Soutien au Maroc

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Juillet 1988, premier voyage au Maroc. Après des haltes à Tanger, Asilah, Fès et dans le village de montagne de Azrou (au sud de Fès), je poursuis ma route vers Marrakech et Agadir. SVP voir les cartes ci-dessous.
Été 1988 El Jadida Maroc
Quelques semaines plus tard, en août 1988, sur les remparts de l’ancienne cité fortifiée de El Jadida, sur la côte atlantique.

Comment exprimer notre solidarité envers le peuple marocain – et lui venir en aide – après le tragique tremblement de terre qui a secoué, le 8 septembre, le centre du pays ?

C’est la question que nous nous sommes posée à Vancouver dès la diffusion des premières images du séisme, survenu dans une région, au sud-ouest de Marrakech, que nous connaissons et où nous avions l’intention de retourner cet automne.

Depuis plusieurs mois déjà, nous étions en mode planification pour un nouveau voyage au Maroc – un quatrième séjour au « Royaume » pour moi, un second pour Diana.

Une longue histoire d’amour avec un pays accueillant, chaleureux, où je me suis souvent senti presque comme chez moi.

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Aux abords de la Place Jemaa el-Fna, à Marrakech, en décembre 2007. Photo: Diana

Après mes années d’études à Montréal (McGill) et à Vancouver (UBC), le Maroc (avec l’Espagne et le Portugal) a été l’une de mes toutes premières destinations de voyage lorsque j’ai enfin rejoint, comme enseignant, le marché du travail.

J’avais finalement quelques sous en poche, un emploi stable, utile, passionnant – et de quoi voyager, l’été.

Je me rappellerai toujours mon arrivée, en juillet 1988, dans la médina de Tanger, émerveillé, après avoir traversé la Méditerranée, en bateau, depuis Algeciras. (Les traversiers en provenance de l’Espagne arrivaient à ce moment-là directement au port de Tanger, situé juste en-dessous de la médina, la vieille ville).

Les ruelles de la médina étaient pleines de monde, les cafés, bondés, un chameau égaré se promenait près des boutiques du « Petit Socco », personne n’y prêtait attention, il y avait partout un brouhaha indescriptible, une clameur venant des souks. Un vendeur d’eau fraîche, lourdement vêtu de laine rouge, serviette et gobelets d’argent à la main, un chapeau de paille sur la tête, zigzaguait devant moi, en haranguant la foule, à la recherche de clients…

J’ai posé mon sac à l’extérieur d’un café. Ai pris une table. Très vite, avec un grand sourire, on m’a servi du thé à la menthe, brûlant.  Autour de moi, des rires, des palabres. Je passais complètement inaperçu.

Je n’ai jamais oublié ce spectacle ni ces premières heures à Tanger! J’étais fasciné. L’Europe, que je venais à peine de quitter, était si loin!

C’est à ce moment-là, je crois, lors de ces premiers pas au Maroc, que j’ai attrapé une maladie, devenue, depuis, incurable: le virus du voyage.

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Soulignées en bleu, les principales étapes de mon voyage au Maroc, en 1988. En vert, le parcours (avec Diana) d’un second séjour, en 2007. En rouge, quelques-unes des haltes d’un troisième périple, de Tanger à Tétouan à Chefchaouen dans les montagnes du Rif, en 2012, pour marquer le début de ma retraite.

Début septembre donc, tout était prêt pour ce quatrième voyage. Nos hébergements, réservés. Nos billets d’avion, confirmés. Départ pour Marrakech le 13 novembre, retour le 10 janvier. Un séjour de deux mois. Notre itinéraire devait cette fois nous emmener jusqu’aux portes du Sahara.

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Soulignées en bleu, les étapes du parcours prévu cet automne/hiver. Après Marrakech, cap sud-est, via Ouarzazate, vers la palmeraie de Skoura avant de rejoindre, fin novembre, Zagora. Retour ensuite sur la côte atlantique pour un longue halte (un mois) dans un riad dans la médina de Essaouira.

Lors de notre précédent séjour, en 2007, nous avions passé plusieurs jours dans la ville et la province de Taroudant, situées juste au sud de l’épicentre du récent tremblement de terre. Nous avions aussi cette année-là (déjà) séjourné à Marrakech puis à Essaouira.

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Décembre 2007, premier séjour au Maroc pour Diana, ci-dessus, dans l’atelier d’un sculpteur de pierre, dans un village de montagne, au sud de Taroudant.

De ce voyage, en 2007, nous n’avons gardé que d’excellents souvenirs.

La gentillesse, l’hospitalité marocaine. Les randonnées avec un guide dans les villages reculés du Haut Atlas. Le marché animé de Taroudant.

Nous nous étions presque partout déplacés en « grand taxi », entassés à six dans ces vieilles Mercedes qui parcourent le pays pour trois fois rien, à une vitesse folle, la sono poussée à fond. « Inch Allah, mon frère! », murmuraient les passagers, en se cramponnant aux sièges.

Autre souvenir? La cuisine marocaine. En plus des délicieux tajines, après toutes ces années, Diana a encore sur le bout de la langue le goût sucré des «msemem », les délicates crêpes feuilletées, enrobées de miel, servies le matin avec le café et de la confiture d’abricots.

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Petit-déjeuner sur la terrasse de notre modeste hôtel, à Marrakech, en décembre 2007.

Et voilà que cette région que nous avions tant appréciée était violemment touchée, mutilée. Le dernier bilan du séisme du 8 septembre fait état de 3000 morts, plus de 5000 blessés. 50 000 habitations ont été détruites.

Que devions-nous faire? Que pouvions-nous faire?

Vu l’ampleur du séisme, fallait-il annuler notre voyage?

Quelle était la situation sur le terrain?

Afin d’y voir plus clair, nous avons décidé à la mi-septembre de prendre contact avec chacun des établissements où nous devions loger. Et nous avons rapidement reçu une réponse – presqu’un cri –  la même, partout, unanime.

« Ce n’est pas le moment de laisser tomber le Maroc. Nous avons besoin de vous. Venez! »

Voici deux extraits des missives que nous avons reçues.

Marrakech, le 11 septembre

« Bonjour,

Vu le nombre de messages que je reçois, je suis navré de ne pas répondre à chacun de vous, personnellement, alors j’envoie le même message à vous tous, chers clients.

Merci infiniment pour vos messages d’inquiétude, votre soutien et vos chaleureux sentiments! Je vous rassure que toute notre équipe est saine et sauve ainsi que tous les membres de nos familles! Je vous confirme que votre réservation est maintenue! Au plaisir de vous accueillir très prochainement. »

Très cordialement,

Monsieur Saïd

*******

Skoura, le 18 septembre

Bonjour Max et Diana,

Merci de prendre des nouvelles de l’équipe. Skoura à été touchée par le séisme, mais aucun blessé n’est compté à ce jour. Beaucoup de maisons traditionnelles (construites en pisé) sont abîmées, et certaines familles doivent être relogées.

Nos constructions sont antisismiques. La structure des bâtiments n’a pas été touchée. Malgré tout, nous avons beaucoup d’éléments de décorations cassés, quelques fissures à réparer et le plâtre à refaire. Mais, nous restons ouverts, et nous pouvons vous accueillir en toute sécurité. Votre séjour est confirmé. »

Nicolas

Même son de cloche à Zagora et à Essaouira.

Le message était clair. Les gens avaient besoin de nous. De notre contribution. Ce n’était pas le moment d’annuler.

Comme le précisait dans la presse un résident de Marrakech, quelques semaines après le séisme: « Dès qu’un groupe annule son voyage, ce sont 10 à 20 personnes, guide, muletier, transporteur, artisans, employés, qui n’ont plus de revenus. Comment vont-ils nourrir leurs familles? 

Nous avons donc décidé, dans une démarche humanitaire, solidaire, inattendue, de maintenir notre voyage.

Nous savons que ce séjour de deux mois ne ressemblera pas aux précédents – le nouveau contexte politique au Moyen-Orient, depuis les événements du 7 octobre, venant encore complexifier la situation.

Mais nous partons, confiants.

Nous serons, bien sûr, hyper prudents.

Inch Allah!

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Diana, entourée sur la place Jemaa el-Fna à Marrakech, en janvier 2008.

Voici donc le calendrier de notre périple, pour les deux prochains mois.

13 -14 novembre = Vancouver – Francfort – Marrakech

14 – 18 novembre = Marrakech

18 – 25 novembre = Palmeraie de Skoura

25 novembre – 1er décembre = Zagora

1er – 4 décembre = Marrakech

4 décembre – 4 janvier = Essaouira

4 – 9 janvier = Marrakech

9 -10 janvier = Marrakech – Francfort – Vancouver

2 septembre 2023 UBC Buchanan D.JPG1plus
Sur le campus de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) lors d’une randonnée en vélo en septembre.
8 septembre 2023 VRC Squash Court
Avec l’un de mes partenaires de squash, au « Vancouver Racquets Club » – le court de UBC étant dorénavant fermé. Parties endiablées plusieurs fois par semaine…

Notes de lecture:

Roland Brival, Les fleurs rouges du flamboyant – (Paris, 2018)

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Un roman magnifique, bouleversant. Le retour inattendu au pays natal, en Martinique, d’un écrivain, Simon Darnell, exilé en France depuis 20 ans. Que se cache-t-il derrière ce retour? Que vient donc chercher sur l’île Simon, se demandent les membres de sa famille, oncles, tantes qui n’ont jamais, eux, quitté le pays?

On apprend au fil des pages que l’écrivain est de retour afin de résoudre un douloureux mystère. Connaître – enfin – l’identité de son père. Un lourd secret de famille, bien gardé. Le roman nous plonge, dans un premier temps, dans le passé et la période insouciante de l’enfance, des vacances au bord de la mer. Puis vient l’adolescence. Face au scandale provoqué par la naissance de cet enfant bâtard, le jeune homme doit quitter l’île, sa famille, ses amis, et va rejoindre sa mère, partie plus tôt, dans une banlieue grise et anonyme de Paris. Il découvre là-bas un autre monde. Déterminé, adulte, à percer enfin ce secret de famille, l’écrivain réussit, à Fort-de-France, dans les dernières pages du roman, à retrouver son père. Un roman magistralement écrit, tout comme « Nègre de Personne » (2016) dont j’ai parlé ici dans Notes de lecture. L’un des mes écrivains préférés.

Bernard Pivot, Le métier de lire – (Paris, 2018)

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Un petit livre truffé de souvenirs et d’anecdotes qui nous emmène dans les coulisses de deux émissions littéraires phares de la télévision française: « Apostrophes » (1975-1990) et « Bouillon de culture » (1991-2001), programmes cultes, animés par Bernard Pivot.

Pendant vingt-cinq ans, des centaines d’écrivains français et étrangers ont répondu, souvent avec verve et panache, aux questions fécondes de Bernard Pivot. Ces entretiens, diffusés généralement le vendredi soir, ont eu un énorme retentissement. Le samedi, les lecteurs, un peu partout en France et dans la francophonie, assaillaient les libraires, réclamant avec impatience les ouvrages dont on avait parlé la veille. La formule est ici renversée. En répondant – par écrit – aux questions de Pierre Nora, Bernard Pivot revient avec malice, intelligence et humour sur les grands et petits moments de ces deux émissions, mythiques, qui ont marqué l’histoire du petit écran et de tout un pays.

Leïla Slimani, Le diable est dans les détails – (Paris, 2017)

lslimSix nouvelles, « six petits bijoux« , d’une écrivaine, née au Maroc, de parents « qui aimaient Voltaire et les Lumières. » Six textes, courts, mordants, écrits « dans l’urgence et la rage », au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, à Paris.

Leïla Slimani pourfend dans ce recueil les ayatollahs et les intégristes de tout poil qui n’hésitent pas, au nom du prophète, à tuer, à détruire, à interdire, à lapider des femmes. J’ai lu ces nouvelles avec l’impression d’avoir une grenade logée au creux de la main, grenade qui peut exploser à tout moment. Forte et intense expérience de lecture. Un authentique appel à la mobilisation, à l’engagement citoyen.

Voici un extrait d’un des textes. « Moi, née musulmane, Marocaine et Française, je vous le dis (…) Paris est ma patrie depuis le jour où je m’y suis installée. C’est là que je suis devenue une femme libre, là que j’ai aimé, que j’ai été ivre, que j’ai connu la joie, que j’ai eu accès à l’art, à la musique, à la beauté (…) Paris est tout ce que vous haïssez. Un mélange sensuel et délicieux de langues, de peaux et de religions. Paris où l’on s’embrasse à pleine bouche sur les bancs (…) Cette nuit, nos théâtres, nos musées, nos bibliothèques sont fermées. Mais demain ils ouvriront à nouveau et c’est nous, enfants de la patrie, mécréants, infidèles, simples flâneurs, adorateurs d’idoles, buveurs de bière, libertins, humanistes, qui écriront l’histoire. » Merci, Leïla Slimani. À noter, l’avant-propos du recueil, lumineux, rédigé par Éric Fottorino.

21 octobre 2023 2
Grand bonheur de revoir ma soeur, Marie-Hélène, venue de Montréal nous rendre visite à Vancouver, il y a quelques jours. Ci-dessus, au parc Sunnyside, dans le quartier Kensington-Cedar Cottage.
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Restaurant végétarien Po Kong, Kingsway, Vancouver, octobre 2023.

6 réflexions sur « Soutien au Maroc »

  1. Un autre voyage plein de signification vous attend, toi et Diana. Je pense que vous allez encore une fois apprécier votre voyage. Qu’il se déroule à la hauteur de vos souhaits alors que vous rencontrerez de nouvelles connaissances.

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    1. Merci infiniment, Florence! Cela fait chaud au coeur. On se revoit sans faute à notre retour. Porte-toi bien, et SVP n’oublie pas d’accomplir tes kilomètres quotidiens lors de tes marches et randonnées.

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  2. Bonjour Max et Diana, On sent très fort l’amour qui vous lie au Maroc et au peuple marocain, depuis si longtemps! Ce prochain voyage va être plein d’émotions et de spéciales retrouvailles! passez des moments merveilleux ; les personnes rencontrées et les magnifiques paysages seront un maillon de plus avec ce beau pays! Bon voyage ! bises

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    1. Merci beaucoup Christiane pour tes voeux, tes mots d’amitié. Tu as raison, ce voyage sera plein d’émotions, le pays a sans doute beaucoup changé depuis toutes ces années, surtout les villes, mais je suis sûr que l’hospitalité, la générosité marocaine sont toujours bien présentes. Nous te souhaitons une fin d’année pleine de découvertes et de soleil dans ton beau sud-ouest! Merci pour tout.

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  3. Bien hâte de lire tes publications pour cette nouvelle aventure. J’ai pris bonne note de ta recommandation de lecture : Les fleurs rouges du flamboyant. Bonne entrée en matière pour notre voyage aux Antilles en janvier prochain.

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    1. Merci Alix, nous avons aussi bien hâte de revoir le Maroc et des régions que nous ne connaissons pas. J’espère que tu aimeras autant que moi le roman de Roland Brival. Brival est un personnage aux multiples talents, il est aussi chanteur, musicien et pas assez connu, comme écrivain, selon moi. Bons préparatifs pour votre voyage!

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