Raivavae est sans aucun doute l’île la plus sauvage que nous avons visitée jusqu’à présent en Polynésie française.
L’une des plus belles et captivantes aussi.






Environ 900 habitants vivent ici paisiblement de la pêche, de l’agriculture, du tourisme.
Tout le monde se connaît. Et se retrouve régulièrement lors des événements et des fêtes qui ponctuent la vie des quatre petites communes de l’île.


Malgré la construction en 2002 d’un aéroport qui permet de rejoindre Papeete en deux heures, une poignée de visiteurs seulement s’aventure chaque année jusqu’ici.


La météo est capricieuse à Raivavae. La nature, parfois hostile. Il pleut souvent. Comme dans les autres îles de l’archipel.
Nous avons donc eu droit pendant notre séjour à plusieurs averses abondantes et à de très fortes rafales de vent. Nous avons même pendant deux jours été privés d’internet, pour cause de forte houle.
Heureusement, ces intempéries ont été suivies de plusieurs longues et belles éclaircies. Nous avons eu des journées splendides!



Raivavae compte six pensions de famille disposant chacune de chambres ou de bungalows. Les logements sont très rarement tous occupés en même temps. En fait, à part les deux sympathiques couples (de St-Malo et de Paris) hébergés à notre pension, nous n’avons pratiquement vu ici aucun autre touriste.




Il n’y a pas d’hôtel à Raivavae. Les résidents (comme à Maupiti) n’en veulent pas. L’île a un restaurant, souvent fermé. Aucune banque (seulement un DAB à la poste). Pas de transport collectif. Ni de location de voiture. Très peu de circulation automobile.
La meilleure façon de se déplacer à Raivavae est le vélo. En version électrique, souvent, pour les résidents.


Trois ou quatre petits « magasins » vendent aux riverains quelques produits de première nécessité, le pain, l’huile, le riz, des pâtes, des soupes chinoises, en paquets. Une bouteille de vin très ordinaire coûte 2000 CFP Francs Pacifique (17 euros ou Can$25).
La plupart des habitants cultivent chez eux un petit potager où poussent des légumes (pommes de terre, salades, taro, tomates) et des arbres fruitiers (papayes, citrons, oranges)
Comme dans les autres petites îles en Polynésie, on se débrouille ici pour les services comme on peut. On fait appel à un voisin pour la plomberie ou pour régler un problème d‘électricité. On vend sur le bord de la route les produits de son jardin.
La communauté – à 90% protestante – est très soudée. Il n’y a ici aucun sans-abri ou de banque alimentaire, comme à Tahiti. Les gens s’entraident, partagent, échangent.





Comme souvent en Polynésie française, un des moments que j’apprécie le plus est le rituel des repas pris en commun le soir avec notre famille d’accueil. Les oreilles grandes ouvertes, nous écoutons attentivement les informations que partagent nos hôtes sur l’histoire de leurs îles.
Un soir, autour de la table du souper, Eléonore, la propriétaire de notre pension, n’hésite pas à résumer la façon dont la vie quotidienne a radicalement changé à Raivavae où elle est née, il y a plus de soixante ans.
« Raivavae autrefois produisait du café », nous dit-elle. Mais les plantations ont peu à peu disparu dans les années soixante lorsque les hommes de l’île sont partis travailler à Papeete et ailleurs afin de construire les nombreuses infrastructures du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) – l’organisme responsable de gérer les essais nucléaires français en Polynésie française entre 1966 et 1996.
Presque du jour au lendemain, précise Eléonore, les petites communes dans les Australes, dans les Tuamotu, dans les Îles Sous-le-Vent, se sont vidées. Les hommes sont partis, en masse, attirés par les paillettes de la ville (Papeete), l’argent facile, les tentations et les salaires alléchants offerts dans les chantiers du CEP.
Cet exode a eu un effet domino dévastateur dans ces petites îles. Les hommes étaient dans ces communautés les pêcheurs, ceux qui ramenaient tous les jours à la maison du poisson pour nourrir leurs familles. Ils cultivaient aussi les champs, entretenaient les plantations, de café notamment. Laissés maintenant à l’abandon.
Une fois les hommes partis, les sources d’alimentation dans les îles ont été bouleversées. Au milieu des années soixante, les boites de conserve venues de Tahiti ont progressivement remplacé le poisson frais. Le Nescafé est arrivé. Les grandes bouteilles de boissons gazeuses aussi. Ces produits nocifs importés de la métropole ont envahi le marché. Les traditions alimentaires des Polynésiens ont été profondément modifiées.
On apprend aujourd’hui en lisant la presse que le Coca-Cola produit en Polynésie est le plus sucré du monde. Et que le taux de sucre dans ces sodas augmente chaque année. Impunément. C’est inexcusable. Comment un gouvernement peut-il laisser des entreprises traiter ainsi les citoyens?
Les taux d’obésité et de diabète sont très élevés en Polynésie française. 70% de la population adulte est en surpoids dont 40% au stade d’obésité.
Eléonore conclut cette leçon d’histoire par une une note plutôt optimiste. Elle nous apprend que le gouvernement nouvellement élu le 30 avril, gouvernement indépendantiste, a dans son programme un vaste projet visant à encourager et à subventionner sur le territoire la reprise de pratiques agricoles traditionnelles. Quelle excellente idée!
Tous nos vœux de succès aux nouveaux élus et aux communes qui adhèreront à ce projet!

Grande effervescence le samedi 6 mai dans les communes de Raivavae! On célèbre le lendemain la grande fête du Mè!

De l’autre côté de l’île, dans le village de Vaiuru où doit avoir lieu cette première célébration du Mè, Guillaume, ci-dessous, à droite, accompagné des membres de la communauté, s’affaire. Il n’y a pas une minute à perdre! Plus de 200 convives sont attendus le lendemain pour le déjeuner dans la salle paroissiale de Vaiuru.


Dimanche, 7 mai. C’est le grand jour!
Des quatre coins de l’île, hommes, femmes et enfants se pressent devant l’église protestante de Vaiuru.




A l’intérieur de la salle, des chants, des cantiques, de la musique, une ambiance extraordinaire!




Un des objectifs principaux du Mè est de recueillir des membres de la paroisse des fonds pour l’église protestante de la Polynésie française.
Ces fonds serviront en partie à subventionner le coût des voyages des pasteurs et des missionnaires en Polynésie et ailleurs dans le monde.
Chacune des quatre communes de l’île organisera, dans sa paroisse, pendant le mois de mai, son propre Mè. Il y aura donc à Raivavae cette année quatre Mè – les 7, 14, 21 et 28 mai – événements auxquels participent les membres de la communauté protestante, s’ils le désirent.

Je me suis renseigné. Pour la seule île de Raivavae, les fêtes du Mè rapportent chaque année à l’église protestante de la Polynésie française plus de 5 millions de francs CFP, l’équivalent de 50 000 euros ou CAN $73 000.


Nous avons passé ici l’un de nos plus beaux et authentiques séjours en Polynésie française!
Notre vol de 40 minutes pour Tubuai – notre deuxième étape aux Australes – part vendredi après-midi.
Cela a été un vrai bonheur de retrouver à Raivavae l’accueil chaleureux et le sourire des Polynésiens.
L’aventure continue à Tubai puis à Rurutu.
On vous embrasse.





Toujours aussi passionnants tes carnets Max! Merci et bonne continuation de votre voyage!
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Merci beaucoup, Josiane! Nous avons vraiment a-d-o-r-é notre séjour à Raivavae. A chacune de nos étapes en Polynésie, nous écoutons les habitants et nous apprenons tellement de choses sur ces îles fascinantes qui ont chacune leurs traditions et une histoire bien particulière. Nous sommes depuis vendredi à Tubuai. Une autre belle découverte. Porte-toi bien. A bientôt.
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Sur la carte,
je vois que Raivavae n’est pas tellement loin de l’atoll de Mururoa où se sont tenus les essais nucléaires français. On a bien documenté les effets sur la santé de ces essais sur les habitants de Mangarova (archipel des Gambier, 500 km de Mururoa) où nous étions le mois dernier. Est-ce le cas pour Raivavae ou ailleurs dans l’archipel des Australes?
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Allo Alix, c’est une bonne question, je me suis renseigné avant de partir auprès de notre hôte Eléonore qui est née à Raivavae et qui connaît bien son île. Il n’y a pas eu selon elle d’effets négatifs sur la santé des habitants qui sont restés à Raivavae. Par contre, quelques hommes partis travailler sur les chantiers du CEP sont revenus avec des séquelles et certains de leurs enfants/compagnes ont à leur tour souffert de maladies. Il y a donc assurément un lien. Un lien sur lequel des groupes comme l’Association 193 travaillent activement. Bon retour à Montréal!
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Love the smiling people, floral crowns and picturesque rural scenes! Such a fabulous start to your return to the Polynesian islands.
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Thank you so much HITD! It would have been great to have you experience with us these wonderful islands! You would love it here! I hope everyone is coping well with the current (and early) heat wave in Vancouver. A bientôt.
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que de belles rencontres sur Raivavae! tant de couleurs, de joie et de sens de la communauté! c’est grâce a vous 2 que je découvre cette belle ile si lointaine et ses habitants chaleureux; Régalez vous chaque instant! bises
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Merci infiniment, Christiane! Cela nous fait vraiment plaisir d’avoir de tes nouvelles pendant ce voyage où nous découvrons tous les jours tant de merveilles. Les habitants dans ces petites îles des Australes sont, comme partout où nous sommes passés en Polynésie, ouverts et généreux. Nous sommes à Tubuai depuis 5 jours. Notre bonne étoile nous accompagne, journées chaudes, ensoleillées. Nous profitons de la plage, à deux pas de notre pension. Seul inconvénient, l’internet et le wifi ici sont très, très lents. Difficile de télécharger même une photo. ll faudra donc attendre Rurutu, notre prochaine escale, ou même aller jusqu’à Papeete, fin mai, avant de partager un nouvel article. Profite bien de tes belles randonnées dans le sud-ouest et au-delà. Tu nous manques et nous avons bien hâte de te revoir. Bises.
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