fraîchement pêché se vend 600 CFP (5 euros) le kilo à Nuku Hiva. Le même poisson se vendra 2 000 CFP (16 euros) à Papeete.
20decisabelle et Tevaea
Isabelle et Tevaea ont été toutes les deux aux petits soins pour nous pendant notre séjour à Nuku Hiva. « Vaie Nui » (Merci beaucoup!)
Tonata, 3 enfants
Merci aussi infiniment à Tonata! Nous n’oublierons pas votre gentillesse, toutes les trois!

En compagnie de Kelly, notre guide, née à Taiohae, et de deux jeunes femmes, logées à notre pension, grande excursion le vendredi 23 décembre autour de Niku Hiva. Objectif: la visite des « trois vallées » situées sur la côte est de l’ile: la vallée de Taipivai, la vallée de Hatiheu et la vallée Aakapa, cette dernière sise non loin de l’aéroport. (SVP voir la carte plus haut)

23dectour
Au-dessus de Taoihae le vendredi 23 décembre. Notre guide, Kelly, est en vert, sur la droite.
23decchev2
Troupeau de chevaux semi-sauvages sur la route entre Taiohae et Hatiheu

Après une heure de route, au milieu de paysages spectaculaires, nous arrivons sur une crête qui surplombe le village de Hatiheu (200 habitants)

va2hatiheu
La baie de Hatiheu, le vendredi 23 décembre
Dec23Hatiheu
et nous plongeons ensuite jusqu’à la petite plage qui borde le village. J’ai l’impression d’être de retour sur la côte sud d’Haïti!
23decHat2
Partout, à Hatiheu, sourires et « kaoha » nous accompagnent!

Passage obligé à Hatiheu par le restaurant « Chez Yvonne » où nous nous régalons… 

menu
Menu du jour « Chez Yvonne » à Hatiheu
23decrep
Poisson cru accompagné de « uru » (arbre à pain) et de manioc

Nous quittons Nuku Hiva lundi matin pour Hiva Oa. Un vol d’une quarantaine de minutes.

Il nous sera difficile de quitter cette belle et grande île sauvage des Marquises!

Les gens ici comme partout où nous sommes passés en Polynésie ont été si accueillants!

Vaie Nui! Vaie Nui! (Merci! Merci!)

23dec3
Jeune cavalier rencontré sur la route de Hooumi, dans la vallée Taipivai, le vendredi 23 décembre
23decmax
Quelques minutes plus tôt au bord de la plage du village de Hooumi, à la pointe sud-est de Nuku Hiva

Notre voyage en Polynésie française malheureusement tire à sa fin.

Faut-il déjà rentrer?

18dec2
Partie de pétanque au bord de la plage, à Taiohae, le dimanche 18 décembre.

Avant de quitter Nuku Hiva, nous sommes allés tôt ce matin, samedi 24 décembre, faire un dernier tour au « petit quai » de Taiohae.

Nous vous laissons avec quelques images de ce village paisible des Marquises où tout le monde se connaît. Et où chacun oeuvre, semble-t-il, sereinement, au bien-être de la communauté. 

amis
Esther, Jean-Gendron et Joseph à la table du petit marché du samedi de Taiohae, ce matin, 24 décembre
24dec2
Le samedi matin, dès l’aube, le « petit quai »…
24dec3
… de Taiohae est particulièrement…
24dec4
… animé. Tout le village se donne rendez-vous autour des étals où l’on découpe et vend le poisson.

JOYEUX NOËL À TOUS!

Jours tranquilles à Tikehau

9decmanihihi70ans
Rencontre avec Manihinini, jardinant devant sa maison, près du village de Tuherahera, sur l’île de Tikehau, dans l’archipel des Tuamotu, le vendredi 9 décembre. Manihinini est née à Tikehau…   
A10decAhfou
… tout comme Ahfou, 69 ans, qui reçoit chaleureusement ses clients, quelques centaines de mètres plus loin, dans son petit magasin du village

Après avoir couru d’île en île pendant un mois, nous nous sommes posés cette semaine au bord d’une petite plage tranquille sur l’île de Tikehau, dans l’archipel des Tuamotu – « les îles basses, à fleur d’eau » en tahitien. 

Cela nous a fait beaucoup de bien de souffler un peu!

7dec8
La plage de notre pension, le jour de notre arrivée, le mercredi 7 décembre. Beau temps toute la semaine (sauf dimanche/lundi) à Tikehau!
10decfamille
Fin de souper à la pension le samedi 10 décembre en compagnie d’un couple tahitien, accompagné de leurs deux enfants. Le couple (fonctionnaires tous les deux) vit sur la presqu’île, à Tahiti. À l’arrière-plan, les propriétaires de la pension. Une belle soirée d’échanges.
carte1plus100polynesie_francaise-scaled
Tikehau (flèche orange) est située au nord de l’archipel des Tuamotu. L’archipel compte 76 îles, basses, coralliennes. Une dizaine de ces îles seulement sont inhabitées. À vol d’oiseau, Tikehau est à environ 300 kilomètres de Papeete.
carte4tikehau
Tikehau est composée d’une couronne de motus (atolls) inhabités pour la plupart. Au centre, un immense lagon, d’environ 26 kms de diamètre. Le village principal, Tuherahera, est situé sur le motu du même nom, tout au sud de la couronne. Environ 575 habitants vivent à Tikehau. 
tuheraheramap
Le motu Tuherahera regroupe à Tikehau la majorité des commerces et des pensions, y compris la nôtre (trait orange). D’un côté, le lagon (eau turquoise), de l’autre, l’océan. L’île vit principalement du tourisme, de la pêche et du coprah.

Le motu Tuherahera – 6 kilomètres de long, un de large – est une étroite bande de terre perdue dans le Pacifique. Sur cet atoll aride, on retrouve (en plus des forêts de cocotiers) l’aéroport, le port, la mairie, l’école (76 élèves, au primaire), la poste, un comptoir d’Air Tahiti, deux petits magasins et une boulangerie. Ces commerces fournissent aux résidents le strict nécessaire.

Un bateau – le Dory – vient une fois la semaine, le mardi, de Papeete, approvisionner l’île en produits frais: fruits, légumes, viandes. Le Dory livre aussi ici la marchandise et le fret nécessaires aux habitants: appareils électro-ménagers, pièces détachées pour les véhicules, etc…

En plus du Dory, une goélette, en provenance de Tahiti, le Mareva Nui, fait escale tous les quinze jours afin de livrer vivres et provisions. Le Mareva Nui ravitaille pendant son parcours une demi-douzaine d’autres îles dans les Tuamotu. Ces deux navires sont ici des liens essentiels avec l’extérieur.   

9pportplus
Vue partielle du port de Tikehau. Sur la gauche, l’excellent « snack Ohina. »
9dec
Deux visages de Tikehau. Ci-dessus, exploration en vélo d’une des pistes du motu Tuherahera et, ci-dessous…
10dec2cente ville
Le « centre-ville » de Tuherahera. À gauche, l’un des deux magasins du village. Sur la droite, l’une des deux routes goudronnées qui traverse le motu.
8decTuane
À l’intérieur, Tuane veille au bon fonctionnement du magasin. Comme des milliers de Polynésiens, la famille de Tuane a de profondes racines chinoises.
13dec1
Des enfants jouent devant une maison du village de Tuherahera. Les vacances ont déjà commencé ici. L’école reprend le 9 janvier. Élèves et enseignants ont un mois de vacances pour la Noël!

Notre pension est située à un kilomètre à l’est du village sur un immense terrain arboré sur lequel sont nichés sept ou huit bungalows 

13dec
Aperçu du jardin de notre pension
9ppension
La terrasse de notre petit bungalow. À l’arrière-plan, à quelques mètres, la mer. Le village est à dix minutes en vélo 

Notre logis, propre, ensoleillé, doté d’une jolie terrasse, d’un frigidaire, d’un ventilateur, d’une salle de bains, est modeste. Très modeste. C’est sans doute le logement le plus simple depuis le début de notre voyage. Mais le bungalow nous convient parfaitement. La plage est à trente mètres. Pour y parvenir…

9pmarche2plage
Quelques pas dans le sable chaud et blanc de la cour de la pension…
10decplage
Et nous y sommes – en trente secondes!

Nous sommes ici en demi-pension. La nourriture – poisson, légumes, crudités – est excellente. Que demander de plus?

Comme à Huahine, un élément complètement inattendu nous attend ici!

Un élément que nous avons dû vite incorporer dans nos multiples baignades quotidiennes

requin
Trois ou quatre petits requins à pointes noires (voir ci-dessus) fréquentent notre plage!! Ces requins, inoffensifs, vivent dans les eaux côtières peu profondes et se nourrissent de minuscules poissons. Ils ne représentent aucun danger – sauf s’ils sont excités par de la nourriture. Nous voilà avertis! Photo: Igor – avec mes remerciements.

Quelle surprise de voir et de nager près de ces petits requins!

12decdéjeuner1
Salade composée et sashimi de thon, snack Ohina, près du port de Tikehau, le lundi 12 décembre.

Nous avons vraiment ralenti à Tikehau. Pris le temps de goûter à la douceur de vivre dans cette petite île magnifique.

Une autre merveille après Maupiti.

8dec1
À quelques centaines de mètres de notre pension, le motu Tuherahera, le jeudi 8 décembre.
dianafin
Diana en conversation en tout début de soirée sur une plage près de notre pension, le dimanche 11 décembre
cote2 ocean
Le motu Tuherahera, côté océan, le samedi 10 décembre

Nous avons pris le temps ici aussi de bavarder avec les clients et les employés de la pension.  

10dectata
Conversation à la pension avec « Tata », très intéressée par l’élaboration et la mise en page de ce blog de voyages. Photo: Diana
11decguitare
Soirée musicale à la pension, le dimanche 11 décembre. À la guitare, Andrew, 16 ans. Photo: Diana
11decsuzanne
Suzanne, née à Tikehau, est revenue sur l’île pour sa retraite après de longues années passées à Papeete.

Tout n’est pas rose cependant en Polynésie française!

Par exemple, lorsqu’on regarde attentivement les habitants de ces îles lointaines

9decaugustine
Augustine est venue en vélo faire quelques courses dans l’un des magasins de Tuherahera, le samedi 10 décembre

La vie quotidienne, souvent sédentaire, et l’alimentation surtout, font parfois sourciller.

10dec
Une demie-douzaine de bouteilles de soda remplissent le carton de ce client dans une boutique de Tuherahera    

L’espérance de vie en Polynésie française est de 74 ans chez les hommes et de 79 ans chez les femmes (chiffres de 2020). À titre de comparaison, cette même espérance de vie est, en métropole (en France), de 79 ans pour les hommes (+5) et de 85 ans pour les femmes (+6). Une différence substantielle.

Comment expliquer cette différence?

En partie par le nombre élevé de maladies cardiovasculaires et les cas de diabète, deux pathologies très fréquentes ici.  

10decRepeta67ansaustrales
Devant leur petit magasin, l’épouse d’Ahfou, Repeta, née aux Îles australes

Surprise dimanche matin alors que nous assistons à la messe dans la petite église du village.

11decmesse
Messe célébrée entièrement en tahitien… où nous retrouvons au premier rang, en chemise blanche, sur la gauche, de dos, Ahfou…
11dec2messe
…et Manihinini (à gauche) qui officie lors de la célébration… 

Cette semaine près de la plage à Tikehau nous a fait le plus grand bien.

Ces six jours de farniente ont été programmés à point – à mi-parcours de notre périple.

Ce genre de pause est essentiel au cours d’un voyage de deux mois.

9decplage3
La plage ensoleillée de notre pension de famille, le samedi 10 décembre

Nous repartons demain pour Papeete, où nous resterons deux jours, le mercredi 14 et le jeudi 15 décembre.

Nouveau départ très tôt, à 5h15, vendredi matin, le 16 décembre pour les Marquises.

Nous y séjournerons trois semaines, à deux jours près.

Du 16 au 26 décembre = l’île de Nuku Hiva

Du 26 décembre au 4 janvier = l’île de Hiva Oa

Les Marquises sont à 1500 kilomètres au nord-est de Tahiti et à plus de 3 heures d’avion de Papeete. 

Un autre monde nous attend là-bas!

12deccolliers
Confection de colliers à notre pension avec Judith, le lundi 12 décembre
13dec3
Le beau temps est revenu sur Tikehau, le mardi 13 décembre!

On vous embrasse de Tikehau!

Joyeuses Fêtes à Tous!