Nuku Hiva – Noël aux Marquises

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Aperçu de la baie du village de Taiohae, le mardi 20 décembre au petit matin. Le village est situé au sud de l’île de Nuku Hiva, dans l’archipel des Marquises. Taiohae est la principale commune de l’île et compte environ 2 000 habitants.
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Pêcheurs et marchands s’affairent au « petit quai » de Taiohae, vers 6h du matin…
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… le mercredi 21 décembre
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… pendant qu’Allan, à deux pas, vend au marché matinal du « petit quai » fruits et légumes provenant de la plantation familiale
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Match amical de volleyball au bord de la baie de Taiohae, le dimanche 18 décembre, en fin d’après-midi
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Situées à 1500 kms au nord-est de Tahiti, l’archipel des Marquises se compose de 12 îles, dont seulement 6 sont habitées. Soulignée en rouge, l’île de Nuku Hiva, la plus grande et la plus peuplée (environ 3000 habitants) de l’archipel. Au sud, l’île de Hiva Oa qui sera, entre le 26 décembre et le 4 janvier, la dernière étape de notre voyage de deux mois en Polynésie française.
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Nuku Hiva est après Tahiti l’île la plus vaste de la Polynésie française. Soulignés en vert, quelques-uns des lieux visités pendant notre séjour. De l’aéroport, situé au nord-ouest de l’île, il faut compter une bonne heure trente de route pour rejoindre Taiohae.

Après cinq semaines passées aux îles de la Société et dans l’archipel des Tuamotu, changement complet de décor et d’atmosphère en arrivant aux Marquises!

Presque tout est différent ici. Le climat, plus chaud et sec. La langue, on parle dans l’archipel le Marquisien. La faune. La flore. L’artisanat. Même le fuseau horaire diffère. Lorsqu’il est midi à Tahiti, il est midi trente à Nuku Hiva.

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Comité d’accueil inattendu à notre arrivée à l’aéroport de Nuku Hiva, le vendredi 16 décembre…
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« Matiki » (c’est son surnom) surgit entre deux voitures garées sur l’aire de stationnement de l’aéroport… et nous souhaite la bienvenue (« Mave Mai »!) à Nuku Hiva! « Kaoha » (merci, en marquisien), Matiki!
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Communiqué affiché devant le magasin Larson à Taiohae

« Il n’a pas plu ici depuis deux mois », nous annonce Jérôme dans la petite camionnette qui nous emmène, le 16 décembre, de l’aéroport vers notre pension, à Taiohae, tout au sud de l’île.

Nous sommes six à bord, descendus quelques minutes plus tôt du vol d’Air Tahiti qui relie tôt le matin Papeete à Nuku Hiva (3h15 de vol).

Il est 10h30. Il fait déjà près de 30 degrés.

Jérôme, la trentaine, est enseignant et directeur d’une école primaire à Taiohae. Il revient d’une formation de trois jours à Papeete. Il est heureux et « fier » d’être de retour « sur son île » qu’il connaît comme sa poche. Son père, Justin, est au volant.

Dans la camionnette, Jérôme partage généreusement informations et opinions sur les îles de l’archipel. Qu’il a pratiquement toutes visitées.

Encore un peu étourdis par le voyage, nous l’écoutons attentivement.

Il nous parle d’abord de Gauguin (décédé à Hiva Oa). « On ne l’aime pas beaucoup aux Marquises, à cause de ses positions anticléricales. Les églises ici jouent un rôle important dans la communauté. On les respecte. »

Jérôme nous parle ensuite du drame des familles marquisiennes qui voient s’éloigner leurs enfants après la classe de Troisième (Grade 9) au collège. Il n’y a dans l’archipel qu’un ou deux lycées agricoles ou techniques. Pour poursuivre leurs études au-delà de la Troisième, pour décrocher un Bac (scientifique ou littéraire), les élèves doivent aller à Raiatea ou à Papeete. Où ils sont, pendant trois longues années (hors vacances scolaires), privés de leurs familles.

Les déplacements et les frais d’internat à Raiatea ou à Tahiti sont pris en charge par le gouvernement. Chaque étudiant a droit, pendant sa scolarité au lycée, à deux allers-retours par an (à Noël et en juillet) entre Tahiti ou Raiatea et son île de résidence aux Marquises.

(Le même dispositif est en place pour les étudiants vivant aux Îles Sous-le Vent ou dans les Tuamotu. Dans les deux cas, les élèves ont aussi le choix de poursuivre leur scolarité, au-delà de la Troisième, dans un lycée à Raiatea ou à Papeete.)

A mes côtés dans la camionnette, un autre résident de l’île, Philippe, originaire de Levallois-Perret, en région parisienne. Philippe travaille « dans la Santé » et habite Nuku Hiva depuis 28 ans. Il ne se voit plus vivre ailleurs. « C’est chez moi ici maintenant. »

A l’extérieur, sous un grand ciel bleu, des montagnes majestueuses, arides, surplombent une piste étroite, récemment goudronnée. Peu de véhicules sur la route.

Entre deux virages, on aperçoit, au bord du chemin, un troupeau de chevaux en semi-liberté…

« Mave Mai » à Nuku Hiva!

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Chevaux galopant au bord la route à Nuku Hiva

Il nous faudra plus d’une heure et demie pour rejoindre, de l’aéroport, notre pension, à Taiohae.

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Notre pension, côté montagne… (notre chambre est en haut, à droite)
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… et côté océan avec, du balcon, une vue sur la baie de Taoihae. La plage est à cent mètres.

À première vue – pour ceux qui connaissent le village de Masset, situé au nord de l’île Graham, dans l’archipel Haïda Gwaïï, au large de la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique – Taoihae a quelque chose de familier.

Mêmes plages de sable noir. Même atmosphère languide dans les rues. Même sentiment d’être ici au bout du monde. Mêmes visages surtout, des anciens, marqués par une histoire douloureuse.

Ce qui s’est passé ici, aux Marquises, doit être rappelé.

Dès l’annexation de l’archipel par les autorités françaises en 1842, la culture marquisienne est rapidement marginalisée, dévalorisée.

La langue marquisienne est interdite. Par les missionnaires catholiques d’abord puis par l’administration coloniale. Très vite, les danses, les chants traditionnels, les tatouages sont à leur tour interdits dans l’archipel. Toute la culture d’un peuple périclite, dépérit.

Les étrangers amènent également avec eux les maladies, l’alcool, la syphilis, les armes à feu. La population est anéantie. Avant l’arrivée des européens aux Marquises, on estime la population de l’archipel à entre 80 000 et 100 000 habitants. Ils ne sont plus que 18 000 en 1842, 5 246 au recensement de 1887 et seulement 2 080 en 1926. Une hécatombe.

Heureusement, le vent, bientôt, tourne. Depuis une cinquantaine d’années, aidés par une forte natalité, les Marquisiens se sont peu à peu réappropriés leur langue et leur culture. Le Marquisien est maintenant enseigné à l’école, diffusé dans les médias, parlé dans les commerces.

L’art marquisien (tatouages, sculptures, chants, danses) est aujourd’hui en plein essor. Tous les quatre ans a lieu sur l’une des îles de l’archipel un grand festival des Arts.

Le long bec de l’espadon (le rostre) a été travaillé, sculpté et transformé en une oeuvre d’art qui fait écho aux couteaux traditionnels servant aux Marquises à égorger les cochons.

Réveil à l’aube le mardi 20 décembre…

… afin d’assister au « grand quai » de Nuku Hiva à l’arrivée du mythique cargo-mixte Aranui 5
… un navire de ravitaillement qui dessert, deux fois par mois, les Marquises. Le navire est aussi un bateau de croisière qui peut accueillir plus de 200 passagers
… passagers qui sont vite pris en charge lors de leur courte escale à Nuku Hiva…
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… par une organisation réglée comme du papier à musique! Après une cérémonie de bienvenue sur le quai, les passagers de l’Aranui 5…
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… sont répartis en deux groupes – francophones d’un côté, anglophones et germanophones de l’autre – et s’engouffrent dans des camionnettes qui vont leur faire, en quelques heures, « découvrir » Niku Hiva…
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… sous la houlette de guides expérimentés comme Leyton, ci-dessus, Marquisien né à Hiva Oa. Les passagers seront de retour sur le navire dans l’après-midi, avant l’appareillage, en soirée…

C’est une façon bien particulière de voyager. Ce n’est pas la nôtre.

Quels contacts véritables les passagers de l’Aranui 5 auront-ils, en quelques heures, avec la population?

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Petite randonnée de 90 minutes au-dessus de Taiohae en direction de « la baie Colette », le mercredi 21 décembre…
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… Nous partageons la plage avec une famille et quelques nageurs, dans une mer toujours agitée dans cette partie de l’île. Une légende dit qu’une goélette – Le Colette – s’est abîmé autrefois ici. D’où le nom de la baie.
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Retour matinal au « petit quai » de Taiohae, le vendredi 22 décembre. Pour info, le thon rouge ci-dessous, fraîchement pêché se vend 600 CFP (5 euros) le kilo à Nuku Hiva. Le même poisson se vendra 2 000 CFP (16 euros) à Papeete.
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Isabelle et Tevaea ont été toutes les deux aux petits soins pour nous pendant notre séjour à Nuku Hiva. « Vaie Nui » (Merci beaucoup!)
Tonata, 3 enfants
Merci aussi infiniment à Tonata! Nous n’oublierons pas votre gentillesse, toutes les trois!

En compagnie de Kelly, notre guide, née à Taiohae, et de deux jeunes femmes, logées à notre pension, grande excursion le vendredi 23 décembre autour de Niku Hiva. Objectif: la visite des « trois vallées » situées sur la côte est de l’ile: la vallée de Taipivai, la vallée de Hatiheu et la vallée Aakapa, cette dernière sise non loin de l’aéroport. (SVP voir la carte plus haut)

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Au-dessus de Taoihae le vendredi 23 décembre. Notre guide, Kelly, est en vert, sur la droite.
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Troupeau de chevaux semi-sauvages sur la route entre Taiohae et Hatiheu

Après une heure de route, au milieu de paysages spectaculaires, nous arrivons sur une crête qui surplombe le village de Hatiheu (200 habitants)

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La baie de Hatiheu, le vendredi 23 décembre
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et nous plongeons ensuite jusqu’à la petite plage qui borde le village. J’ai l’impression d’être de retour sur la côte sud d’Haïti!
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Partout, à Hatiheu, sourires et « kaoha » nous accompagnent!

Passage obligé à Hatiheu par le restaurant « Chez Yvonne » où nous nous régalons… 

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Menu du jour « Chez Yvonne » à Hatiheu
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Poisson cru accompagné de « uru » (arbre à pain) et de manioc

Nous quittons Nuku Hiva lundi matin pour Hiva Oa. Un vol d’une quarantaine de minutes.

Il nous sera difficile de quitter cette belle et grande île sauvage des Marquises!

Les gens ici comme partout où nous sommes passés en Polynésie ont été si accueillants!

Vaie Nui! Vaie Nui! (Merci! Merci!)

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Jeune cavalier rencontré sur la route de Hooumi, dans la vallée Taipivai, le vendredi 23 décembre
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Quelques minutes plus tôt au bord de la plage du village de Hooumi, à la pointe sud-est de Nuku Hiva

Notre voyage en Polynésie française malheureusement tire à sa fin.

Faut-il déjà rentrer?

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Partie de pétanque au bord de la plage, à Taiohae, le dimanche 18 décembre.

Avant de quitter Nuku Hiva, nous sommes allés tôt ce matin, samedi 24 décembre, faire un dernier tour au « petit quai » de Taiohae.

Nous vous laissons avec quelques images de ce village paisible des Marquises où tout le monde se connaît. Et où chacun oeuvre, semble-t-il, sereinement, au bien-être de la communauté. 

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Esther, Jean-Gendron et Joseph à la table du petit marché du samedi de Taiohae, ce matin, 24 décembre
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Le samedi matin, dès l’aube, le « petit quai »…
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… de Taiohae est particulièrement…
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… animé. Tout le village se donne rendez-vous autour des étals où l’on découpe et vend le poisson.

JOYEUX NOËL À TOUS!